[LA TREILLE] Un soutien indéfectible ( pv Desmera )

Le babillement des oiseaux l'avait sortie de son sommeil. Au petit matin à l'aube il s'était attelé se passer un coup d'eau au visage et à rejoindre la salle des gardes pour y écouter et rire aux côtés des hommes servant la Treille. On y apprenait le quotidien simple des hommes de la garde mais aussi leurs tracas quotidiens. La menace persistante des fer-nés était encore bien ancrée en eux. La peur de devoir leur faire face et de faillir à leur mission principale. Il y avait ce risque, il fallait le prendre sans quoi c'est la maison Redwyne qui disparaitrait. Guilhem dissipait les doutes et les incertitudes du cœur de ces hommes. Les rires et les sourires s'affichaient bien plus sereinement en bonne compagnie. Ils avaient confiance en lui tout autant qu'il avait confiance en eux car il savaient tous d'où il venait.

Après ce petit déjeuner partagé en leur compagnie il se mit à grimper les marches, une à une dans le silence religieux et matinal qu'il côtoyait depuis si longtemps. C'était un matin comme les autres qu'il appréciait particulièrement pour la tranquillité d'esprit que cela prodiguait chez lui. Une tranquillité qu'il aurait souhaité partagé avec Desmera Redwyne. Les gardes lui indiquèrent que la dame de la Treille n'était pas dans sa chambre. Perplexe Guilhem savait sans doute ou elle avait encore une fois passé le reste de sa nuit. De l'inquiétude creusait la ride du lion qu'il portait sur son faciès. Il tapota du coin de sa phalange droite la porte pour y entendre une réponse. Réponse qui ne vint pas hélas. Il se risqua après plusieurs minutes à entrer avant d'apercevoir au coin du jour et de cette fenêtre observant le lever du jour sa silhouette complètement effondrée sur le parchemin et l'encrier la plume encore au creux de sa main.

« Madame ? Madame il faut vous réveiller... »

Sa main s'apposa sur l'épaule de la jeune dame de la Treille alors qu'elle c'était assoupie sur son pupitre pour rendre compte tardivement chaque nuit de l'organisation et de la gestion de ce domaine qui fut si longtemps sous la coupe de son père avant elle.

An 305, lune 10, semaine 1, La Treille, Port Ryam

Un procès… à peine arrivée à La Treille je devais repartir… Si bien que je n’avais pas le temps de dormir. Il fallait absolument que je règle tous les problèmes et que je prenne de l’avance pour que je puisse partir à ce procès… J’avais pris mon repas du soir dans mon bureau, m’en excusant au près de Telanie, de Humfrey et ma tante, mais j’avais du travail. Le mestre et mon intendant avaient passé une partie de la soirée avec moi pour m’expliquer et me montrer tout cela. Je les avais remerciés avant de me plonger dans le travail. Ce n’était pas une partie de plaisir… mais il fallait que je le fasse. Une servante était passée prendre mon plateau et me déposer une tisane du mestre que je buvais en continuant de travailler. Je rallumais une nouvelle chandelle en faisant tourner ma plume entre mes doigts.

Je ne me sentis pas m’endormir tout doucement sur mon pupitre, ma plume toujours en main. Mon esprit dériva lentement dans des souvenirs, des hallucinations oniriques des plus classiques. Je dormais, avachie sur mon pupitre de travail, je dormais… ni bien, ni mal… mais je dormais, un peu, pour une fois. Je crois que je m’endormis peut-être une grosse heure avant l’aube… Je n’entendis pas les coups frappés par mon garde du corps… Je sentis une main secouer mon épaule ainsi qu’une voix lointaine…

Je cillais un peu… la nuque raide avant de me redresser lentement pour regarder Dandelion les sourcils froncés…

« Dandelion ? Je… Oh non… je me suis endormie… »

Je baissai les yeux sur le parchemin devant moi. J’avais la nuque raide…

« Quelle heure est-il Dandelion ? »

Merde… j’avais du travail à faire… Je ne pouvais pas dormir… Je reposai ma plume avant de me frotter un peu le visage.

« J’ai encore inquiété tout le monde… c’est cela ? »

Pourquoi est-ce que je faisais toujours tout de travers…

La panique lisible dans son regard se perdait dans le sien sans qu'il ne puisse dire ou faire quoi que se soit. Desmera était ainsi faite, toujours à s'enquérir des prérogatives, toujours le devoir, le sens du travail bien fait et accompli. Au prix de nuits de sommeil de plus en plus tardives essayant d'échapper à l'étreinte de Morphée pour ne pas faire d'horribles cauchemars. Son quotidien était devenu lentement un guêpier dont elle n'arrivait pas à se tirer. Dandelion lui même n'avait pas forcément les mots justes ni même les solutions pour l'aider à recouvrer la force de prendre parfois le temps. Car là était la réelle difficulté de la toute jeune dame de la Treille. Prendre le temps. Elle courait après lui comme si sa vie en dépendait. Les multiples tractations, les échanges et le défilé des hommes conseillant la seigneur de ce domaine ponctuait, prenait, accaparait tout son temps.

« Presque dix heures madame. »

Inquiéter ? Si seulement se n'était que ça. Elle passait ses journées à lire de parchemins et des rouleaux de comptabilités. De quoi rendre n'importe quel homme ou femme complètement fou ou déconnecté de la réalité.

« Nous avons commencer à préparer les chevaux pour le voyage vers Port-réal madame souhaitez vous que nous mettons en ordre vos affaires ? »

Je me frottais le visage en essayant de chasser les quelques fragments de sommeil qui s’attachaient encore à mon visage et tout mon corps. J’aurais pu dormir des années… Mais je ne pouvais pas… Je partais aujourd’hui et devais m’assurer que tout était en ordre pour mon départ. Je ne pouvais pas laisser des choses inachevées derrière moi… Presque dix heures ?! Oh par les sept ! Je baissai les yeux sur le papier que j’étais en train de lire… Est-ce… Bon… je crois que ce n’était pas si important que cela… Enfin, cela l’était ! Mais, le mestre devrait pouvoir s’en charger…

« Dix heures… Par les Sept… J’ai trop dormi. »

Les chevaux pour le voyage vers Port Réal… C’était hors de question que je parte sans certains de mes chevaux. Pour l’occasion, j’avais même pris l’étalon de feu mon père que je ne craignais nullement de monter. Asfaloth, ma jument à la robe pie palomino restait ici pour l’occasion. Elle n’aimait pas beaucoup le bateau, certes, mais je l’avais déjà amené pour le tournoi, alors pour une fois, je prenais l’étalon. J’inclinai légèrement la tête… De l’ordre ?

« Sarah est censée s’occuper de mes affaires, robes et bijoux… Ainsi que celles de Telanie. Enfin… il me semble lui avoir donné l’ordre. Je lui en ai bien donné l’ordre ? »

Je l’interrogeai du regard. Parfois, j’avais l’impression de donner des ordres, mais c’était uniquement dans ma tête… je les pensais parfois trop alors… cela était parfois fort agaçant. Je poussai un soupir avant de repousser en arrière ma chaise pour me lever. Je n’avais pas de miroir ici, je n’avais pas voulu en faire installer… heureusement. Je devais avoir une tête horrible…

« Par les Sept… J’aurais préféré que nous restions ici… »

Putain de procès et j’étais bien obligée d’y aller. C’était le procès de Bronn… et je devais toujours jouer ce jeu d’équilibriste… J’avais un point de douleur dans ma nuque… Rien de bien surprenant.

« Ah… Dandelion… Dès que toute cette histoire est finie… nous rentrons à La Treille et nous ne sortons plus pendant quelques lunes… »

J’ouvris la fenêtre pour respirer un grand coup.

« J’ai… J’aimerais faire venir de nouveaux cépages d’Essos Dandelion. J’aimerais créer de nouveaux vins en gardant nos vins de La Treille. La cuvée de cette année sera délicieuse, les conditions ont été très bonnes… Et je crois que j’ai le nom de cette cuvée en tête. »

Je reviens vers lui.

« J’ai une mine affreuse, n’est-ce pas ? »

Et mon regard tomba également sur mon bureau légèrement en désordre. C’était hors de question que je parte en laissant ma tanière dans un tel état ! Je reviens vers le meuble pour commencer à le ranger. Je notais, enfin, que j’étais particulièrement agitée…

Guilhem soupire ne sachant pas si il devait lui faire comprendre ce qu'elle devait faire ou si elle avait simplement besoin d'être soutenue. Il la soutiendrait quoiqu'il arrive car à ce sujet il n'y avait rien de plus à dire il était loyal à la Treille et à Desmera.

« Affreuse est le mot. »

Il lui sourit sur les mots qu'il employait pour lui faire comprendre qu'il n'y avait rien de dramatique mais, qu'elle avait encore effectivement passé sa nuit à travailler d'arrache pied.

« Vous devez prendre soin de vous. »

Il n'était pas certain que Sarah avait fait le nécessaire mais, il n'allait pas l'inquiéter d'avantage à ce sujet il passa une main réconfortante sur son épaule.

« J'irais voir ou en est Sarah mais d'abord vous devez vous préparer. »

Il se redresse et écoute attentivement Desmera la capitale était un endroit dangereux mais, il était là pour assurer sa sécurité, la protéger quand bien même elle n'était pas menacée par une quelconque personne là bas.

« Un peu d'air frais ne fait pas de mal madame. »

Elle était déjà suffisamment enfermée entre quatre murs dans cette pièce. Il se demandait si elle ne devrait pas chevaucher de temps en temps en sa compagnie pour s'évader et oublier cette obsession pour la plume et de l'encre.

« La Treille est un domaine connu par le monde. Essos ne déroge pas à la règle nous trouverons des voies maritimes pour répondre à vos attentes. »

Si il avait bonne mémoire la voie commerciale privilégiée actuelle était celle des îles d'été mais ouvrir de nouvelles routes pour le commerce et faire fleurir la Treille n'était pas négociable. L'enjeu pour Desmera était juste et si sa lui permettait d'ouvrir un nouveau chapitre pour le fief et elle même il n'y voyait rien de dérangeant au contraire.

J’eus un sourire amusé à sa remarque. Je savais très bien qu’il me taquinait un peu sur mon visage. Mais en même temps il n’avait pas tort. Je ne me reposais pas assez et j’avais beaucoup trop de cerne pour une noble. Il faudrait sans doute que je dorme un peu plus… Mais j’avais peur de mes rêves et de me réveiller toujours couverte de sueur… Et il y avait tant de travail à faire… que je ne pouvais pas laisser en plan… Enfin ce n’était pourtant rien de grave, mais je ne parvenais pas à lâcher prise malgré tout. Je partais à nouveau pour si longtemps… Il fallait que j’apprenne aussi à lâcher prise et être plus calme. Prendre soin de moi… J’inclinai la tête avec un petit sourire.

« Sans nul doute Dandelion. Sans nul doute. Mais je crois que je ne suis pas très douée pour cela… »

J’eus un sourire triste un peu. Est-ce que Sarah avait bien préparé mes affaires ? Il me semblait bien ! Bon, tant mieux J’avais l’impression d’avoir moins de ça à penser après tout. Je me massais les temps. Me préparer. C’était sûr que je ne pouvais pas porter la même robe que la veille, mais surtout je devais au moins me rafraîchir un peu le visage.

« Fait porter une petite cuvette d’eau s’il te plaît. Je me changerais avec Sarah avant de partir. »

Mais je voulais au moins me débarrasser de l’encre sur mes doigts et peut-être celle que j’avais sur mon visage. J’observais l’extérieur pendant quelques secondes avant que Dandelion ne reprenne la parole. J’inclinai légèrement la tête à sa remarque.

« Oui. Cela me manque de chevaucher. Une fois rentrée, je ferais le tour de l’île à cheval ! Je pourrais ainsi la faire visiter à Ser Humfrey et voir mes gens, m’assurer que tout va bien. Je pense que cela serait bien. Cela sera très bien je pense. Je pourrais comme ça voire s’il y a des problèmes qui ne me sont pas remontés. »

J’évoquais une possibilité de faire venir des cépages d’Essos. Je reviens vers Dandelion en me massant la nuque. Je ne tenais pas en place… Vraiment pas. Je n’avais pas assez dormi, et j’avais faim. Il fallait que je me calme un peu. J’inclinai la tête.

« Tout à fait. Je pense qu’il faudra que nous contactions Lys et Volantis… Volantis pour ses crus verts et Lys pour ses crus rouges… Mais les îles d’été cela serait également très intéressant avec leur cru ambré… »

J’attrapais une plume pour noter l’idée sur un parchemin et demander au mestre et à mon intendant Conrad pour qu’ils regardent pendant que je ne serais pas là

Guilhem écoute Desmera reprendre un peu de contenance et se préparer en même temps elle indique ses prérogatives et le chevalier ne manque pas de prendre en compte aucune de ses remarques, propositions, idées et projets pour la suite. Oui désormais elle était la Dame de la Treille et il fallait pour ça du courage et de l'abnégation

« Qui le serait ? Je suis mal placé pour vous dire quoi faire madame. »

Oui Guilhem faisait passé ses intérêts bien après ceux de Desmera et c'était là son devoir le plus strict. Il avait une vision de l'honneur et du devoir qui lui incombait de tenir pour la Treille qui l'avait élevé et fait devenir ce qu'il était aujourd'hui.

« Nous engagerons des navires de la Treille à votre retour pour Lys et Volantis. »

Ces voyages quand il était jeune avec sa famille le rendait parfois nostalgique du temps qui passe. Quand le cœur de l'océan et des vagues jaillissant à travers l'infini se retrouvant plaqué contre la coque du navire qui filait à toute allure.

« Je vous attendrais dans la cour. »

Guilhem se redresse et ferme la porte derrière lui. Sa monture et les hommes étaient prêt après un certain temps à attendre Desmera elle finit par pointer le bout de son nez. Il l'aida à s'installer dans la calèche puis s'en retourna sur son cheval.

« Nous sommes prêts. »

Qui serait assez doué pour m’aider à prendre soin de moi ? Le visage de Humfrey se dessina rapidement devant mes yeux et je fis tourner ma bague autour du doigt pendant quelques secondes avant de sourire à Dandelion.

« Tu prends bien souvent soin de moi Dandelion. Ne t’en fais pas. »

J’avais décidé de partir en carrosse pour une fois, normalement je le faisais à cheval… mais qu’importe, ce n’était pas tout à fait le moment de réclamer un cheval. Je n’avais pas assez de temps de toute manière pour tout cela. Mais je m’occuperais du lien de La Treille avec Lys et Volantis en revenant. J’avais besoin de temps. J’inclinai la tête vers Dandelion.

« Merci. »

Je fis rapidement une toilette avant d’aller chercher Sarah pour me changer pour une robe plus légère plus adaptée pour le voyage. Toutes mes affaires étaient prêtes, il était l’heure de partir. Je sortis de mon bureau d’un pas rapide, Sarah m’informant que Telanie était prête, que tout était prêt. Parfait. J’avançai dans la cours, saluant toutes les personnes, dont Humfrey, gardant une certaine distance, avant de laisser Dandelion m’aider à grimper dans mon carrosse, Telanie était déjà là. Tant mieux.

« Je vous remercie Dandelion. Nous pouvons partir ! Allons-y ! »

J’avais quelque part hâte de traverser la ville et d’embarquer sur un navire… J’aimais voir mon peuple et tout cela ! J’ouvris les petits rideaux pour regarder la cité qui se déroulait sous mes yeux. Incroyable…

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