Cregan Grandison ❦ La nuit est sombre et pleine de terreurs

En tant que septième fils de sa fratrie, et même s’il n’en reste que trois avant lui, Cregan a toujours été destiné à une carrière militaire. De ce fait, il est un homme d’armes, un soldat, avant tout. Dressé à la stratégie et au maniement des armes, rien n’aurait pu prévoir qu’il embrasse un jour la voie de la religion.

Mais après avoir fait la guerre pendant des années, après avoir servi trois rois au total, Cregan a compris qu’il ne pouvait se contenter uniquement de son maigre héritage. Arriviste plus qu’il n’est ambitieux, il pourrait être qualifié de jeune loup. Prêt à tout, même aux pires bassesses, il se pense investi d’une mission divine depuis qu’il a adopté la foi du Maître de la Lumière. Fanatique plus qu’il n’est pieux, il a même tenté de devenir Prêtre rouge.

Dans un constant désir de faire ses preuves, rêvant de se distinguer de ses frères, il est un fonceur, peut-être même un peu trop, frisant l’inconscience. S’il tente d’agir en héros, d’autres diront de lui qu’il est un crétin. Loyal quand il le veut, il choisit ses causes avec prudence, mais agira toujours au nom de R’hllor. Ayant cru par deux fois avoir trouvé la réincarnation d’Azor Ahai en les personnes de Stannis et de Daenerys, il n’a connu que des déceptions et le cherche désespérément – ne trouvant pas l’élu de la Lumière, il se demande parfois s’il ne l’est pas lui-même. Ou tente-t-il de s’en convaincre dans son désespéré fanatisme ?

Homme emporté et volontiers colérique, il n’aime pas l’injustice et a des rêves de grandeur. Sanguin, il présente constamment des signes de nervosité et est homme impatient. D’une franchise abrupte, volontiers blessant dans la moquerie, il est assez arrogant et supérieur.

❦ Cregan n’est pas seulement pieux : il est totalement fanatique. Il croit fermement en R’hllor, à tel point qu’il a essayé de rentrer dans les ordres. Pendant la guerre, il a notamment laissé la prêtresse Mélisandre brûler sa demi-sœur après l’avoir dénoncée lui-même.

❦ Élevé en vue d’une carrière militaire, Cregan manie l’épée avec adresse. Il a à plusieurs reprises tenté d’enflammer sa lame, mais ses essais n’ont pas été bien fructueux…

❦ Cregan sait lire et écrire la Langue commune, s’agissant de sa langue maternelle. Il sait brièvement tenir une conversation en volantain et connaît juste quelques prières dont il ne comprend pas le sens en haut valyrien, apprises au Temple Rouge.

❦ Persuadé d’avoir des facultés naturelles liées au Maître de la Lumière, Cregan pense savoir lire dans les flammes…

❦ Suite à la Bataille de Winterfell, Cregan a de multiples cicatrices sur le corps.

❦ Cregan est surnommé "le Chiot" (ou plus méchamment le Roquet) par sa famille, pas pour un quelconque exploit mais seulement pour le différencier de ses frères aînés - leur père, âgé et à moitié dément, peinant à se rappeler leurs noms.

❦ Par dévotion envers R'hllor, Cregan porte souvent des vêtements de couleur rouge. Son armure est d'ailleurs de cette couleur, et le pommeau de son épée est serti d'un rubis en forme de flamme. Par ailleurs, il porte un bijou qu'il dit être sacré : une chevalière qui est assortie au pommeau de son épée. Son blason personnel est d'ailleurs un chien blanc dans le cœur enflammé de R'hllor.

Seigneur : Hugh Grandison (81 ans)

Son épouse, (✞) Rhonda Grandison (née Morrigen)
Enfants avec Rhonda : Harwyn (✞), Torrhen (✞), Ormund (✞), Arlan (36 ans), Ryam (35 ans), Imry (34 ans), Cregan (29 ans)

Le bâtard de Hugh : Steffon Storm (23 ans)
La bâtarde de Hugh : Mayra Storm (27 ans)

Sa seconde épouse, (✞) Meredith Grandison (née Estremont)
Enfants avec Meredith : Deux fils morts-nés, Amyra (✞), Rosamund (19 ans), Roanne (15 ans)

Les frères de Hugh : Steffon (✞), Edric (✞), Rogar (68 ans)
La sœur de Hugh : Barbra (✞)

Enfants de Edric Grandison : Orys (39), Vardis (✞)
Enfants de Rogar : Borros (26), Selwyn (23), Orton (✞), Barbra (17)

Ormund (✞) & son épouse Helia Connington (24 ans)
Leur fille, Ellyn Grandison (6 ans)

Arlan & son épouse Darla Mertyns (22 ans)
Leurs fils : Harwyn Grandison (3 ans), Stannis Grandison (1 an)

276, lune 5 : Naissance à Grandview, Cregan est le septième fils de Hugh Grandison. Mais Hugh ne se contente pas de ses fils, ayant perdu sa sœur jeune, il rêve d’avoir une fille.

278 : Rhonda, mère de Cregan, meurt d’une fausse-couche suite à l’insistance de son époux pour avoir absolument une fille.

279 : Naissance de Mayra, fille bâtarde de Hugh.

282 : Rébellion de Robert Baratheon. Hugh y perd deux frères : son cadet, Edric, et son aîné,  Steffon. Celui-ci mort sans enfants, Hugh devient le sire de Grandview.

284 : La guerre terminée, après avoir aidé Stannis Baratheon à la prise de Peyredragon, Hugh revient à Grandview, avec un bâtard qu’il a nommé en l’honneur de son frère, Steffon.
Hugh épouse Meredith Estremont en secondes noces. Les premières années de mariage, elle lui donne une fille, Amyra,  deux fils morts-nés, puis encore deux filles : Rosamund et Roanne.

288 : Destiné à une carrière militaire, Cregan devient l’écuyer de son frère Ormund.

289 : Âgé de seulement treize ans, Cregan ne prend pas part activement à la réponse du Trône de Fer contre la rébellion Greyjoy, mais il assiste Ormund en tant qu’écuyer sur le champ de bataille. Son frère Torrhen meurt dans les combats, ainsi que son cousin Vardis.

290 : Mayra s'installe à Grandview.

293 : À dix-sept ans, Cregan est armé chevalier.

298, lune 10 : À la mort de Robert Baratheon, les Grandison attendent de savoir qui de Stannis et Renly aura la plus grande armée.

298, lune 11 : Menés par Harwyn, Hugh étant trop âgé, les Grandison sont finalement présents au couronnement de Renly Baratheon, lors de son mariage avec Margaery Tyrell. À la mort de Renly, ils se joignent finalement à l’armée de Stannis.
Son frère Ormund épouse Helia Connington.
298, lune 12 : Cregan se convertit au culte de R’hllor, comme le reste de sa famille.

299, lune 1 : Lors de la bataille de La Néra, Cregan voit ses frères aînés, Harwyn et Ormund, mourir. Les Grandison restants se replient à Peyredragon avec Stannis. Les Grandison plongent dans le fanatisme.
299, lune 2 : Amyra, croyant fermement aux Sept, complote contre Mélisandre. Dénoncée par Cregan, elle fait partie de ceux sacrifiés par le feu. Les Grandison ne s’y opposent pas, trop enfoncés dans leur fanatisme.
Dans l’année, Meredith, seconde épouse de Hugh, meurt d’une fausse-couche - certains disent qu'elle est morte de chagrin après la mort de sa fille Amyra.

300 : Pendant que Stannis panse ses plaies, rassemble ce qu’il lui reste de forces, et notamment lorsqu’il se rend à Braavos réclamer un prêt à la Banque de Fer, les Grandison se tiennent parmi ses plus loyaux sujets, notamment Arlan et Ryam qui font partie de son conseil.

301, lune 7 : Les Grandison se trouvent au Nord, où ils combattent les sauvageons avec Stannis, puis ils marchent vers Winterfell.  
301, lune 10 : Quand le roi Stannis sacrifie sa propre fille Shireen, le doute s’empare des Grandison et ils désertent l’armée. Si Cregan voulait rester pour la bataille, ses frères l’ont contraint à les suivre. Ils apprendront bien des semaines plus tard, rentrés à Grandview, que Stannis a été défait par l’armée de Ramsay Bolton.
En parallèle, Cregan apprend le rétablissement de la Foi Militante. Les Grandison continuent à vénérer le Maître de la Lumière, et font des provisions chez eux au cas où la Couronne, désormais liée à la Foi, voudrait assiéger Grandview comme ils ont détruit la maison Caron auparavant – ce qui n’arrivera finalement pas.

302, lune 3 : Refusant de ployer le genou devant les Lannister, les Grandison se tournent vers Daenerys Targaryen dès qu’ils apprennent qu’elle s’est installée à Peyredragon. Ils se joignent à son armée. Cregan songe qu’elle est peut-être la réincarnation d’Azor Ahai et la suit aveuglément.
302, lune 5 : Cregan est présent lors de la destruction du Butin de Hautjardin.
302, lune 13 : Cregan est présent lors de la Bataille de Winterfell, dont il ressortira blessé mais vivant.

303, lune 2 : Les Grandison participent à la Destruction de Port-Réal, Orton, cousin de Cregan, meurt sous le feu du dragon bien qu’il soutienne Daenerys. Pour autant, Cregan reste aveuglé et l’acclame lors de son discours. Il est désorienté à sa mort.
303, lune 3 : Suite au Grand Concile, Cregan ploie le genou à contre-cœur face à Gendry Baratheon, mais ne rentre pas à Grandview : désireux de poursuivre sur la voie de la foi, il se rend à Volantis pour devenir prêtre rouge.
303, lune 4 : Arrivée de Cregan à Volantis, où il intègre le Temple du Maître de la Lumière à Volantis – en raison de son âge avancé, il sait qu’il n’accomplira jamais de miracles mais ne souhaite que servir son dieu.

304, lune 6 : Cregan est rappelé à Grandview au bout d’environ un an d’apprentissage à Essos. N’ayant pu devenir prêtre rouge faute de temps, il rentre et, sans avenir brillant, il décide de prendre les choses en main : sachant Ashara Dondarrion seule, et désormais à la tête de Havrenoir, il se met en tête de l’épouser.

305, lune 7 : Cregan est présent au tournoi du Donjon Rouge.
305, lune 11 : Cregan s’arrange pour faire partie de la délégation orageoise pour le procès de Bronn La Néra.

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Enroulé dans un linge, le nourrisson attendait d’être nommé. À plus de cinquante ans, Hugh avait déjà été honoré de six enfants. Six fils, quand il ne rêvait que d’une fille. Ce septième enfant que Rhonda avait mis au monde pourrait être le bon. Il pourrait être cet espoir qu’il avait tant attendu. Le mestre se retourna vers l’imposant fauteuil sur lequel Hugh s’était endormi, las d’attendre que son épouse expulse l’enfant. L’accouchement avait été laborieux, plus encore que les précédents. Le nouveau-né poussa un cri. Dans un sursaut, Hugh ouvrit enfin les yeux. Il les posa sur le bébé.

— C’est un mâle, lui apprit fièrement le vieux mestre Arrec.

Il n’en fallut pas plus à Hugh : il se leva, l’air furieux, frappant du plat de la main sur l’accoudoir de son siège. Alors qu’il commençait déjà à quitter la pièce, le mestre le héla.

— Il faut le nommer, monseigneur.
— Peu importe, donnez-lui un nom au hasard, je ne sais pas… Allez, Cregan. Ce sera très bien, Cregan. Cregan Grandison, fulmina Hugh avec théâtralité, la déception de son vieux père. Peut-être les Sept me feront-ils un jour l’honneur de m’offrir une fille !

Un éclair peiné passa dans les yeux d’Arrec.

— Il y a autre chose, monseigneur…
— Quoi donc ?
— L’accouchement a été pénible pour lady Rhonda. Je ne peux que vous suggérer de… d’arrêter, après celui-ci.

Hugh blêmit. Son frère aîné n’avait jamais souhaité se marier, dépourvu d’héritiers, c’était Hugh qui les lui fournissait. Mais lui se fichait bien de ses fils, au final. Depuis qu’il avait perdu sa chère sœur, un peu plus de quinze ans plus tôt, il n’aspirait qu’à une fille. Une petite fille pour le chérir, prendre soin de son vieux père. Ainsi, Rhonda ne lui offrirait jamais cette chance ? Il refusait d’y croire ou de s’y plier.

Ils réessaieraient. Il aurait une fille.

Ce fils, Cregan de son nom, ne serait qu’un soldat de plus. Il ne représenterait jamais rien aux yeux de son paternel.


L’île se rapprochait, et avec elle la peur enflait en le cœur de l’adolescent. Certains disaient qu’Ormund était inconscient de ramener un gamin au cœur des combats, d’autant que les Grandison n’étaient pas de grands navigateurs – à ceux-là, il répondait que Cregan était un bon gaillard et qu’il était non seulement son frère, mais aussi son écuyer. Un chevalier ne combattait pas sans son écuyer, et un écuyer n’apprenait pas sans son chevalier. Ils avaient vaincu la flotte de Fer au large de Belle-Île, quelques jours plus tôt, et s’apprêtaient à poser le pied sur Grand Wyk.

Une main se posa sur l’épaule de Cregan – il tremblait, était-ce de peur ou d’admiration ? Tournant la tête, il croisa le regard d’Ormund.

— Tu es prêt ?

Le cœur de Cregan accéléra alors que les navires de Stannis Baratheon, qui menaient la flotte royale, accostaient déjà. L’adolescent hocha la tête et aida Ormund à ajuster son armure. Puis lorsqu’ils furent tous deux prêts, leur navire accosta à son tour. Devant eux, menant les forces de la maison Grandison, leur frère Torrhen.

Cregan l’avait toujours admiré. De treize ans son aîné, il était le plus grand et le plus fort de leur fratrie. Les épaules carrées et puissantes, un cou de taureau, et un sourire qui faisait craquer les filles. Il aspirait à lui ressembler. Surpris par le cri général poussé par l’armée qui touchait terre, l’écuyer se jeta derrière son chevalier. Ormund se défendait bien, il avait lui aussi été taillé pour la guerre et lui aussi, Cregan l’admirait.

L’adolescent resta un peu en retrait durant toute la bataille, surtout présent pour observer, apprendre et assister son frère et maître. Protégé par les nombreux soldats accomplis qui se trouvaient devant lui, Cregan put observer Torrhen qui se défendait merveilleusement bien. Il était très certainement bien plus petit et bien moins puissant que celui-ci, mais dans les yeux du gamin de treize ans, il équivalait à La Montagne. Du moins jusqu’à ce coup, traître et fatal.

Une lame traversa la gorge de Torrhen. Son corps s’écroula. Ormund le vengea.


Un sourire semblait flotter sur le visage de Hugh, cette fois-ci. Était-il, enfin, fier de son fils ? Ou avait-il trouvé la paix, alors que sa seconde épouse lui avait donné trois filles ? Qui pouvait le savoir ? Devenu seigneur de sa maisonnée à la mort de son frère lors de la rébellion de Robert Baratheon, l’âge rattrapait déjà Hugh. Sa mémoire flanchait, et il attribuait à ses fils des surnoms. Un peu dément, il n’arrivait plus à se faire à l’idée que son blason représentait un lion. Ainsi, il surnommait ses fils « les chiens fous » tandis que les filles étaient ses « petites chéries ».

Cregan, plus jeune des fils, n’était que le Chiot.

Harwyn le Cerbère, Ormund le Mâtin, Arlan le Molosse, Ryam le Ratier, Imry le Cador. Et Cregan rien que le Chiot. Même Steffon, le bâtard élevé parmi les autres comme s’il avait été légitime, avait eu droit à son surnom : le Corniaud.

Toute la meute était réunie autour de Cregan, ce jour-ci. Car il avait fait quelque chose de bien : héroïquement, il avait sauvé la veuve et l’orphelin en tuant un homme qui avait attaqué un hameau sous la protection de Grandview. Et le moment était venu de le récompenser. Le plat de l’épée d’Ormund se posa sur l’une de ses épaules.

— Cregan Grandison, au nom du Guerrier, je te demande d’être brave. Au nom du Père, je te demande d’être juste. Au nom de la Mère, je te charge de défendre le faible et l’innocent. Au nom de la Jouvencelle, je te charge de protéger toute femme…

Cregan ferma les yeux, ému que ce jour enfin arrive. À seulement dix-sept ans, il avait enterré sa mère, deux oncles, un frère et un cousin. Il avait affronté toutes les épreuves qui s’étaient déjà présentées à lui avec bravoure. Et si leur feu de vie au fond de lui ne s’était pas encore pleinement allumé, son adoubement était la première étincelle.

— Relève-toi, ser Cregan.

— Le roi est mort.

Cregan leva brusquement la tête. Il entendait sans cesse ces mots depuis une heure, se dispersant à travers le camp de guerre comme une traînée de poudre, mais sortis de la bouche d’Harwyn, les mots n’étaient pas les mêmes. Ce qui n’était qu’une rumeur lui apparaissait alors comme une certitude. Les frères Grandison se regardèrent quelques instants, un long silence faisant suite à cette annonce. Ils avaient tardé à se placer du côté de Renly Baratheon dans cette guerre, parce que Hugh tenait à ce qu’ils prennent absolument le parti du gagnant.

Mais Renly était mort.

— Préparez vos affaires, vite, ordonna Harwyn en s’avançant dans leur tente.
— Où va-t-on ? l’interrogea Arlan.
— Peyredragon.

Leur aîné pliait déjà ses affaires, il empaquetait tout sans leur adresser un regard de plus. Ryam et Imry obéirent immédiatement, mais Ormund et Arlan paraissaient plus hésitants. Cregan les regardait faire, ignorant où se placer.

— À Peyredragon se trouve Stannis. Notre ennemi, lui rappela Ormund.

Harwyn claqua le battant de l’un des coffres en le refermant lourdement. Il se tourna vers ses frères, captura leurs regards à tous.

— Qui donne les ordres, ici ? gronda-t-il.
— Père, grogna Ormund.
— C’est moi, le reprit Harwyn. Père ne se souvient même pas de toi, abruti.

Il pointa un doigt rageur vers l’extérieur.

— Si nous ne rejoignons pas Stannis, qui alors ? Le bâtard Lannister ? Le roi du Nord ? Nous avons suivi Renly parce qu’il avait ses chances dans cette guerre. Ses guerres se sont éteintes avec lui. Si nous restons ici, qui sait ce qui nous arrivera ? Si nous rejoignons Stannis immédiatement, nous pourrons être pardonnés. Nous intégrerons son armée et nous lui offrirons sa couronne. Alors peut-être, si nous nous positionnons bien, que l’un d’entre vous aura la chance d’épouser sa fille.
— La lépreuse ? rit Imry. Pitié, non.
— Elle a toujours plus de prestige que toi, Cador, se moqua Ryam.

Les deux frères rirent et Harwyn claqua dans ses mains pour ramener le calme sous la tente.

— Bougez-vous, j’ai dit, tonna-t-il.
— J’ai prêté allégeance à Renly, protesta Ormund.
— Stannis est le seul roi légitime.

La voix de Cregan fut un souffle dans leur conversation. Ils le regardèrent un instant et Harwyn hocha la tête.

— Le Chiot a raison. Nous n’avons pas suivi Renly parce que nous croyons éperdument en lui. Par droit de naissance, c’est Stannis qui doit régner. Allez, dépêchez-vous.


La nuit est sombre et pleine de terreurs, songea-t-il en observant les flots noirs qui les entouraient. La baie de la Néra était bien trop silencieuse, et comme pour faire taire ses pensées, les cloches de la ville sonnèrent leur arrivée. En réponse, Davos Mervault ordonna que les tambours résonnent. Ils obéirent, emplirent de tonitruance la baie. Le cœur de Cregan paraissait battre en écho avec eux, mais une part de lui demeurait inquiète : sans la femme rouge, R’hllor les accompagnait-il toujours ? Il croyait en le Maître de la Lumière, le craignait et l’aimait.

Mais pouvait-il les protéger, même de loin ?

Un éclair rougeoyant traversa le ciel. Une flèche enflammée. Les sourcils de Cregan se froncèrent alors que retentissait la première détonation. D’une impulsion dans son dos, Harwyn le força à s’allonger par terre. Le navire voisin au leur explosa, les tambours qui s’étaient tus firent place à  des hurlements à peine humains.

Sur le pont, Cregan leva la tête pour découvrir la baie de la Néra, toute embrasée de vert. Du feu grégeois. Sa bouche s’ouvrit de stupeur, de terreur. La voix de Stannis rugit parmi le chaos : ils avançaient. Malgré leur flotte détruite et malgré l’horreur qui avait gagné les rangs. Malgré l’ombre qui s’était abattue sur eux.

L’Autre était-il venu, comme les avait avertis Mélisandre ?

Le cœur de Cregan se compressa dans sa poitrine alors qu’il posait un pied sur le rivage. Devant lui avançaient bravement Harwyn et Ormund. Il ignorait où étaient Arlan, Ryam et Imry, tous trois sur un autre navire. Le feu grégeois les avait-il emportés ? Le jeune homme cilla pour ne pas y songer. Ils marchaient vers la porte de la Gadoue, mais l’horreur s’était pleinement emparée d’eux. Un homme passa près d’eux, torche humaine qui brûlait de vert. À son contact, Harwyn s’effondra.

Le hurlement. Monstrueux. Le souffle de Cregan se coupa.

Le Cerbère s’effondrait, rugissant à la mort, et lui était incapable de se mouvoir alors que les forces de Port-Réal fondaient sur eux. Harwyn était en train de mourir et Cregan ne parvenait plus à bouger. Une main l’agrippa violemment au bras.

— Putain, Cregan ! Bouge !

Le Chiot tourna la tête juste à temps pour attraper le regard d’Ormund. La lueur vivante s’y éteignit à l’instant où une lance fendit sa tempe. La main de Cregan se crispa autour du pommeau de son épée et il rugit. Comme Ormund le fit de Torrhen des années plus tôt : il vengea son frère.


— Amyra, tu ne peux pas faire ça.

Il avait tant prié le Maître de la Lumière. Il l’avait tant supplié d’épargner leurs vies. Mais certains paraissaient incapables de suivre ses lueurs. Ils ne comprenaient pas que tout cela n’était pas une simple lutte pour une couronne, une simple guerre entre deux maisons puissantes, pas une bataille d’egos. La vraie guerre, elle, opposait la Vie et la Mort.

Le feu, l’obscurité.

Cregan resserra sa prise sur la manche de sa sœur. Qu’ils n’aient pas la même mère importait peu, car Meredith Estremont était devenue celle de son beau-fils. Elle incarnait cette figure aimante qu’il n’avait jamais eue, privé trop tôt de sa maternelle. Et les trois filles de Meredith étaient les sœurs bien-aimées de Cregan. Il aurait tout fait pour elles. Tout. Mais les laisser s’enfoncer dans la pénombre de l’Autre…

Amyra s’arracha brusquement à la poigne de son frère et darda sur lui un regard furieux. Dans ses yeux, la flamme qui brûlait n’avait rien de pure.

— Par les sept enfers, Cregan, laisse-moi !

Il pinça les lèvres avec dédain. Ses sourcils se froncèrent jusqu’à faire barre au-dessus de ses yeux.

— Il n’y a qu’un seul enfer, Amyra. Celui où nous vivons.

Elle agita lentement la tête, l’air désolée. Elle revint vers Cregan, cherchant son regard.

— Cregan, tu peux encore reculer. Tu peux encore…
— Toi, recule, souffla-t-il.

Il tenta de prendre les mains de sa sœur, mais elle s’y refusa. Entre ses doigts, elle tenait une fiole. Et si le verre sombre ne lui permettait pas de distinguer le liquide qu’elle cachait, Cregan savait trop bien ce que prévoyait sa cadette. Du haut de ses quinze ans seulement, Amyra était déjà trop dangereuse. Elle retourna vers la porte.

— Si tu franchis cette porte, Amyra…

La menace entière ne put franchir ses lèvres. Cregan l’étouffa. Il reçut de sa sœur un regard résolu. Il écrasa un soupir, et ferma les yeux.


Ses paupières étaient soudain si lourdes alors qu’il regardait l’immense bûcher. La peau d’Amyra se décollait déjà de son visage, elle se fripait et se retroussait de façon immonde, paraissant couler le long de sa face. Ses poignets accrochés dans son dos, seules ses chaînes résistaient au feu. Une odeur atroce emplissait l’air et ses poumons. Mais Cregan se forçait à regarder. Il avait dénoncé Amyra parce que c’était la bonne chose à faire. La seule solution, à moins qu’elle ne tente de tuer celle qu’elle appelait sorcière rouge.

Mélisandre d’Asshaï n’était pas une sorcière. Elle était l’envoyée du Maître de la Lumière. La parole de R’hllor. Face aux fidèles, celle-ci récitait des mots en haut valyrien, impossibles à comprendre pour un soldat comme lui. Elle prononça les mots.

— Car la nuit est sombre et pleine de terreurs, répéta-t-il après elle.

Les hurlements surgirent des bûchers, là-bas, Axell Florent, là, un autre seigneur de l’Orage, et ici… Oh, Amyra n’était plus aussi belle. Mais elle était plus pure que jamais. Cregan la fixa alors qu’elle rugissait, incarnant mieux que personne le lion qu’ils avaient pour blason. Des armoiries que Cregan avait abandonnées, maintenant. Il murmura des prières pour elle. Que son âme, celle de sa très chère sœur, renaisse dans le feu de R’hllor.

C’était parce qu’il l’aimait qu’il faisait cela.


Les hurlements de Shireen s’étaient tus depuis longtemps maintenant. De nombreux chevaliers de Stannis avaient déjà quitté les lieux. Certains étaient retournés à leur tente pour se remettre de leurs émotions, d’autres préparaient leurs affaires en secret… Cregan restait fidèlement là, à fixer les restes de l’enfant. Un semblant de silhouette, tout en cendres. Elle n’avait plus de visage et plus de chair, plus de souffle et plus de cœur.

Et même s’il ne restait du bûcher que des braises, le Maître de la Lumière était là. Plus que jamais, oui, il était là. Une main agrippa l’épaule du chevalier.

— Viens.

Cregan tourna la tête vers Ryam. Contrairement à d’habitude, il n’avait rien de rieur ou de moqueur. À vrai dire, il avait perdu cet aspect-là de sa personnalité au fil du temps. La guerre leur avait tant pris : la dernière en date, leur mère d’adoption, Meredith. Peu de temps après la mort d’Amyra, ils avaient reçu un corbeau. Meredith était morte d’une énième fausse-couche, mais il se racontait apparemment à Grandview que c’était le chagrin qui l’avait tuée.

Seul survivait au final Hugh, leur père que la démence gagnait. Rien ne semblait venir à bout du vieillard, sans doute parce que son grand âge lui interdisait de se rendre sur le champ de bataille.

Le cadet de Grandview emboîta le pas à Ryam, jusqu’à la tente que partageaient les frères. Ils n’étaient plus que quatre frères, cinq en comptant Steffon. Ils avaient presque été le double, des années plus tôt. Cregan se surprit de les voir plier bagages. Du moins, ils emballaient le nécessaire pour un voyage rapide… Et discret. Il fronça les sourcils.

— Que faites-vous ?
— On s’en va, Cregan, dit sombrement Arlan.

Il recula d’un pas et se heurta à Ryam, qui le tint par l’épaule.

— Le roi Stannis est…
— Le roi Stannis a tué sa propre fille. Comme il a tué notre sœur avant, et tout ça pour quoi ? cracha Imry.
— La guerre est perdue, Cregan. Si nous nous battons à Winterfell, nous mourrons à Winterfell.

Cregan tenta de se défaire de l’emprise de son frère, mais Ryam le maintint plus fort. Le Chiot commença à se débattre. Les autres se jetèrent sur lui. Une main plaquée contre sa bouche, il voulut hurler, mordre, grogner. On dut l’assommer pour qu’enfin il se calme.

Lorsqu’il se réveilla, ses frères avaient volé les rares chevaux qui restaient à l’armée de Stannis. Cregan était ligoté, sa monture attachée à celle d’Arlan.

Ils rentraient à la maison.

Les yeux de Cregan se levèrent vers les portes qui s’ouvraient devant lui. La dernière fois qu’il avait vu l’immensité de Peyredragon, sa sœur brûlait sur la plage voisine. Il inspira profondément et s’avança. Ce n’était pas Stannis qu’il avait face à lui, mais une reine. Les cheveux d’argent, les yeux d’améthyste, son physique ne pouvait que trahir son ascendance. Son nom ne faisait aucun doute. Daenerys du Typhon, s’appelait-elle. Née du feu. Et les trois dragons qui survolaient l’île ne faisaient que le confirmer.

Dans un coin de la salle, Cregan aperçut une silhouette qu’il ne connaissait que trop bien. Mélisandre d’Asshaï. Encore et toujours elle. Il entrouvrit la bouche avant de se concentrer sur la reine Targaryen. Des frères Grandison, Arlan, qui était l’héritier, s’agenouilla le premier.

Cregan, bien qu’en retrait par rapport à Ryam et Imry, fut le premier des trois à ployer le genou. Il ne put détacher son regard de la Mère des Dragons. Il se souvint alors des nombreuses prédictions de Mélisandre quant à Stannis.

Azor Ahai.

Se pouvait-il que…

Son souffle se coupa – Cregan regarda Daenerys, fasciné. Car désormais, elle était sa reine.


La nuit est sombre et pleine de terreurs…

Des années qu’il entendait cet axiome, qu’on le lui répétait et que lui-même le répétait. Et il comprenait enfin. Il comprenait alors qu’un froid glacial s’était abattu sur eux, plus violent que jamais. Le vent du Nord soufflait des nuées blanches et une brume épaisse s’était abattue sur le monde. Cregan huma l’air froid, il eut l’impression que ses poumons allaient geler, jamais une nuit ne lui avait parue si dangereuse.

Des cris, au loin, dans le noir.

De ses mains pleines de miracles, Mélisandre invoqua R’hllor : les arakhs dothrakis s’embrasèrent et la horde fondit dans l’obscurité. Bientôt, on ne les vit plus. On ne les entendit plus. Il n’y avait que leur hurlement, terrible, à ces choses. Les Autres. Comme l’Autre. Comme le Grand Autre dont le nom ne doit pas être prononcé, le Seigneur des Ténèbres, l'Âme de la Glace, le Dieu de la Nuit et de la Terreur. Aux yeux de Cregan, ce ne pouvait être que lui.

Il combattait son ennemi juré cette nuit-là.

Les mains serrées autour du pommeau de son épée, ses yeux cherchèrent ses frères dans la nuit noire. Mais il n’y avait plus rien, maintenant. Que ce froid mordant. Que cette obscurité.

Cregan ferma alors un instant les yeux, il pria. Et aux cris affreux qui se rapprochaient, il souleva sa lame, rouvrit ses paupières. Il était prêt.


Le feu. Le feu partout. Les nuées de cendres, les hurlements stridents. Les vents soulevés par les ailes du dragon. La mort. Puis encore le feu.

Cregan n’était plus qu’une arme. Un bras armé d’une lame obéissante, un faucheur pour sa reine. Il avait promis de toujours la soutenir. De toujours croire en elle. Il le faisait, ce jour. Même sous la pluie de feu qu’elle déchaînait, il croyait en elle. Car Daenerys était Azor Ahai. Il en était certain, maintenant, alors qu’il la menait vers son trône. Avait-elle seulement besoin de lui ? De tous ces hommes ? Sans doute pas : elle menait sa bête monstrueuse droit vers le Donjon Rouge.

D’une langue de feu, une tour s’écroula.

Un semblant de sourire frémit aux lèvres de Cregan alors qu’il avançait encore un peu. Les Manteaux Rouges et les Manteaux d’Or tremblaient sous leurs armures. Certains lâchaient leurs armes, certains fuyaient. Tous savaient que Daenerys du Typhon avait gagné cette guerre.

Le Trône de Fer, il était sien.
La couronne des rois, sienne.
Les titres, terres, l’autorité, tout.

À elle. Rien qu’à elle.

Elle chevauchait son monstre de feu, sans crainte, allant au combat comme n’importe quel soldat. Sauf qu’elle détenait l’arme ultime : Illumination. Le dragon. C’était cela…

Elle le confirmait maintenant, plus que jamais : la Guerrière de la Lumière, ce ne pouvait être qu’elle. Le rictus de Cregan s’élargit alors qu’il continuait de semer la mort sous sa lame folle – il servait R’hllor, maintenant plus que jamais, il en était certain.

Le Temple du Maître de la Lumière se dressait là, sur l’immense plaza. Son architecture était plus complexe que tout ce que ses yeux avaient pu voir jusqu’alors. Cregan avait les mains frémissantes. À la mort de Daenerys, après la destruction de Port-Réal, il avait dû se rendre à l’évidence, fusse-t-elle douloureuse : la Typhon-née n’était pas Azor Ahai. Ou alors elle ne serait pas morte si facilement. Certainement pas tuée par un bâtard du Nord qui se prenait pour un héros. Qui avait osé, à un moment, se prétendre roi.

Les pas de Cregan ne l’avaient pas mené vers un autre roi, un autre champion, cette fois-ci. Il n’y avait plus de prétendant au trône. Sa famille avait été pardonnée, au moins, à l’issue du Grand Concile. Alors sachant que les Grandison seraient en sécurité, sachant que la guerre était finie…

Il s’était tout naturellement rendu ici. Oh, il serait allé jusqu’à Asshaï s’il l’avait pu. Mais Volantis était déjà suffisamment loin de chez lui.

Il inspira profondément et approcha de l’édifice. Il observa le bâtiment qui avait l’aspect d’un brasier, et enfin y pénétra. Il approcha immédiatement un prêtre rouge, reconnaissable à sa toge. Leurs yeux se croisèrent – au fond du regard du religieux, une braise.

— La nuit est sombre et pleine de terreurs, souffla Cregan.


L’apprentissage était rigoureux. Cregan avait vu toute la puissance de R’hllor, du moins, il l’avait aperçue. À travers Kinvara, Flamme de la Vérité, qui accomplissait des miracles de ses mains. Ses mots, aussi, qui promettaient encore et encore le retour d’Azor Ahai. Cregan passait ses jours à prier le feu et supplier les flammes, à murmurer des prières et apprendre des incantations.

Il passait tout son temps à cela. À prier et à espérer. À croire en lui. À se convaincre qu’il avait eu raison d’embrasser cette voie, que c’était là sa voie. Sa raison d’être.

Et depuis peu, Cregan en était certain, le feu répondait à ses appels : dans les brasiers, il voyait l’avenir. Même si ses supérieurs ne le croyaient pas, lui savait. Il avait raison.

Sans être profondément heureux dans cette vie, Cregan se sentait au moins à sa place. Il servait le Maître de la Lumière et œuvrait en son nom, autant que possible. Jusqu’à ce jour, du moins, où un jeune homme vint au temple, porteur d’un message. Quand le jeune fidèle de R’hllor, reconnaissable à sa robe jaune d’apprenti, vit le sceau, son cœur se serra.

Ce lion endormi, il ne l’avait plus vu depuis un an. Mais il savait ce que cela signifiait : dans un bref instant de lucidité, Hugh réclamait son retour. Cregan partait dans la semaine.

Quand il entra dans le château familial, Cregan reçut tout de suite la lourdeur des regards comme un sermon silencieux. Il observa ses frères, muet, détaillant leurs visages. Les masques des lions avaient changé avec l’année les séparant, pourtant ils étaient toujours cette meute de chiens fous.  Arlan le Molosse, Ryam le Ratier, Imry le Cador. Et Steffon le Corniaud.

Imry, qui était resté le plus éjoui de tous en dépit de la guerre, rit franchement en voyant la robe rouge qu’arborait son cadet. Il pointa un index moqueur sur lui.

— Qu’es-tu devenu, le Chiot ?

L’intéressé plissa les lèvres. Ne comprenaient-ils donc pas ? Avaient-ils oublié leur foi ? Leur amour de la Lumière était-il mort avec Stannis, puis Daenerys ?

— Je n’ai plus rien d’un chiot, grogna-t-il.
— Tu l’ouvres, maintenant ? reprit son aîné. Tu es devenu un Roquet !
— Imry, laisse-le, gronda Arlan.

Le plus âgé de tous se leva, Molosse et Chiot se firent face, longuement, en silence. Et Arlan sourit légèrement – d’un sourire fissuré par la guerre mais plein d’espoir pour l’avenir :

— Toujours fidèle à toi-même, Cregan. Bienvenue à la maison.

Cregan inclina la tête. Ils discutèrent un peu, échangèrent sur le temps passé qui les avait séparés. Puis vint la question, moqueuse encore entre les lèvres d’Imry :

— Et donc, Roquet, que feras-tu de ta vie maintenant que tu n’as plus de roi à vénérer ?

Les lèvres de Cregan se plissèrent. Il n’avait jamais rien pu accomplir. Il n’avait jamais fait qu’obéir. Tenter d’exister pour un roi, un dieu, un nom. Jamais pour lui. Il fronça les sourcils. Il y avait bien une chose… Une petite chose à laquelle il avait pensé, plus d’une fois…

— La dame d’Havrenoir, asséna-t-il seulement, le ton fort.


Gendry Baratheon… Un bâtard de plus qui se prenait pour un roi. Cregan eut une brève moue en observant son suzerain qui se mettait en selle. Ils allaient partir. La cour de Port-Réal les attendait : La Néra avait encore fait des siennes. Qu’avait-il fait, exactement ? Cregan n’était pas sûr. Pourquoi l’avait-il fait ? Pour asseoir une quelconque domination, peut-être. Quand on naissait trou du cul de reître de Culpucier pour être nommé suzerain par un nabot à l’âme traîtresse, que pouvait-il se passer d’autre que des catastrophes ?

Cregan rassembla les rênes de son cheval et mit le pied à l’étrier. Il n’eut pas le temps de bouger que son frère Arlan, qui devait rentrer en urgence à Grandview, s’approcha de lui. Ils eurent un regard entendu. À leur doigt brillait la même chevalière. La flamme de leur dieu : Cregan avait su réveiller la foi des siens.

— N’oublie pas, le Chiot : la nuit est sombre et pleine de terreurs, lui souffla Arlan en quittant la cour.

Cregan le regarda s’éloigner, un bref rictus aux lèvres.

— Mais le feu les brûle toutes, termina-t-il.