Il y a bien des façons de prendre soin d’un homme | Treyvir Cendregué

Évidemment avant de se retirer au Septuaire de Hautjardin pour 7 jours, Aelinor avait organisé les soins de Lord Cendregué. Elle avait fourni de quoi faire plusieurs tisanes par jour ainsi que l‘onguent à Gladys et lui avait donné ses instructions. Si la plaie à la pommette se mettait à suinter ou à sentir mauvais, elle devait immédiatement en aviser le Mestre. Si non, la demoiselle d’atours de Lady Aelinor passerai deux fois par jours dans les appartements du jeune seigneur pour lui faire une tisane et lui appliquer l’onguent sur les hématomes et pas sur les plaies.

__ Dois-je lui faire des avances Ma Dame ?
__ Non Gladys, ça ne sera pas nécessaire…
__ Et s’il m’en fait ?
__ Je ne sais pas, fais comme tu veux.
__ Il est beau.
__ Certes.
__ C’est un grand seigneur.
__ Je sais, mais n’as tu pas couché avec un Prince ?
__ Si, mais cette fois, je crois qu’il serait plus approprié pour vous que pour moi.
__ Peut-être oui. Je ne sais pas encore.
__ Ce serait une bonne manière de remplir votre mission.
__ Tu as raison, mais je ne suis pas certaine que c’est ce que père entendait par rétablir la paix entre nos Maisons.
__ Mais moi je ne sais pas si je pourrais résister.
__ Et alors ?
__ Et alors vous n’épouseriez pas un homme à qui je me suis donnée, si ?
__ Pourquoi ça ? De toute façon, l'homme que j’épouserais aura eu d’autres femmes, toi ou une autre, qu’est-ce que ça change ?
__ Vous pourriez être jalouse.

Aelinor éclata de rire et dit à Lady Gladys Mullendor de faire comme elle voulait sur ce point mais de bien s’occuper des blessures du jeune homme. Puis elle la laissa aller s’occuper des prisonniers. La Dame de compagnie se rendit donc au chevet de Lord Cendregué pour les soins du matin. Elle frappa à la porte.

__ Bonjour Ser, Lady Aelinor m‘envoie soigner les blessures de  Lord Cendregué. Voulez-vous bien lui demander si je peux entrer s’il vous plaît ?
__ Lord Cendregué, une visite pour vous ! Vous êtes ?
__ Lady Gladys Mullendor, la suivante de Dame Hightower.
__ Lady Gladys Mullendor, la suivante de Dame Hightower. Elle dit que la Dame l’envoie vous soigner…

La jeune femme portait une robe de taffetas bronze avec des galons de dentelle dorée. Le corset qu’elle portrait serré dessous soulignait sa taille et remontait sa poitrine. Ses cheveux réunis derrière sa tête et tombant en une cascade de boucles brunes sur son épaule révélaient un visage fin et un sourire enjoué. Quand la porte fut ouverte et qu’elle put entrer, elle s'inclina en une gracieuse et profonde révérence.

__ Bonjour Sire, je suis Lady Gladys Mullendor, la suivante de Dame Hightower. Elle sera en prière les Sept prochains jours, c’est pourquoi elle m’a confiée la mission de poursuivre les soins de vos blessures. Si vous le permettez, bien sûr.

Gladys savait, contrairement à Aelinor la vierge effarouchée, qu’il y avait bien des façons de prendre soin d’une homme.

Oh, Aelinor savait ce qu’était l’amour, elle l’avait même déjà éprouvé. Résultat ? L’homme en question était parti presque sans un mot pour ne plus jamais lui adresser la parole après lui avoir volé son premier baiser. Or, ce baiser, elle le destinait uniquement à son futur époux comme preuve de son dévouement et de sa loyauté ainsi que de son affection, par se baiser elle s’était liée à lui espérait-elle pour toujours. Et il l’avait abandonnée. Et il lui avait brisé le cœur. Cette trahison, elle n’était pas prête de l’oublier, alors ce n’étaient pas les sentiments qui l'effrayait, c’était ce qu’ils avaient tendance à la pousser à faire de mal, très mal. Un instant ce jour-là, elle avait oublié ses ambitions, un instant elle avait simplement voulu épouser un homme dont elle était amoureuse, faisant fi de la politique. Résultat elle avait perdu un ami et son honneur pour toujours. Rien ne pourrait effacer le fait qu’un homme qu’elle n’allait pas épouser avait posé ses lèvres sur les siennes. Et ça, elle n'arrivait pas à se le pardonner. Et elle n'était pas prête de refaire la même erreur. Aussi préférait-elle retourner à ce qu’elle savait faire le mieux, de la politique.

Les Sept aimaient, mais ils aimaient d’un amour pur et chaste, l’amour véritable aurait pu dire la brune aux yeux azur. La luxure, les baisers et tout ce qui s'ensuivait n’avait pas lieu d'être pour les divinités. Leurs baisers étaient des promesses que nul n’avaient bafouées, le baiser de la mère, la promesse de prendre soin des petits enfants, celui de la jouvencelle, une promesse d'éternité. L’amour était ici inconditionnel comme celui d’une mère pour ses enfants. Cela n’avait rien à voir avec ce qu’avait ressenti Aelinor, cette chaleur dans sa poitrine, se frisson le long de son échine, se soupire dans sa gorge. Non. Cela n’était ni pur, ni inconditionnel et moins encore chaste. Puissent les Sept la préserver de la tentation et la maintenir dans le droit chemin. Ainsi préférait-elle se prendre dans la prière que de se perdre dans les yeux du Cendregué.

Pour autant, elle n’oubliait pas sa promesse. Elle avait dit à Treyvir qu'elle s’occuperait de ses blessures, aussi, si elle ne pouvait plus le faire personnellement par peur de déraper avec lui comme elle avait déjà dérapé avec Jonas, elle enverrait sa plus fidèle suivante qui pouvait, elle déraper autant qu’elle le souhaitait car elle n’avait plus ni premier baiser, ni vertu à préserver depuis longtemps. Le jeune homme pouvait bien être blessé, elle l’était au fond plus encore car sa conscience luttait contre son cœur et c’était là une bataille fort sanglante qui se jouait dans son esprit pétri de religion. Elle, que d’aucun trouvaient déjà frigide avant cet incident, se murait dans cette froideur parce que son rang, sa devise, ses ambitions, sa raison, sa destiné, tout, lui interdisait de céder à la tentation. Mais si la Hightower était faite d’une glace insondable qui semblait résister à tout, ce n'était pas le cas de la Mullendor.

Cette dernière sourit, visiblement sans relever l’accueil un peu froid que lui réserva le jeune homme.

__ Je ne juge rien ni personne Sire, j'obéis seulement à Ma Dame.

Répondit Lady Gladys tandis que le jeune homme s’installait sur le canapé dévoilant sa musculature en plus des dites blessures. La jeune femme ne put réprimer un regard appuyé sur le corps du guerrier. Elle s’installa et ouvrit le pot d’onguent confié par Aelinor pour en étaler sur ses blessures avec une grande délicatesse. Cependant ces gestes étaient moins précis et assurés que ceux de la Hightower et pour cause, elle ne savait absolument pas ce qu’elle faisait et à quoi cela pouvait bien servir. En revanche, sa bouche entrouverte et ses regards au Seigneur en disait long sur son attirance pour la plastique du Cendregué. D’ailleurs elle étala un peu plus d'onguent que nécessaire juste pour toucher ce corps d’athlète un peu plus longtemps avant de passer au visage.

__ Ça doit faire mal. Vous vous êtes fait ça à l'entraînement m’a-t-elle dit ? Vous vous battez comme un beau diable Sire. Je ne connais pas beaucoup d’hommes de votre rang qui s'entraînent aussi dur. La plupart, d’ailleurs n’échangent que quelques passes de temps en temps. Vous devez être un incroyable combattant, dommage que je n’ai pas eu l’occasion de vous voir hier.

Les blessures n’étaient ni graves, mais elles étaient impressionnantes pour certaines, pour une demoiselle qui n’y connaissait rien en tout cas.

La Mullendor était à Port-Real lors du duel qui avait opposé La Montagne au Prince Oberyn, en face de la tribune d’honneur où se tenait Margaery et Aelinor, en tant que suivante de la suivante de la Reine tout juste veuve de Joffrey. Elle avait tout vu et le combat avait été remarquable, car si la Montagne était une masse de puissance brute, la grâce et le talent du dornien à la lance n’était pas en reste et avait relevé le niveau de beauté du duel. Mais ce qui restait de toute cette beauté, c'était la tête écrabouillée du Prince vengeur et Gregor Clegan agonisant sur le sol souillé de sang. Le choc était immense dans l’assemblée réunie pour l’occasion, la stupeur, le silence, les cris d’Ellaria qui venait de voir mourir l’amour de sa vie. La Hightower appréciait le Prince même si elle disait de lui qu’il était olé olé, ce qui faisait beaucoup rire Gladys, sa perte lui avait causé un grand chagrin et elle affirmait sans appel que son adversaire était condamnée lui aussi. Ainsi voir la Montagne se relever de ses blessures après plusieurs semaines de convalescence l’avait profondément choquée et plongée dans une grande réflexion.

__ Je ne préfère pas savoir ce qu’il advient des flagorneurs sur un champ de bataille, mais c’est tout à votre honneur de n’être pas parmi ceux-là et j'espère que le Guerrier saura le reconnaître. Je prierais pour cela Sire, si vous me le permettez.

Sourit-elle en étalant l’onguent sur le visage du jeune homme.

__ Mais… vous n’allez pas mourir ? Vous n’allez tout de même pas risquer votre vie ?

Fit Gladys, quelque peu choquée par les propos du Cendregué.

__ Plaisant je ne sais pas, peut-être aurais-je peur pour vous. Mais alors laissez- moi au moins vous encourager.

Ajouta la brune en papillonnant des yeux. Elle se demandait si son charme opérait car Treyvir n’avait eu aucune réaction et il ne la regardait pas vraiment d’ailleurs. Elle avait beau tout faire pour se faire remarquer, il semblait ne pas la voir. Elle était bien placée pour connaître la capacité d’Aelinor à ensorceler les hommes et elle se demandait s’il avait été, lui aussi, envoûté.

Quelque chose clochait oui. Car malgré le fait qu'Aelinor ne lui avait pas demandé de séduire le Cendregué, elle ne le lui avait pas non plus interdit. Ainsi Gladys était libre de faire comme elle l’entendait et elle n’avait pas l’intention de laisser un beau parti lui filer entre les doigts. Elle avait toujours obéi à la Hightower, elle avait toujours fait ce qu’elle lui demandait, couché avec qui elle voulait, mais aussi avec ceux qu’elle-même désirait. Elle ne pouvait pas vraiment s’en empêcher de toute façon. Et Treyvir était tout à fait à son goût, nonobstant le fait qu'il était également seigneur de Cendregué.

La Mullendor était bien placée pour savoir que malgré sa beauté, sa maîtresse était profondément coincée, et elle la soupçonnait même d’être frigide. Or ses grands airs hautains et son aversion pour les contacts humains, particulièrement quand elle n’avait pas le contrôle absolu de la situation pouvaient en rebuter plus d’un. Ainsi, dans l’esprit de Gladys était née une sorte de compétition avec Aelinor et elle s’amusait à séduire les hommes que la Hightower capturait dans ses filets à son propre compte et avec ses propres atouts. Elle avait beaucoup de talent pour prendre soin des hommes de la manière qui leur plaisait, elle savait assouvir leurs désirs et réaliser leurs fantasmes. Et ça, elle savait que c’était un talent dont était totalement dénuée la brune aux yeux céruléens qui savait seulement faire valoir son physique avantageux et son intellect entraîné. Cette dernière se gardait bien de la traîter de pécheresse parce qu'elle voulait pouvoir continuer à utiliser les talents de sa suivante, mais au fond Gladys n’était pas dupe.

Mais voilà, Treyvir semblait insensible à ses charmes comme à ses soins. Il se replongea, dans la lecture du livre saint. Pour autant la Mullendor continua de lui dédier toute son attention et sa douceur jusqu'à ce qu’elle ait terminé les soins. En tout cas jusqu'à ce qu’il ne réponde, émettant avec une certaine courtoisie, mais cependant sans appel, sans espoir d’une autre chance, une fin de non recevoir à ses avances. Alors, elle se pencha légèrement vers lui, faisant mine de vouloir essuyer un surplus d'onguent sur sa joue et suspendit son geste. Elle plongea dans les yeux azur du jeune homme, un regard surpris entrouvrant ses lèvres avec un air effrayé :

__ Mais Sire, si je ne m’occupe pas de vous en l’absence de Lady Aelinor, elle me tiendra rigueur de ne pas lui avoir obéi. Et si vos plaies cicatrisent mal, j’en serais responsable. Est-ce vous ou le guerrier qui me protégerez de son courroux ?

Car oui, elle connaissait bien l'Étoile à Sept Branches, mais cela faisait un certain temps qu'elle ne participait plus au jour de la jouvencelle. Séduite par un jeune et beau chevalier au service de son père alors qu'elle sortait à peine de l’enfance et qu’elle était encore assez naïve pour croire à l’amour. Déçue, déçue et enceinte, elle avait eu la chance de pouvoir mettre sa petite vertue au service d’Aelinor plutôt que d'assumer le déshonneur de mettre au monde un bâtard. C'était un destin plus enviable que d’être jetée dehors ou envoyée chez les septa.

Aelinor était au septuaire pour un moment et tant qu’elle était là-bas elle ne saurait rien de ce qu’il se passerait entre Treyvir et Gladys. Ainsi, cette dernière pensait avoir encore quelques séances de soin devant elle pour séduire le Cendregué et se donner à lui. Ensuite, peut-être que ce serait plus compliqué de le voir sans que la brune en soit informée, mais si elle devait apprendre quelque chose, ça ne serait pas de la bouche de la Mullendor, en tout cas pas dans l'immédiat. Si la suivante devait dire que le jeune homme avait succombé à ses charmes, se serait une fois que la Hightower serait elle-même séduite, pour la rendre jalouse. A moins que. L'était-elle déjà ? C'était-il déjà passé quelque chose entre eux qui l’aurait conduite à se retirer pour 7 jours de prières ? Oh comme ce serait amusant qu’elle lui vole son homme après avoir sucé tous les hommes qu’Aelinor avait séduits à des fins politiques ou informationnelles et qui pour craquer avaient eut besoin d’un petit coup de pouce de la belle, pulpeuse, sensuelle et très talentueuse Gladys.

Elle hésita un moment, se demandait si tout était véritablement perdu, elle ne pouvait y croire, rare étaient les hommes à résister à ses avances. Est-ce que Trevit avait fermé le livre et le sujet pour de bon ou si elle pouvait encore tenter quelque chose ? Il se leva et elle profita qu’il lui tourne le dos pour baisser son décolleté afin de faire ressortir un peu plus sa poitrine. Elle allait le supplier en s’agenouillant devant lui et il lui suffirait que quelques secondes pour ouvrir son pantalon et prendre sa queue en bouche. Une fois cela fait, nul doute qu’il se laisserait enfin aller. Mais ce qu’il dit alors la vexa. Il la remit à sa place, sans méchanceté mais avec fermeté et lui ordonna clairement de sortir. La Mullendor avait peu d’amour propre, mais tout de même, là, c’était un peu fort et elle ne voulait pas s’abaisser à le sucer après qu’il lui ait clairement signifié qu’elle n’était qu’une petite suivante de rien du tout et qu’Aelinor, la grand Aelinor, cette foutue Aelinor, était sa seule interlocutrice.

La brune aux yeux noisette se leva alors et posa un regard assassin sur le jeune Seigneur.

__ Je la connais assez pour savoir qu’elle ne vous saura jamais vous donner autant de plaisir que je pourrais le faire. Mais si vous préférez un glaçon qui se sert de vous plutôt qu’une femme qui vous désire, alors soit. Je connais la sortie. Au revoir Sire. Et ne venez pas vous plaindre quand vous vous rendrez compte qu’elle est frigide.

Puis elle prit la porte dans un grand bruit de taffetas.