[LANCEHELION] Aux ordres de la princesse ✧ ft. Elia Dayne (PNJ)

Les ordres d’Edmund étaient clairs : Arianne devait rester à Lancehélion, assister Elia en cas de besoin et laisser comme toujours traîner ses yeux et ses oreilles où elle le pouvait. Se sentant enfin valorisée, la jeune femme s’enorgueillissait que cette mission lui ait été confiée à elle. Elle, et elle seule. Pour une fois, la première de sa vie, Daemon n’était pas là. Il n’occupait pas toute la lumière et ne projetait pas son ombre immense sur sa sœur, car en bon bouclier-lige, il avait suivi le prince à Port-Réal. Les journées d’Arianne étaient longues et ennuyeuses, son cousin parti depuis seulement trois jours, elle chassait pourtant sa lassitude en se serinant de ces mots : elle était utile et elle servait Dorne.

Si Ryon daignait poser les yeux sur elle, il le verrait.

La bâtarde prenait son rôle très à cœur, ainsi, alors qu’il n’était même pas midi, elle faisait sa troisième ronde de la journée. Sa lance à la main, fermement empoignée si jamais elle devait se défendre et protéger Dorne, elle sillonnait les couloirs du Palais Vieux, ses yeux furetant dans leurs dédales, alertes. Mais il n’y avait rien.

Pas une menace, pas un murmure. La délégation du prince partie, l’endroit sentait le sable et s’assourdissait de silence. Elle écrasa un soupir dans ce triste constat. Servait-elle vraiment à quelque chose ?

— Arianne.

Refermant sa prise sur sa lance, elle se retourna brusquement en pointant la pique vers l’intrus. Ce n’était au final qu’un garde qui haussa un instant les sourcils avant de lui sourire – tous ici s’habituaient à son caractère trop vif et la tempête qui l’agitait constamment. Si désireuse de faire ses preuves, si terrifiée à l’idée de mal faire, Arianne en faisait toujours trop.

— La princesse souhaite te voir.

Les yeux de la bâtarde s’écarquillèrent, de joie, de surprise. Et abandonnant sa ronde, elle se précipita à la salle seigneuriale. Sur le trône réservé à la princesse, Elia semblait l’attendre. Le regard d’Arianne s’attarda un peu sur la grandeur et la beauté des lieux, où elle se sentait toujours comme une étrangère, avant de se poser sur l’épouse d’Edmund. La dame des Météores brillait par sa splendeur et la jeune dornienne s’approcha d’un pas un peu traînant, intimidée.

— Princesse Elia, que puis-je pour vous ? demanda-t-elle dans un souffle.

Elle ne demandait qu’à servir.

Les mots d’Elia surprirent Arianne. Quitter Dorne ? Un instant, elle songea aux ordres d’Edmund : elle devait rester à Lancehélion. Elle cilla plusieurs fois, incertaine, mais la suite des paroles de sa supérieure lui firent ravaler son hésitation. Apparemment, son cousin était au courant de l’idée d’Elia, il ne lui en avait pas fait part mais la bâtarde croyait en elle. Puis, elle voulait faire ses preuves ? Oui, bien sûr.

La bâtarde esquissa un pas vers la princesse de Dorne, redressant les épaules avec fierté, ses lèvres s’entrouvrant sous un espoir fou. Quoi qu’elle lui demande, c’était là sa chance. En aurait-elle une autre, après cela ?

— Je suis à votre service, princesse Elia.

Dans un geste peut-être trop solennel, Arianne posa un genou à terre et posa sa lance aux pieds de la Dayne. Levant la tête vers elle, un sourire fébrile frémit un instant à sa bouche pulpeuse. De joie, ses yeux s’agrandirent tandis qu’elle imaginait rendre honneur à Dorne, rendre le prince, puis ensuite son père, fiers d’elle. Peut-être serait-elle autre chose qu’Arianne, la bâtarde de La Gracedieu ? Peut-être serait-elle Arianne la Glorieuse, ou l’Honorable Arianne, ou la Brave Arianne… Des étoiles rêveuses pétillaient au fond de son regard.

— Dites-moi ce que je peux faire pour vous, et je le ferai. Je partirai dans la journée s’il le faut.

Sa voix, un souffle empli de fantasmes et d’espoirs, elle peignit un grand sourire à ses lèvres. Toujours à genoux, elle n’attendait qu’une chose : ses ordres. Ceux qui lui permettraient d’enfin s’illustrer aux yeux du monde, de Dorne. Ce jour, elle devenait quelqu’un.

À l’ordre d’Elia, Arianne se redressa, bon chien. Elle tâcha de garder la tête et le regard droits, désireuse de faire honneur à son père, à la princesse et à elle-même. Lorsqu’on était que Sand, il fallait bien faire des efforts. Toujours, lui avait appris Ryon. Elle écouta attentivement les mots de sa supérieure qui lui offrait, hocha la tête pour lui signifier qu’elle comprenait bien.

Elle connut enfin les raisons de sa présence ici, et se sentit honorée qu’on ait pensé à elle. Elle avait prouvé sa loyauté à Dorne au point d’en devenir la représentante… au Nord. Un frisson lui mordit l’échine. De peur comme de froid. Elle n’avait jamais été plus loin que Port-Réal ou Villevieille, ne savait rien des terres lointaines et froides.

Mais les derniers mots d’Elia achevèrent de la convaincre – si seulement c’était nécessaire – ; honorer le nom Sand. Prouver au monde qu’elle était autrement plus que la bâtarde. Qu’elle avait elle aussi sa valeur. Un sourire se peignit à ses lèvres.

— Je l’honorerai. Le nom Sand, et la principauté – je puis vous le jurer.

Les ordres d’Elia, bien qu’aux contours flous, étaient clairs : se mettre au service de la reine du Nord, gagner sa confiance et permettre un lien entre la principauté et le royaume indépendant. Arianne prit la missive et remercia la princesse de Dorne d’un hochement de tête solennel. Puis elle se recula d’un pas, écoutant ses dernières directives.

Le dernier ordre la fit sourire : pas qu’il l’amuse, au contraire. Naïvement, Arianne y vit un signe qu’elle comptait réellement. Oh, les relations avec Elia n’étaient que celles d’une supérieure et de sa subalterne, mais elle comptait pour Dorne. Suffisamment pour qu’on la veuille en vie.

— Je vous remercie, princesse Elia. Je n’y manquerai pas.

Puis après un bref regard vers la missive cachetée du blason Dayne, elle regarda Elia.

— Et je vous reviendrai en vie une fois ma mission terminée, je vous le promets.