Le combat des vivants | Lorent Caswell

__ Jon !

Une jeune femme ébouriffée et débraillée qui n’avait manifestement aucune notion de pudeur ni de protocole tambourinait à la porte d'une chambre. Les gardes avaient bien essayé de l’arrêter, mais ils n’avaient pas osé frapper une femme enceinte et sans armes, même si elle était très mal coiffée. L'un d'eux s’était donc contentés de la suivre. L’aube n'avait pas encore pointé le bout de son nez et Fallon portait une chemise et un pantalon qu’elle avait à peine pris le temps d’attacher. En effet, son rêve de loup était très clair, les Marcheurs Blancs seraient là d’ici un jour tout au plus. Elle devait donc prévenir quelqu’un de haut placé, et Jon était la seule personne qu’elle connaissait, mais elle le connaissait comme Lord Commandant de la Garde de Nuit et elle n’avait pas tellement suivi les derniers rebondissements de ses titres.

__ Lord commerçant…

La brune aux yeux de glace secoua la tête, consciente de son erreur, mais incapable de retrouver le bon mot. Elle dit pour elle même :

__ Non c’est pas ça.
__ Pas ça du tout, c’est le Roi du Nord maintenant.
__ Ah.

Elle recommença à tambouriner sur la porte.

__ Roi Jon !
__ Ce n’est pas sa chambre, c’est la chambre de… Lord Caswell.
__ Ah…

Winterfell était immense et si la Forêt Hanté l'était plus encore, la sauvageonne avait nettement plus l’habitude de se repérer dans la nature que dans le dédales de coursives et de bâtiments. Ainsi, au lieu d’aller dans le bâtiment seigneurial, elle était allée dans l'hôtellerie et elle avait choisi une chambre dont la porte lui paraissait cossue. Mais avec cette information, elle se tourna vers le garde, ne se souciant plus de savoir si la porte s'ouvrait ou non.

__ Alors emmènes-moi chez Jon.
__ Non.
__ Pourquoi ?
__ Parce qu’il fait encore nuit et que c’est Sa Majesté Jon Stark.
__ J’ai une chose très importance à lui dire !
__ Ah oui et quoi donc ? T'as eu une révélation dans la nuit ?
__ C’est… C’est ça ! Une révélation de la nuit.
__ Cette révélation ne serait pas, par hasard que les sauvageons se chient dessus devant les Autres et ne se battront pas aux côtés des nordiens ?
__ Non… ce n’est pas ça. Évidement on chie, mais on fait ça proprement, Et je me battrais. Et on dit peuple libre, môsieur Majesté.

Le garde, déjà moqueur, explosa de rire pour de bon après avoir ostensiblement baissé les yeux sur le ventre légèrement arrondi de la brune.

__ Des femmes enceintes et des armes en pierre… merci pour le coup de main.

Fallon ne comprit pas le problème, donc la plaisanterie évidente pour n’importe qui d’autre lui passa totalement au dessus. Elle croisa les bras et le regarda rire en plissant les yeux, parce que si elle ne comprenait pas la blague, elle comprenait bel et bien qu’il se moquait d’elle. Elle profita de son fou rire pour lui mettre un puissant chassé dans le ventre, ce qui, avec le poids de l’armure et l’absence totale de méfiance et de concentration, le fit tomber sans grande difficulté.

__ Un homme d’acier coincé sur le dos, ça vaut pas mieux qu’un mouton.

Le garde qui peinait à se relever était plutôt furax, pas tant que le coup lui ait fait mal, ni même la chute, mais l’humiliation était bien là et le fait que se soit une femme, qui plus est une sauvageonne qui lui donne cette leçon n’était pas pour lui plaire. Fallon recula donc et se prépara à esquiver ses coups le temps de s'enfuir. Sans arc ni flèche ni couteau, elle ne pouvait pas faire grand chose de plus, et puis face à une lame en acier, son couteau en os ne ferait pas le poids très longtemps.

Fallon était agile et rapide, quoiqu’un peu moins avec ce petit ventre qui commençait à poindre, mais elle était bien consciente qu’elle ne faisait pas le poids face à un garde en armure. Et puis les lames en acier lui fichaient la frousse depuis l’attaque du Mur et le massacre des sauvageons par la cavalerie de Stannis. Ce souvenir restait gravé dans sa mémoire aussi sûrement que la cicatrice infligée ce jour-là marquait toujours sa peau. Avant déjà elle préférait les chevaux en pâté ou en saucisson plutôt que montés, mais à présent, elle préférait garder ses distances avec ceux qui étaient caparaçonnés comme leur cavalier. Mais ça n’était pas la question, pas de cheval dans ce couloirs, juste elle et un soldat en colère. Une situation compliquée dont elle ne savait pas encore comment sortir. Elle cherchait une issue quand, par chance, un homme sortit de la chambre pour arrêter le garde. Un grand blond torse nu dont elle vit d’abord le dos et le bras - sacrément puissants se fit-elle la réflexion - avant d’apercevoir le reste - pas mal non plus.

Elle n’aimait pas trop qu'on la sauve, d’ailleurs elle grimaça quand le grand blond, bien que soulignant la stricte vérité renvoya le garde à son poste et que ce dernier s’éloigna avec un regard noir. Elle allait devoir se méfier de lui pendant longtemps et ce alors même que le casque sur sa trogne ne lui permettrait peut-être pas de le reconnaître dans d’autres circonstances. Mais elle devait se rendre à l’évidence, ce foutu couloir n’offrait pas beaucoup d’issues, donc il lui avait bel et bien sauvé la mise.

__ Taing mhòr.

Fit-elle en vieille langue avant de se reprendre.

__ Merci.

Bon, comme le garde avait prévenu, ça n’était pas Jon. Il avait dit quoi déjà ? Carel ? Cassel ? Elle n’était plus très sûre et après ce qui s’était passé avec le garde, elle préférait éviter les ennuis. Peu de chance qu’un autre blond torse nu aussi sexy sorte d’une autre chambre pour lui sauver les miches.

__ Lord.

Ca, elle en était sûre, même si elle ne comprenait pas grand chose à ses histoires de titres, elle avait tout de même pu percevoir que c’était important aux yeux du garde d’appeler Jon Majesté. Pas certain cependant que l’ancien Lord Commandant de la Garde de Nuit lui tienne rigueur de son erreur, il connaissait trop bien les sauvageons pour s’en offusquer. Le Seigneur proposa à une demoiselle de la raccompagner à sa chambre et il fallut plusieurs secondes à la sauvageonne pour comprendre que c’était elle la demoiselle. Il enfila une veste en fourrure, cela surprit un peu la brune qui trouvait qu’il faisait plutôt chaud dans la forteresse.

__ Qu’est-ce qu'elle a ma tenue ?

Demanda-t-elle en regardant son pantalon débraillé. Elle le remonta et resserra les lacets en hochant la tête. Ils étaient marrants ces gens qui étaient bien habillés même quand ils dormaient, enfin habillés, à moitié habillés. Mais avant qu’elle n’ait pu dire qu’elle pouvait rentrer seule dans sa chambre, il lui proposa de la mener à Jon et se présenta, ce qui leva le doute sur son nom. Elle ignorait ce que voulait dire enchanté et imagina que c’était l’endroit d’où il venait, elle répondit donc, en tendant vers lui une main ferme :

__ Fallon. Forêt Hantée.

Fallon se mit à rire en voyant la veste qu’il lui tendait et attrapa doucement la main du Caswell pour lui faire sentir la chaleur des siennes. Elle avait connu les froids du vrai nord, elle avait dormi à la belle étoile dans les Crocgivres. Elle avait eu les lèvres en sang après que le froid glacial les ait gercées. Les sources chaudes sous Winterfell rendait la température des bâtiments très confortables pour une sauvageonne. Elle prit néanmoins la veste, car si elle s’était trompée de bâtiment, cela impliquait qu’ils allaient devoir sortir et dehors en pleine nuit la chemise risquait de ne pas suffire. Elle hocha donc la tête.

__ Merci, mais, je pas avoir froid. Je même avoir chaud si vous pas mit la veste.

La brune aux yeux de glace leva un sourcil et un regard amusé sur le grand blond, elle savait bien qu’elle ne parlait pas très bien la langue commune, certainement pas assez pour un Seigneur, mais elle s’en fichait pas mal, cela l’amusait d’essayer de le mettre mal à l’aise. Les hommes du sud du mur étaient tellement coincés et leurs femmes n’en parlons pas. En avait-il une ? Elle se posa la question, mais le concept de fidélité si cher à d’autres n’avait aucune importance pour elle et son clan. Les femmes étaient libres de prendre un amant pour une nuit ou pour une vie, d’enfanter sans connaître le père et les hommes jouissaient d’une grande liberté également. Or, s’ils devaient tous mourir demain, autant prendre du bon temps avant l’ultime bataille.

__ Je veux bien que vous me conduire à Jon, Lorent, Je sais bien qu’il faire encore nuit, mais l’armée des morts est toute proche, un jour tout au plus. Il doit savoir.

Répondit-elle avec un peu plus de sérieux avant de reprendre un air mutin pour ajouter :

__ Si on se perdre, on se perdre à deux et puisque vous être frileux, je peux vous réchauffer.

C’est alors qu’elle aperçut les lames en obsidienne. Surprise de voir de telles armes dans la chambre d’un seigneur qui venait manifestement du sud, et plus étonnée encore que la roche ne se soit pas brisée lors de la taille des épées, elle resta interdite devant la porte encore ouverte.

__ Comment vous avoir taillé des lames si longues ?

__ Quel état ?

Répondit Fallon avant de tilter qu’il parlait de sa grossesse.

__ Ah, ça ?!

Fit-elle alors en posant son index sur son ventre avant de passer sa main dessus dans une brève caresse.

__ Lui être au chaud, moi pas voir ce qui inquièter vous. Vous être vraiment bizarre dans le sud, vous pas savoir que les bébés sont au chaud tant qu’ils sont dans le ventre ? C’est après qu’ils meurent.

Dit la brune d’un ton parfaitement détaché étant donné la mortalité infantile très importante qui existait dans son peuple. Cela dit, les gens du sud n’étaient pas beaucoup mieux lotis, même si l’été était plus propice à la survie des nourrissons. Bref, c’était un fait, les bébés mouraient beaucoup une fois qu’ils n’étaient plus au chaud dans le ventre de leur mère. Évidemment il y avait des fausses couches, mais ça n’était pas à cause du froid, plutôt à cause du manque de nourriture. Pour Fallon la mort faisait partie de la vie et toutes les femmes savaient que perdre un enfant était le lot apporté par la maternité. Elle prit le manteau sous le coude.

__ Bah oui ! C’est ce que je tue pour dire !

Parfois, la sauvageonne devrait éviter d’essayer d’utiliser certaines expressions de la langue commune qu’elle maîtrisait très mal. Mais bon, qui ne tente rien n’a rien, alors elle essayait et cela pouvait parfois mener à de sacrés malentendus, comme d’ailleurs le reste de sa façon de s’exprimer.

__ Et je sais. J’ai vu. C’est tout.

Plongeant son regard d’un bleu de glace dans celui du Caswell, elle le jaugea un instant. Il n’avait pas l’air de s’offusquer de grand chose, à part du fait qu’elle n’ait pas froid, mais ça devait être normal pour un sudien. Et encore n’imaginait-elle même pas à quel point il venait de loin au Sud. Elle n’avait aucune idée de l'existence du Bief et de l’immensité du continent ou des chaleurs qui pouvaient régner à Dorne.

__ Oui, d’accord. Toutefois.

Fit-elle d’un air très sérieux vu qu’il n’avait pas l’air d’avoir compris où elle voulait en venir et qu’elle ignorait totalement la signification de ce mot, mais qu’elle s’était dit que si elle l’utilisait, il oublierait de lui redemander comment elle savait pour les Autres. La plupart des gens avaient peur des zomans, chez le peuple libre, on les craignait plus qu’on les admirait et ils étaient souvent rejetés, alors elle n’en parlait jamais et préférait que ses proches pensent que c’étaient les Dieux qui lui avaient parlés. C’était bien plus simple ainsi, bien plus normal et acceptable pour une Sorcière-Guerrière, de recevoir des messages des Dieux en écoutant les arbres et les ruisseaux plutôt que de voir à travers les yeux d’un loup.

Fallon prit la lame que lui tendit Lorent. Elle manqua de la lâcher car elle était bien plus lourde que celles qu’elle était habituée à manier. Sa mère avait bien essayé de l'entraîner à la lance, mais elle n’avait aucune patience et sa fille était totalement nulle à ses yeux. Elle écouta les explications du grand blond avec attention en observant la lame. C’était vraiment un travail magnifique et une sauvageonne qui avait l’habitude de tailler ses pointes de flèche dans le silex ou l’obsidienne ne pouvait que le constater. Les coups de taille étaient d’un grande précision et la lame vraiment bien plus longue que ce qu’avait jamais pu observer la jeune femme.

__ Oui, l’obsidienne contenir le feu du ventre de talamh. Et feu tuer les Dieux Froids.

Elle lui rendit l’arme qu’il lui avait confiée.

__ Nous avoir des armes en pierre noire. Verredragon vous appeler ça ?

Les sauvageons utilisaient cette pierre comme du silex pour tailler des lames courtes, des pointes de lances et des pointes de flèches, elle en avait toujours eue et depuis elle avait eu quelques altercations avec des morts-vivants et quelques Marcheurs Blancs ou l'obsidienne lui avait été fort utile.

__ Acier Valyrien ? C’est quoi ?

Même les sauvageons avaient réussi à s’entendre et à se rassembler pour faire front contre les Autres. Leur seul salut était de passer le Mur pour s’en protéger, mais cela n’avait que partiellement réussi. Ainsi les sudiens ne valaient pas beaucoup plus si peu de nobles avaient répondu à l’appel de la Reine Daenerys. Les uns comme les autres passaient plus de temps à se chamailler et à se voler les uns les autres ou simplement à se taper dessus qu’à s’entendre pour faire face à un danger bien plus grand. L’idée que les nobles avec leurs beaux habits et leur mépris ne soient pas plus malins que les ressortissants du peuple libre fit sourire la brune aux yeux céruléens qui hocha la tête, car oui, elle même avait déjà perdu beaucoup à cause des Autres et avec la bataille qui s'annonçait, elle savait qu’elle perdrait encore des gens qu’elle aimait, probablement même sa propre vie. Cette réflexion la fit penser à ses enfants qui risquaient de finir orphelins, si seulement eux aussi survivaient à la vague des Ombres Blanches.

__ Vous grand guerrier au sud ?

La jeune femme, bien plus à l’aise pour se repééer à l’exterieur qu’entre quatre murs se laissait guider par le Bieffois, hésitant parfois entre un couloir ou un autre. Elle croisait des regards apeurés, décidés, vitreux et se disait que s’ils savaient à quoi s’attendre, tous seraient certainement morts de peur. Mais ils étaient tous courageux d’être là et elle leur souriait à tous sans exception, même ceux qui la regardaient de travers. De toute façon, elle avait l’habitude qu’on la regarde de travers, la plupart des Nordiens et des Corbeaux la regardaient ainsi depuis qu’elle avait passé le Mur avec sa mère pour garder Porte-Reine. Elle entendit Tormund faire grand bruit dans la salle commune, comme à son habitude. Et elle sourit parce qu’il était égal à lui-même, toujours, même s’il avait perdu ses fils aînés. Et alors que Lorent l’interrogeait sur sa vie, elle se retourna vivement vers lui :

__ Moi pas mariée. Le père de ma fille être mort il y a longtemps, avant que nous quitter la Forêt Hantée. Et le père de celui-là être… en vie.

Il était même entre les murs de Winterfell, ignorant qu’il avait un bébé en route. Et c’était très bien ainsi. Fallon avait l’habitude d’avoir ses bébés seule et elle n’avait nullement l’intention de laisser un père interférer dans leur éducation. Ni d’ailleurs de se marier un jour.

__ Vous tromper. Beaucoup vie au Nord du Mur. Arbres, plantes, animaux, humains. Beaucoup froid, mais la vie plus forte que le froid, toujours. La mort emporter les faibles, comme partout. Nous savoir survivre dans le froid, nous êtres habitués et nous connaître le vrai hiver comme nous connaître l’Ours. Dangereux, mais bon pour manger, fourrure chaude et os solides.

Répondit-elle en souriant. Ils finirent par arriver devant une chambre et Lorent frappa, aucune réponse. Il réessaya sans plus de succès et se tourna vers Fallon.

__ Oui, nous essayer… toutefois.

Toujours aucune idée de ce que cela voulait dire, mais elle aimait bien ce mot.

__ Peut-être Jon être dans la grande salle avec Tormund ? Peut-être quelqu’un savoir où lui être là-bas ?

__ Chez-nous les enfants meurent souvent avant deux ans, alors on ne leur donne pas de nom.

Fit Fallon d’un ton détaché, comme si tout cela était normal. Elle avait perdu un enfant, elle s’en souvenait et elle en avait souffert, malgré les apparences. Ce n’était jamais chose facile que de voir l’être à qui on a donné la vie quitte ce monde. Mais effectivement, chez les sauvageons, c’était tellement banal qu’on n’en faisait pas toute une histoire. On pleurait un bon coup, on priait les anciens Dieux, on vivait le manque, le trou béant laissé par cette perte, et puis on finissait par retrouver la paix, par faire un autre enfant qui lui, survivait. Oh jamais une mère n’oubliait. Jamais. Mais la perte devenait moins douloureuse. Mais en tout cas, les bébés bien au chaud dans le ventre de leur mère ne risquaient pas grand-chose à ce stade de la grossesse. Généralement, les fausses couches avaient lieues avant ou en fin de grossesse quand le bébé sortait trop tôt. Elle était certes un peu gênée dans ces mouvements par le début de ventre, mais pour le moment, ça allait. C’était plus dur à la fin, mais ça n’était pas sa première grossesse, elle savait donc à quoi s’attendre.

La sauvageonne observa l’air perplexe de Lorent et l’écouta attentivement, même si elle ne comprit pas tout ce qu’il racontait sur l’acier Valyrien. Elle expliqua alors

__ La pierre noire tuer les Autres. Boom. Ils éclatent. Obsidienne rare au sud du mur, nous avoir souvent pointes de flèches ou de lances comme ça. Nous savoir tailler, vous savoir forger.

Le verredragon était peut-être plus efficace sur les Marcheurs Blancs, mais l’acier était sacrément plus efficace sur toutes les autres sortes d'ennemis et hélas, la bataille contre Stannis le leur avait âprement rappelé. Sans compter qu’une charge de cavalerie sur une phalange d'infanterie légère ne donnait rien de beau. La brune aux yeux de glace se souvenait parfaitement bien de cette bataille durant laquelle elle n’avait survécu que par miracle et cruellement appris la puissance des soldats du sud. Elle toucha sa cuisse, là où la lame d’un orageois avait laissé une profonde entaille et baissa la tête, car Glen avait perdu la vie ce jour-là.

Fallon fut un peu déçue d’entendre que Lorent n'était pas un grand guerrier, à croire que les gens du sud n’avaient envoyé que peu de monde et pas les meilleurs certainement. Ils se fichaient peut-être du sort des sauvageons et des nordiens, mais ils allaient pourtant devoir faire face aux Autres si ceux présents ici ne parvenaient pas à les arrêter. Elle se mit cependant à rire quand Lorent dit que le fait d’être un père pouvait le transformer en grand guerrier.

__ Moi avoir fille aussi. Tamsin. Elle dormir. Moi pas grande guerrière. Ma mère oui. Morna Masque Blanc. Grande guerrière, grande cheffe, grande chaman. Elle parler avec les Dieux.

Était-ce le fait que la mort était omniprésente au Nord du Mur qui la rendait si fataliste ou elle faite que le père de sa fille n’avait jamais été qu’un amant parmi d’autres ? Ils n’étaient pas mariés, il n’était même pas le seul homme dans sa vie, et pas l'homme de sa vie, comment imaginer n’en avoir qu’un, c’était inconcevable pour elle en vérité, car dans son clan les choses ne se passaient pas comme ça. Pourtant, elle avait aimé cet homme, elle l’avait pleuré, mais elle en avait trouvé un autre et cela faisait à présent un certain temps. Elle lui sourit quand il prononça une phrase bien trop compliquée pour son faible vocabulaire.

Une fois dans la grande salle, Tormund expliqua à Fallon que Jon prenait du bon temps avec Daenerys. Elle ne pouvait donc pas aller le déranger et lui révéler le pot-aux roses. Elle s’approcha donc de l’oreil du Sauvageon et lui murmura ce qu’elle avait vu en lui demandant de prévenir Jon dès qu’il le verrait, car il y avait de grandes chances pour qu’il le voit avant elle. Tormund la regarda d’un air circonspect et se mit à rire, alors pour qu’il la prenne au sérieux et transmette son message, elle lui glissa à l’oreille d’où elle tenait l’information. Alors il la fixa une seconde avant de se lever et de l'attraper par le col, la soulevant légèrement avant de la reposer en s'apercevant qu’elle était enceinte.

__ Mais Fallon, pourquoi tu nous a pas dit avant que tu étais une change-peau ?

Fit Tormund étonné avant qu’elle ne lui mette violemment la main sur la bouche.

__ Tais toi ! Personne ne doit savoir.

Bah là c’était raté, tout le groupe s’était retourné vers eux. Heureusement, il n’y avait aucun membre du clan de Fallon, mais le secret risquait de ne pas être gardé bien longtemps.

__ Je suis pas une change peau, je vois juste des choses dans mes rêves.
__ Dans tes rêves de loups.
__ Chut ! Tais-toi !
__ Elle n'a pas eu de mentor.

La brune regarda celui qui venait de soulever le principal problème d’un oeil noir et elle grogna sur lui et sur Tormund avan de tirer Lorent par el bras pour qu’ils s’en aillent enfin de ce guepier dans lequel elle s’était fourrée toute seule. Elle aurait mieux fait de ne rien dire au grand rouquin. Elle soupira, mais elle finit par suivre Lorent vers ses quartiers sans rien ajouter. Ils marchèrent un moment en silence, elle était plutôt remontée et avec les hormones de la grossesse, elle était au bord des larmes en arrivant vers sa chambre. Lorent l’invita alors à rejoindre Pont-l’Amer après tout ça, s’ils étaient encore en vie cependant.

__ C’est sûr, ils nous détestent, et c’est pire avec les corbeaux.

La sauvageonne haussa les épaules un peu dépitée après tout ce périple inutile dans le château et aussi parce que sa mère risquait fort d’apprendre dès le lendemain qu’elle était une change-peau.

__ Merci.

Fit-elle sans lui dire que cela avait déja été difficile pour elle de quitter la forêt hanté puis le Nord du Mur et qu’elle ne se voyait pas encore partir, surtout plus au sud.

__ Ma mère jamais accepter aller plus au sud, et vous pas pouvoir accueillir tout notre clan de toute façon. Mais merci.

La jeune femme ouvrit la porte de sa chambre, mais elle hésita. Il n’y avait pas de raison pour que Jon s’envoie en l’air pour sa dernière nuit et pas elle.

__ Vous attendre.

Fallon entra et alla embrasser sa fille qui dormait dans les bras de son arrière grand-mère, puis elle ressortit.

__ Vous vouloir faire l’amour avec moi ? Peut-être nous morts demain.

La brune aux yeux azur aurait bien aimé que ce soit Glen, mais il était mort et celui-là était bien vivant et pas mal du tout, même s' ils étaient totalement différents.