Les traits un peu tirés, Davos s’était rendu dans son bureau aux aurores, consciencieux, il avait étudié de nombreux documents jusqu’à tard dans la nuit, tentant de faire des parallèles entre de vieux cas de raids fer-nés sur le côtes ouestriennes et ceux qui avaient fait rage plus récemment. Son apprentissage tardif de la lecture le ralentissait dans ses recherches, ainsi, quand il trouva le sommeil, il n’eut droit qu’à quelques maigres heures de répit avant de repartir au boulot. Il avait épluché bien des documents, allant des ouvrages de droit aux missives de plaignants. Son travail dépassait peut-être sa fonction, mais Davos était un homme aussi sérieux qu’il était droit. Et surtout, il se voulait acteur de la paix.

Se sentant fin prêt après une préparation minutieuse, il relut une dernière fois les notes qu’il avait prises avant de faire quérir la dame de La Treille par un garde. En parallèle, il demanda à ce qu’on apporte du vin, bien évidemment issu des fameuses vignes du Bief, ainsi que des biscuits secs qui rendraient la rencontre la plus confortable possible.

Lorsque le plateau de biscuits fut déposé sur le côté du bureau bien rangé, qu’on déposa le cruchon de vin et deux godets, Davos s’assit derrière le scriban et croisa les mains, prenant bien près de lui le pli sur lequel étaient inscrites ses notes, il apposa à ses lèvres un sourire de courtoisie. Et très bientôt, son invitée se présenta à la porte qu’il avait laissée ouverte. Il se leva pour incliner poliment le buste.

— Ma dame, prenez place, je vous en prie. Du vin ?

Davos servit un peu de vin à la dame de La Treille, et s’en servit tout autant, soit un demi verre seulement. Puis il tendit l’une des coupes à Desmera avant de se rasseoir au bureau, adressant un sourire conciliant à son invitée. Elle paraissait nerveuse, au vu de la situation, de sa situation notamment, ce n’était pas bien étonnant.

— Ne vous inquiétez pas. Vous n’êtes pas la première à vous en plaindre, si ça peut vous rassurer. Depuis des mois, je croule sous les missives demandant réparation ou aide de la Couronne pour les attaques Fer-Nées. Mais sachez que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour alléger vos pertes.

Un hochement de tête, et le Maître des Navires jeta un coup d’œil à ses notes.

— Tout d’abord, je tiens à vous informer que la Couronne prend ce sujet très au sérieux, et qu’il a été au cœur de nombreuses discussions au sein du Conseil Restreint. Par ailleurs, une missive signée de la Main du Roi elle-même a été envoyée à la dame de Pyke, lui intimant de mettre fin à ces agissements. Il semblerait qu’il ait s’agit d’une malheureuse erreur de la part des Fer-Nés.

Il ne rentra pas plus dans les détails, plongeant un regard attentif dans celui de Desmera, il l’interrogea donc.

— Éclairez un peu ma lanterne. Puis-je connaître le détail de vos pertes, avant que nous ne parlions de la défense des côtes bieffoises ?

— Une erreur, répéta-t-il simplement avec un fin sourire de complaisance.

Il ne comptait pas communiquer à la dame de La Treille ce qui se disait au sein du Conseil Restreint, et encore moins le contenu de la missive reçue de la suzeraine des Îles de Fer. Ce qui se passait derrière les portes closes de la chambre du Conseil, y demeurait. Dame Desmera pouvait être aussi agacée qu’elle le souhaitait, son ton la trahissant, Davos ne dérogerait pas à cette règle.

Le Maître des Navires hocha la tête en prenant note de ce que lui disait la bieffoise. Tirant un morceau de parchemin, il y nota les informations essentielles, maniant la plume avec lenteur, encore peu à l’aise avec l’usage de l’écriture. Il fronça légèrement les sourcils en observant sa piètre calligraphie, puis releva un regard calme sur la dame.

— Il est légitime que vous rebâtissiez une flotte de guerre, après ce que vous avez traversé. Arrêtez-moi si je me trompe, mais vous avez levé votre ban, également ?

La plume juste au-dessus du parchemin, il attendait sa réponse pour noter, son regard benoît rivé sur celui de la dame.

Elle n’avait pas levé son ban, très bien, Davos prit note. Puis il attendit de longues secondes, après que la dame ait terminé de parler, qu’elle continue. Il leva les yeux vers elle.

— J’imagine, éluda-t-il. Et donc, qu’attendez-vous de moi ? Il y a deux mois, nous avons eu la confirmation de Pyke que les raids cesseraient et depuis, nous n’avons plus subi d’attaques.

Davos croisa ses mains devant lui et hocha lentement la tête tandis que la dame de La Treille s’exprimait. Il pouvait aisément comprendre ses inquiétudes, mais la Couronne était penchée sur l’affaire et dardait un regard scrutateur et sévère sur les agissements des Fer-Nés. Elle ne tolérerait plus le moindre faux-pas.

— Si les attaques venaient à reprendre malgré l’avertissement de la Couronne, vous seriez bien évidemment en droit de vous défendre. Vous avez juré de défendre vos terres au nom du roi, si vous subissiez de nouveaux raids, je ne puis que vous inviter à lever votre ban immédiatement et d’avertir la Couronne. Nous ne laisserons rien passer de plus.

Il se renfrogna un peu à cette pensée. La guerre était tout sauf souhaitable pour le royaume, mais après l’ultime avertissement signé de la main de Tyrion, la moindre erreur des Fer-Nés serait sévèrement jugée. Et conduirait, inévitablement, à un châtiment pur et simple pour les Îles de Fer : les priver de leur suzeraine.