De mon âme à ton âme (Sariel)

Sarie,

C’est le cœur lourd que je t’écris ces lignes. Lorsque je suis parti pour affaires à Port-Réal, il était convenu que mes absences de Braavos seraient plus longues, mais il était toujours convenu que je revienne. Et cela, mon retour, est grandement compromis aujourd’hui.

La nouvelle de la mort du Seigneur de la Mer m’est parvenue et avec elle les rumeurs de coup d’Etat et celles de guerre. Je suis plus impliqué que je ne le souhaiterais dans cette affaire, et je suis maintenant contraint de trouver une armée pour secourir mes employeurs. Moi qui n’ai jamais baigné dans la violence, moi qui me suis toujours tenu le plus loin possible des effusions de sang – voilà que la brutalité du monde me force à y prendre part.

J’ai accosté à Pentos il y a quelques jours, et j’ai rencontré le Capitaine-général de la Compagnie Dorée. J’ignore encore tout de lui, mais une chose est sûre, il est la seule personne qui puisse me venir en aide à l’heure actuelle. Comme c’est étrange, de mettre ma vie et mon destin entre des mains inconnues. Si seulement j’avais le choix.

Sarie, fais attention à toi s’il te plaît. La guerre menace Braavos et tous ceux qui s’y trouvent en paieront bientôt le prix, la mort n’épargne jamais personne.

Dans quelques jours, nous prendrons la mer pour Volantis. Si jamais tu recevais cette lettre et si tu souhaitais y répondre, écris-moi là-bas.

Je pense à toi,

Nymeros

Nym,

Je te remercie de m’avoir prévenu. Je me demandais quand tu rentrerais à Braavos, même si tu t’en doutes, la situation n’est pas au beau fixe en ville. Rien d’alarmant pour l’heure, mais je crains qu’il ne s’agisse que du calme avant la tempête. J’écris assez de pièces pour savoir que tôt ou tard, la cité s’embrasera, à moins qu’un compromis ne soit trouvé d’ici-là.

Plus que jamais, je te souhaite bien du courage pour affronter le nid de vipères qui t’attend. Méfie-toi des troupes de mercenaires ; il faut bien plus que de l’argent pour gagner leur loyauté, et j’ignore si tes employeurs ont ce qu’il faut en réserve. Tout le monde ne peut guère s’improviser Reine Dragon, à rallier dothrakis et Puînés dans son sillage.

Je ne connais guère Pentos, mais fais attention à toi à Volantis. Cette cité n’est pas aussi idyllique qu’elle ne le laisse paraître, et je connais assez ton grand cœur pour savoir que l’esclavagisme de cette cité te pèsera. Ne prends pas trop sur toi, et ne te force pas à remuer ciel et terre pour tes employeurs. Ils ne te le rendront pas.

J’espère te revoir bientôt, loin de tous ces tourments. Fais attention à toi.

Mes pensées t’accompagnent,

Plume

Plume,

J’espère que cette missive te trouvera en bonne santé et surtout, en sécurité.

C’est drôle, quand je suis arrivé à Volantis il y a quelques jours, ta missive m’attendait déjà, comme un peu de réconfort dans ces temps troublés. Sans dire que ma vie s’écroule, l’avenir s’annonce sombre pour moi.

Ta lettre disait déjà tout, comme si tu avais su tout prédire. Volantis incarne bien le nid de vipères dont tu me parlais, les nobles d’ici n’ont même pas pris la peine de me mentir une seule seconde et j’ai dû faire de lourds compromis pour obtenir l’alliance dont j’ai tant besoin. Mais au moins cela a-t-il fonctionné…

Au-delà des esclaves qui déjà me brisent le cœur, j’ai fait quelque chose que je m’étais juré de ne jamais refaire.

T’ai-je déjà parlé de mon épouse ? Peut-être bien, je buvais beaucoup à l’époque où nous nous sommes rencontrés toi et moi. Elle s’appelait Alayna, je parle peu d’elle à vrai dire, je n’aime pas me rappeler d’elle, son souvenir restera toujours douloureux. Peu importe, je m’étais promis de ne plus me marier. Mais voilà que pour obtenir l’appui de Volantis, j’ai été forcé de me vendre.

Les fiançailles ont été signées hier et je ne peux plus reculer désormais. Je vais me marier. Je ne sais pas ce que je ressens, de la tristesse, de l’injustice, de la colère ? Je ne veux pas de cette union. J’aimerais juste rentrer à la maison, mais je suis entré en guerre contre ma maison et j’ai l’impression d’avoir trahi l’homme que je voulais être.

Mais là n’est pas le plus important. Contre ma main, j’ai obtenu de Volantis un appui militaire conséquent. Il faut que tu quittes Braavos. J’ignore quand nous attaquerons, mais ce jour viendra et il ne faut pas que tu sois là à ce moment.

Comment vas-tu ? Dis-moi que tu es en sécurité.
J’ai hâte de pouvoir te revoir.

Nymeros

Nym,

Je me porte bien, mieux que toi de toute évidence. A Braavos, la situation ne s’améliore pas, mais elle n’empire pas non plus. Le port des Chiffonniers est toujours bondé, et le Bateau Guignol affiche salle comble soir après soir. Tu aurais dû voir la dernière représentation ! Toute la salle a acclamé la troupe et a sonné le rappel plusieurs fois. C’était grisant. Il ne manquait plus que toi dans les rangs, à me jeter ce regard dont tu as le secret pour me féliciter de cette performance.

J’aimerai te rejoindre à Volantis, pour te soutenir dans cette épreuve et détourner tous ces sombres nuages de ton esprit, mais c’est impossible. Volantis est bien l’une des dernières villes dans laquelle je mettrai les pieds. Si j’avais su ce qui t’attendait là-bas, j’aurais tout fait pour t’empêcher de t’approcher de ce nid de vipères. Ton grand cœur est aussi ta plus grande faiblesse. Tu veux bien faire, pour les tiens comme pour toi-même, quitte à te perdre au passage. J’admire cette bonté qui est la tienne, dont je n’ai jamais su faire preuve, mais s’il-te-plaît, fais attention à toi. Je te l’ai dit, et je te le redis, personne ne te le rendra, encore moins ta famille.

Prends soin de toi, Nym. Je t’en conjure. Ne laisse personne ternir le sourire qui est le tien.

Mes pensées t’accompagnent, en espérant qu’elles puissent te protéger.

Plume

Plume,

Je me suis inquiété que tu n’aies pas écrit plus tôt, mais je me doute que la situation à Braavos n’a pas dû t’y aider… C’est drôle comme d’ici, j’ai presque l’impression que tout est normal. Pourtant mon cœur est à Braavos, tout le temps, tous les jours.

Cela me fait chaud au cœur de savoir qu’au moins, le Bateau Guignol reste le Bateau Guignol. Tu n’imagines pas comme j’aimerais être parmi cette foule, à acclamer la troupe et surtout celui à l’origine de la pièce. Je me souviens encore ton talent, toute l’âme que tu mettais dans ton écriture. Mais même si je ne suis pas dans le public pour t’acclamer et te féliciter de ce fameux regard, tu sais que le cœur y est toujours.

J’aimerais que tu puisses me rejoindre. Mais je comprends que tu ne le fasses pas. Mais pourquoi parler de ma famille quand elle n’a rien à voir dans tout cela ?

Je te jure que je prends soin de moi, et n’aie pas d’inquiétude pour mon sourire. S’il n’est plus à mes lèvres tu en restes le gardien, quand bien même je n’ai jamais su l’avouer. Je mens comme je n’ai jamais menti ici, à feindre la sérénité ou l’intérêt, mais ce sont des choses que j’ai laissées il y a des mois de ça au Bateau Guignol.

Je pense à toi, plus que je ne le devrais, et tu me manques.
Je t’embrasse,

Nym

Bonjour,

Je sais pas qui vous êtes, ou ce que vous voulez à Plume, et peu m'importe au fond.

Plume a quitté Braavos y a plus d'un mois, et personne au Bateau Guignol sait où il a décampé, ou pourquoi il est parti. Il a seulement laissé un mot pour indiquer son départ, rien de plus. Et vu l'état de sa piaule, il a pas prévu de revenir.  

Je sais pas qui vous êtes pour lui, mais si vous le revoyez, prenez soin de lui. C'est un chic type.

Myrmello