[BELLE ILE] Révélations et confidences | Megalis [Terminé]

Aelinor frappa doucement à la porte de la chambre de Megalis, elle savait Ulwyck sorti depuis un moment, mais elle n’avait pas aperçu son amie. Elle devait certainement être en train de se reposer et de se remettre de ses émotions après sa première nuit. La brune avait prit soin d'apporter quelques plantes antalgiques pour soulager ses maux, saule blanc et cassis feraient l’affaire, si non elle demanderait au mestre du lait de pavot. Ce n’était cependant pas la seule raison de sa venue, en effet, elle avait quelque chose à lui dire et si elle ne lui en avait pas parlé avant, c’est parce qu’elle avait honte. Honte d’avoir cédé et d’avoir aimé ça. Mais probablement encore plus honte de s’être fait jeter quelques minutes après son premier baiser. Elle ne devait vraiment pas avoir assuré et elle avait besoin de conseil, maintenant Megalis savait des choses qu’elle ignorait, alors, après une très longue hésitation, presque toute la journée en fait, elle finit par se dire que la née Farman était la seule personne qui pouvait entendre ce qu’elle avait fait sans la juger trop durement et lui prodiguer quelques conseils pour, peut-être, faire reconsidérer son choix à Jonas.


Elle n’avait jamais eu l’intention de finir vieille fille ou de rentrer dans les ordres, mais là, elle ne voyait pas d’autres options. Une fois la colère passée, il ne restait plus que la honte et le chagrin. Était-ce là l’amour ? Un sentiment de vide absolu quand l’être cher vous tournait le dos ? Elle comprenait enfin ce qu’elle ressentait, et elle comprenait aussi qu’on puisse faire n’importe quoi. Mais cela était si douloureux qu’elle aurait préféré pouvoir s’arracher le cœur que de ressentir cela. Elle avait aimé deux fois et deux fois les hommes desquels elle s’était entiché l’avaient abandonnée. Elle ne comptait pas Edmund, sachant très bien qu’elle ne l’aimait pas et qu’il était loin de l’avoir abandonnée, même si le schéma restait le même en quelque sorte. Alors était-elle vouée au célibat ? Si oui, autant devenir Septa. Heureusement, il restait un fond de colère pour lui faire retrouver un peu de détermination. Elle n’avait pas encore abandonné tout espoir, mais plus le temps passait, plus les mots d’Alcéaerys résonnait en elle. Une femme n’a pas besoin d’un homme pour gouverner. Elle avait tellement raison, mais c’était tellement compliqué. Et puis un cœur d'artichaut tel qu’Aelinor pouvait-il réellement se passer de l’amour ?


Une fois assurée que la Lionne désormais dornienne était en mesure de la recevoir, elle entra et sourit en sortant les plantes et en les posant sur la table avant de s’avancer vers Megalis avec un sourire compatissant.

__ Comment vas-tu, ma chère ?  


C’était une question rhétorique, elle allait mal, évidemment. Après sa première nuit nulle jouvencelle ne pouvait aller bien. Le sang sur les draps en attestait et cela n’était que la partie visible de l’horreur qu’elle avait dû vivre. Mais c’était également le début de sa vie d’épouse et puisqu’elle semblait tant aimer Ulwick, Aelinor était heureuse pour elle et ne voulait pas dramatiser ce qui, désormais, était son devoir conjugal, passage obligé pour avoir des enfants et fonder une famille.

__ J’espère que tu n’en auras pas besoin, mais si tu as mal, une infusion avec ces plantes saura te soulager.


Fit la Hightower en prenant les mains de Megalis et en les serrant un peu entre ses doigts en signe de soutien. Par les Sept, pourquoi en plus de tout le reste, les Dieux infligaient cela aux femmes. Pourquoi faire des enfants ne s’avérait pas plus simple, moins dégoûtant et moins douloureux ? Était-ce là le prix à payer pour avoir une descendance ?

Aelinor était bien trop préoccupée par la politique pour prendre le temps d’aimer. Elle aurait en tout cas préféré qu’il en soit ainsi, et pourtant, elle ne pouvait pas empêcher, malgré tous ses efforts, de voir naître des sentiments dans son cœur de jouvencelle. Elle savait que son mariage n’était pas destiné à être un mariage d’amour mais une alliance au profit de sa famille. Elle y était prête, mais depuis quelques temps déjà, tout était tellement confus. Ses intérêts et les intérêts de sa famille étaient-ils les mêmes ? Quand elle voyait le projet que son père avait eu de la marier à Lord Caswell, elle se le demandait. Elle avait cependant apprécié la conversation qu’elle avait eue avec lui et elle n'avait pas manqué de lui lancer un défi. Mais avant, il devait éclaircir la situation vis à vis de la place de sa fille aînée dans la succession, la brune avait été très claire. Elle ignorait cependant le véritable objectif du Sire de Pont l’Amer, et pour le moment, ce dernier présentait donc peu d'intérêt.


Voyant le fier lion rouge sur la poitrine de Megalis, Aelinor releva les yeux vers son amie et secoua la tête en souriant.

__ Si j’avais su…


Elle laissa sa phrase en suspens, cela expliquait tant de choses, mais au fond, cela ne changeait rien entre les deux jeunes femmes. En revanche, l’une mariée et l’autre non, un gouffre les séparait. La brune était légèrement tendue, parce qu’elle ne voulait pas rappeler à la blonde que désormais, sa vie était liée à l’homme qui avait partagé sa couche cette nuit-là et que rien ne pourrait l’en défaire. Pour elle, il était inimaginable qu’une femme puisse tirer le moindre plaisair de cet acte, aussi, seule la question de la douleur se présentait à son esprit. La Farman la rassura et la Hightower se détendit, soupirant même de soulagement et se relâchant visiblement à l'évocation de la douceur d’Ulwyck.

__ Ah. C’est bien.


Fit elle en baissant les yeux. Une question cependant lui brûlait les lèvres.

__ Est-ce que ça fait aussi mal qu’on le dit ?


Une peur profonde transparaissait dans le regard de la jouvencelle qui savait qu’elle allait, tôt ou tard, devoir y passer et appréhendait ce moment plus que tout, plus que la guerre, plus que la vie à la cour, plus que le procès. Si en plus, cette première nuit avait lieu avec Bronn, ce serait le pire qu’elle puisse imaginer, mais elle avait déjà plusieurs idées de parades pour faire face à ce cas précis. Mais en dehors de lui, elle devrait bien faire son devoir et entre ça et la cérémonie du coucher, immonde tradition qui ajoutait un peu plus d’horreur à son appréhension, elle ne savait pas si elle serait assez forte.

__ Du vin. Je crois qu’il nous faudra bien ça.


A l’évocation de Luthor, elle ne put s'empêcher de rire. La séduction étant très loin de lui faire aussi peur que la première nuit, ainsi que toutes les autres, elle comptait bien attirer à elle les meilleurs partis de Westeros et… que le meilleur gagne. Sauf que ça n'était pas si simple. Lord Farman était beau comme un soleil, mais glacial, de plus il était le frère de Megalis, il ne serait donc pas facile de le faire tomber dans son escarcelle. Elle aimait Jonas, elle n’avait jamais joué avec lui parce que son manque de sens politique en faisait une personne à part dans son cœur. Bon peut-être un tout petit peu à leurs débuts, comme avec tout le monde, savait-elle seulement faire autrement. Le fait qu’il lui ait sauvé la vie n’avait fait qu'accentuer ce sentiment, elle se refusait à manipuler quelqu’un d’aussi bon. Mais il la troublait bien trop pour qu’elle puisse rester concentrée sur ses objectifs quand elle était avec lui. Elle s’en rendait compte à présent. Au départ elle avait mit ça sur le fait qu'il l’ait extirpée de la poussière et des gravats du Septuaire de Baelor. A chaque fois qu’elle le voyait, elle sentait sa poitrine tambouriner à tout rompre. Mais maintenant qu'ils avaient échangé un baiser elle comprenait que ce n'était pas ce souvenir qui la mettait dans tous ses états. Enfin si, mais que ce n’était pas de la peur ni seulement de la reconnaissance. Elle avait, ce jour-là, été suffisamment proche de lui pour découvrir son odeur, son souffle, la sécurité de ses bras, la douceur de son regard. Et jamais la plénitude de cet instant ne l’avait totalement quittée. Il avait été son unique pilier dans le chaos, et il se détachait de tous les autres dans la foule, il était toujours éclairé d’une lumière spéciale quand elle le regardait.

__ Jonas m’a embrassée.


Lâcha enfin la brune aux yeux azur, éludant donc le sujet.

__ Il m’a embrassée, je l’ai embrassée et il m’a dit…


Qu’est-ce qu’il avait dit, déjà ? Ce moment était passé si vite et il était recouvert d’un brouillard inextricable dans sa mémoire, un mélange de chagrin, de déchirement, d’incompréhension et de sentiment de trahison. Elle ne pouvait pas avoir donné son premier baiser à un homme qui n’avait pas attendu cinq minutes avant de la laisser là au milieu du couloir. Elle ne voulait pas y croire. Depuis elle priait les Sept de lui pardonner son péché. Si seulement elle savait ce que les Sept lui réservaient encore pour faire de sa vie sentimentale un bordel sans nom…

__ Il a parlé de mes ambitions et il est parti.


Déglutissant, la Hightower ouvrit de grands yeux. Elle venait de comprendre l’intention de Jonas. Elle tenta un sourire, mais par les Sept, elle avait une foutue envie de vomir qui la prenait aux tripes soudainement. Et envie de pleurer aussi. Elle baisa les yeux, puis les releva avec un large sourire tâchant tant bien que mal de ravaler sa nausée.

__ Donc oui. J’ai passé un très bon moment avec ton frère. Si nous arrivons à nos fins, il sera Roi et de fait, l’allié du Roi du Bief, mon père. Mais j’avoue qu’il me fait un peu peur. Enfin je veux dire heu, pour heu… la bagatelle tu vois.

__ Hum… je crois que tu devrais arrêter d'écouter ta grand-mère. Cela te fera le plus grand bien de t'en éloigner.


Bien que n'ayant jamais assisté aux pires violences exercées par Edarra sur Megalis, Aelinor avait été témoin de gestes et de paroles qui lui avaient paru intolérables et cruels. Elle s'était contentée de réconforter son amie au mieux et n'avait jamais réellement osé s'opposer à la vieille femme, mais elle ne l'aimait pas.

Aelinor eut une moue dubitative, elle se doutait bien que la verge des hommes était plus petite que celle des cheveux, mais elle ne pouvait pas croire en dépit de toute la délicatesse du monde que ça ne ferait pas mal. Mais Megalis en savait plus long qu'elle à présent, alors peut-être devait-elle la croire. Mais un mot de son amie ne suffirait probablement pas à effacer les dégâts de la pire éducation sexuelle qui soit : celle basée sur la peur et la culpabilisation. Pour fonctionner cela fonctionnait, mais il faudrait certainement plus que de la délicatesse pour faire oublier à la brune toutes les horreurs qu'on lui avait raconté. Ainsi quand la lionne prétendit que c'était agréable, s'en fut trop pour qu'elle la croit. Cela dit, si le croire rassurait la blonde, Aelinor se refusait à la contredire. Alors elle se contenta de sourire d'un air un peu niais.

La Hightower sourit à l' arrivée du plateau, remarquant que les en-cas étaient salés. Elle préférait, n'étant pas très friande de sucreries, sauf les dattes bien sûr. Elle n'était pas non plus portée sur le vin habituellement, mais là elle en avait besoin. Sa vie sentimentale était par trop chaotique pour qu'elle se contente de thé.

__ Tu me connais trop bien Megalis.

Prenant sa main, la jouvencelle la serra délicatement en guise de remerciements. Depuis tout ce temps, elle n'avait pas oublié et c'était une belle preuve d'amitié. Ce qui allait suivre plus encore.

Suite à ses confidences, Megalis fut d'un grand soutien. Aelinor avait peur du jugement, mais il n'en fut rien. Elle secoua la tête, car non, la Farman ne pouvait rien faire, rien de plus que ce qu'elle faisait déjà. Elle fit oui de la tête quand celle-ci lui avoua qu'Ulwyck n'était pas le premier homme qu'elle avait embrassé. Elle ravala ses larmes et tenta de sourire.

__ Je te remercie. De ne pas me dire que j'ai fauté. Tout ça pour… ça. Je m'en veux si tu savais.

Elle hocha la tête, puisque l'heure était aux confidences elle pouvait bien lui dire ce que ce baiser lui avait fait.

__ Cela dit je dois t'avouer que j'ai bien aimé. Ça fait des papillons dans le ventre, c'est rigolo.

Un sourire rêveur passa sur son visage mais s'effaça bien vite. Et elle prit sa tête entre ses mains.

__ Oh là là je suis une pécheresse Megalis. De la pire espèce. Enfin j'ai prié, beaucoup, j'espère que les Sept me pardonneront. Surtout n'en parle à personne. En plus, j'ai fait ça dans la demeure du frère de mon fiancé. Si on nous a vu tu imagines ?

Dit-elle sans penser à mal vis à vis de Megalis qui n'avait pas du tout la même vision qu'elle de ce genre de choses. Vision qu'elle acceptait sans la partager, mais dont elle était suffisamment consciente pour comprendre que la blonde se fichait pas mal d'avoir été parfaitement chaste. Aimer et oublier n'était pas le problème. Aimer n'était qu'un faux pas dans le parcours d'une dame, un faux pas sans importance. Mais l'avoir embrassé. Cela signifiait trop pour elle pour qu'elle puisse simplement passer à autre chose. Elle aurait dû se détourner, elle aurait dû partir plutôt que de l'embrasser une deuxième fois.

__ Je sais, il a été très gentil. Mais il est tellement froid quand il est en colère. Il arrive à me glacer le sang.

Megalis demanda si elle voulait déjà l'épouser.

__ Qui ?

Elle avait perdu le fil et repensait à Jonas, elle ne l'aurait jamais embrassé en retour si elle n'avait pas eu l'intention de l'épouser. Mais elle n'était pas prête de recommencer, ni avec lui ni avec personne.

__ Ah Luthor.

Inspirant profondément elle réfléchit un instant.

__ Non, il est trop tôt. On doit régler cette histoire avec Bronn et… ensuite je briserais les fiançailles avec Damion comme convenu avec le prince Edmund. Mais ce serait bien, non ? Tu serais ma belle-sœur !

Un immense sourire éclaira le visage de la Jouvencelle. Un Roi et qui plus est le frère de sa meilleure amie. Que pouvait-elle bien espérer de plus au milieu de tous ces reîtres et ses bâtards. Et puis il était beau. Foutrement beau même. Leurs enfants seraient à n'en pas douter magnifiques.

Oh oui, leur éducation avait été bien différente. Aucune violence n’était tolérée au sein de la famille Hightower, les coups étaient réservés aux garçons et encore fallait-il qu’ils aient fait une énorme bêtise. Les punitions existaient, bien-sûr et l’on expliquait encore et encore ce qui était acceptable ou non. Jusqu’à ce que ça rentre. Et étonnamment, cela rentrait assez vite. Etait-ce parce que les grands montraient l’exemple que tout avait toujours paru si fluide à la brune ? Était-ce parce que les Dieux veillaient sur les actes de chacun bien plus efficacement que n’importe quel parent, Septa ou Mestre? Était-ce parce que l'Étoile à Sept Branches guidait leurs pas chaque jour et que ses enseignements n'avaient jamais été remis en cause ? Il ne lui serait en tout cas jamais venu à l’esprit de contrevenir aux mise en garde de sa mère ou de défier l’autorité de son père, parce que l’omniscience des Sept soutenait leurs propos. En tout cas pas avant de le court-circuiter quand à son mariage avec Lorent. Il était impensable pour elle de ne pas suivre ses leçons avec assiduité afin de devenir une brillante jouvencelle, de ne pas respecter l’étiquette et la bienséance à la lettre.


Naître Hightower, n’était pas une mince affaire cela avait une signification et l’on ne manquerait pas de jaser à son sujet au moindre faux pas. Elle en avait toujours eu conscience et s’évertuait à se conformer aux injonctions sociales de son rang. La chance l’avait vue venir au monde riche et bien dotée, elle chérissait cette chance en ne s’abaissant jamais aux distractions du petit peuple. Vouloir les imiter était un caprice d’enfant gâté, pas tant que les nobles valaient mieux en soi, mais parce qu’ils devaient se montrer digne du pouvoir que leur nom leur conférait. Si des nobles voulaient se comporter comme eux, qu’ils prennent aussi la faim et la misère, si non qu’ils tiennent leur rang et remplissent leurs devoirs.


Elle se souvenait que les rumeurs avaient fusé sur Malora et Leyton après leur disparition dans la tour de la vierge. Toute la famille s’était unie pour étouffer l'affaire, mais elle avait largement dépassé les frontières de Villevieille et désormais le mal était fait. Cette tâche sur le nom des Hightower l'obligeait à réparer le mal que cette histoire avait alors causé et renforçait son sens du devoir. Elle devait éclairer la voie ! Ce qui pesait sur ses épaules dès le jour de sa naissance la dépassait amplement, en tant que fille aînée, de son comportement et de ce qu’elle obtiendrait dépendait le destin de ses frères et sœurs, les alliance de sa famille pour plusieurs générations, et certainement le rayonnement de Villevieille et du Bief dans son ensemble. Rayonnement déjà mis à mal par la gouvernance de Bronn. Malgré les difficultés, elle était parvenue à se hisser jusqu’à une apparente perfection, jusqu’à ce baiser tout du moins. Alors non, elle n’avait pas le droit d’être humaine, de ressentir des choses et encore moins de les exprimer, car finalement, le réel problème c'était d’avoir montré ses sentiments à Jonas, pas tellement de les avoir ressentis. Alors quand Megalis lui dit qu’elle n’était pas une pêcheresse et qu’elle n’avait pas de raison de se sentir coupable, elle la regarda d’un air triste.


Bien sûr que si.


Aelinor lui était infiniment reconnaissante d’essayer de lui remonter le moral, mais elle savait ce qu’elle avait fait. Si encore elle ne lui avait pas rendu son baiser, mais elle s’était hissée sur la pointe des pieds et avait posé ses lèvres contre les siennes. C’était une expérience terriblement douce à son souvenir et elle voudrait se flageller pour l’oublier, pour que le goût des lèvres de Jonas ne hantent pas ses souvenirs et que l’envie de recommencer disparaisse de son esprit.

__ J’espère qu’il ne dira rien, j’espère qu’il oubliera.


La jouvencelle ferma un instant les yeux et baissa la tête avant d’ajouter d’un voix pleine de chagrin et de remords.

__ Je voudrais oublier. Oublier qu’il y a eu un homme avant mon futur époux.


Un long soupir s’échappa de ses lèvres.

__ En tout cas je ne veux plus revivre pareille expérience. C’était un moment horrible. Enfin je veux dire juste après quand il est parti et que j’ai compris qu’il ne m’épouserait pas.


Redressant la tête, elle regarda à nouveau Megalis avec intérêt.

__ As-tu oublié le Riverain ?


Demanda-t-elle. Et puisque l’heure était aux confidences, elle s’éclaircit la gorge avant d’avouer que Jonas n’était pas le premier homme qu’elle avait aimé.

__ J’ai… déjà aimé quelqu’un d’autre avant Jonas. Tu ne le connais pas, je ne t’en ai jamais parlé. Je l’ai rencontré à Essos.


Ouvrant de grands yeux outrés à la réponse de Megalis concernant ses trop nombreux prétendants, la brune aux yeux céruléens répondit, un peu vexée.

__ Je n’en ai pas tant que ça. Lord Caswell semble avoir renoncé et Damion, nos fiançailles sont juste un arrangement avec le Prince Edmund. Jonas, on voit comment ça a fini et personne d’autre n’a fait la moindre demande à ma connaissance. Cela ferait donc de ton frère mon seul et unique prétendant. C’est déprimant.


Faussement désespérée et réellement amusée, elle soupira avant de hocher la tête en proie à une nouvelle réflexion.

__ Bon… Peut-être que père m’en a caché un ou deux pour négocier en paix sans que j’y mette mon grain de sel après ce qui c’est passé à Port-Real. Hum… cela dit, il est pieds et poings liés tant que mes fiançailles avec Damion sont maintenues. Tout comme n’importe quel prétendant d’ailleurs.


Megalis se mit à rire suite à sa propre réflexion et cela provoqua un fou rire général. Entre deux rires, la brune aux yeux céruléens ajouta d’un air faussement hautain très bien maîtrisé accompagnée d'une gestuelle précieuse légèrement surjouée.

__ Excusez-moi votre altesse, mais c’est tout à fait juste. Je suis une Hiiiiiiiiiiiiiightower m’voyez, je ne puis que devenir une Majesté.


Plusieurs questions subsistaient pourtant,. Porterait-elle seule la couronne des terres du sud comme il était prévu avec Alcéaerys ? Obtendrait-elle la couronne du Bief pour son père, comme la Triarchie le voulait ? Ou est-ce qu’un tout autre destin imprévu s’offrirait à elle ? Il était bien trop tôt pour le dire.

Aelinor serra la main de Megalis avec un sourire, lui signifiant qu’elle comprenait que, dans cette épreuve qu’elle traversait, elle était là, même sans un mot, car au fond, les mots étaient bien inutiles et seul le temps panserait ses plaies. La réciproque était aussi vraie, amies et alliées dans une entreprise aussi dangereuse que grandiose, la Hightower serait présente pour la Farman et la compétition qui les avaient toujours animées avait pour limite ce lien indéfectible qui les unissait depuis dix ans. Les guerres et les revers avaient retardé leurs plans, mis du sang sur leur avenir brillant et empêché que la route ne soit simple et rectiligne. Dans cette affaire, la jouvencelle avait été infiniment plus épargnée que la jeune épouse et elle en était tout à faite consciente. Mais toutes deux étaient toujours là, en vie et prêtes à tracer leur chemin vers la couronne qu’elles convoitaient depuis toujours. N’était-ce pas une preuve de leur force ? Et le fait qu’elles soient toujours unies, une preuve de la puissance de leur amitié, aussi étrange et houleuse soit-elle ?

__ Merci… le temps oui.


Le temps et cette rage insoupçonnée qui avait explosé en elle après cet abandon, cette trahison. Alcéaerys avait raison, les hommes n’étaient que des boulets qui la ralentissaient, en tout cas Jonas avait été de ceux-là. Elle aurait été prête à tout abandonner pour lui, ses ambitions, la politique, tout ce qui faisait d'elle ce qu’elle était et tout ce qu’elle voulait devenir. Elle avait à présent conscience que c’était pour cela qu’il était parti, pour ne pas la voir se faner dans un mariage bien différent de celui qu’elle convoitait. Fallait-il qu’elle lui en soit reconnaissante ? Peut-être, mais ce n’était pas à lui de décider, pas après qu’ils se soient embrassés, pas si vite, pas avant qu’elle ait pu rassembler ses esprits. Elle n’avait rien compris sur le coup, ni la bonté, ni le sacrifice et elle se garderait bien de l’expliquer à Megalis, car si l’intention du Caron était bonne, l'exécution était catastrophique.

__ Excuse-moi, je ne voulais pas te faire de la peine.


Fit-elle en voyant le visage de la blonde se parer de chagrin. Cette derrière avoua qu’elle n’avait pas oublié le riverain. On n’oublie pas son premier amour si facilement pensa la brune, mais Jonas n’était pas son premier amour, il y avait eu un autre homme avant. Un homme de 17 ans à l’époque, et elle avait 13 ans de son côté, alors jamais elle n’aurait pu l’embrasser, mais elle y avait songé. Peut-être aurait-elle dû. Elle baissa les yeux à son tour en songant qu’il était peut-être mort. Replongeant son regard azur dans celui de la Farman, elle répondit :

__ Oui. Allons de l’avant.


Son sourire s'élargit et se fit mutin alors que Megalis la questionnait sur ce mystérieux inconnu dont elle venait de révéler l'existence.

__ Tregar ? Non… beurk. il est vieux et il couche avec ma tante. Non merci. Je ne t’en ai jamais parlé parce que ce n’était pas un homme digne de mon rang. Et puis il est mort de toute façon maintenant. C’est lui qui m’a offert ça :


Tirant sur la chaîne, elle sortit le médaillon représentant la flamme incrustée d’un rubis d’entre ses seins qui avaient certainement pris encore du volume depuis leur rencontre.

__ Ce n’est pas un Lysien. Heureusement, les Lysiens ne savent pas se tenir, pire que les Dorniens. Il venait de Pentos. Enfin pas vraiment mais il avait les cheveux bleus, tu sais.


Elle rit en se souvenant de cela, mais ses yeux se perdirent dans le vague alors qu’elle se remémorait les traits du visage d' @Aegon Targaryen et ses yeux, ses yeux. Le souvenir de la sensation de sa main frôlant la sienne lorsqu’il avait rattrapé la tour qu’Aelinor avait laissé échapper lui donna un frisson.

__ Il parlait merveilleusement, il était instruit, tellement intéressant et sacrément bien éduqué pour un mercenaire. Cela m’a surprise. Il jouait aussi très bien au Cyvosse. Mais je l’ai quand même battu...


Précisa-t-elle avec un large sourire plein d’orgueil.

__ Nous avons échangé des missives pendant plusieurs années, mais il n’a pas répondu à la dernière…


Baissant les yeux, elle sentit les larmes lui monter au nez. Heureusement la réplique suivante de Megalis, bien qu’elle la vexa, lui permit de faire un peu d’humour, et bien sûr la blonde ne fut pas en reste au niveau des plaisanteries. Elles rirent donc de bon cœur et la brune renchérit.

__ Évidemment, votre altesse.


Megalis rentra entièrement dans le jeu d’Aelinor et toutes deux se mirent à prendre de grands airs tout en riant à gorge déployée et en faisant des grands gestes digne des plus grandes tragédiennes. Mais alors que la Farman parlait de venger sa famille avant d’inviter la Hightower à trinquer, la jouvencelle reprit un peu son sérieux avant d’approcher son verre. Elle trinqua avec un sourire carnassier.

__ A nos couronnes. Et si. Tu vengeras ta famille ma chère, et ce jour-là, je vengerais également la mienne de tous les affronts que Bronn La Nera lui a fait subir. Ils vont apprendre que l’on ne bafoue pas l’honneur des Hightower, ni celui des Reyne, ni celui des Farman.

Cela fait partie de la vie. Oui, Megalis avait raison, souffrir faisait partie de la vie, tout comme rire, tout comme l’amour. Peut-être devait-elle accepter d’être faillible, d’avoir peur parfois. Rares étaient les fois où où elle pouvait le montrer, rares étaient les endroits où elle pouvait être elle-même, simplement. La Farman était soumise aux mêmes attentes insensées de la part de sa famille et de la société, elle le savait, alors elle savait que cette dernière comprenait. Elle savait qu'ici, elle pouvait être elle-même, peut-être plus encore que chez elle, à Villevieille. Alors, pour remercier la blonde d’être là pour elle, elle la prit dans ses bras. Rares étaient les personnes comme Megalis, à qui elle pouvait tout dire, ou presque. Rare et précieuse était leur amitié et la brune remercia les Sept de leur avoir permis de se rencontrer dix ans plus tôt, alors qu’elles n’étaient encore que des gamines dont le masque était encore suffisamment fragile pour qu’elles se rencontrent vraiment et se parlent avec sincérité. Quelques années plus tard, il aurait certainement été trop tard pour qu’elles puissent parler de leurs ambitions avec la liberté et la naïveté de l’enfance. A l’époque, tout cela n’était que les rêves de deux fillettes et cela ne portait pas à conséquences. A présent, les enjeux étaient tout autres, et si elles s’étaient rencontrées aujourd’hui, il était probable que la compétition aurait largement pris le dessus. Mais avec ce qui les liait depuis tout ce temps, elles seraient certainement de redoutables alliées dans la bataille à venir.


L’attitude curieuse de son amie fit rire la Hightower, il était vrai que la nouvelle était croustillante, et encore, la Lionne ne savait pas tout. Mais à quoi bon lui avouer qui il était alors qu’il était mort ? Et puis, Megalis avait toutes les raisons de ne pas apprécier les Targaryen, même si Belle Île en avait hébergé et épousé certains. Elle laissa la Farman observer le pendentif avec un sourire dédié à l’objet dont elle ne se séparait jamais. Il avait revêtu une toute nouvelle signification, bien plus puissante encore que le gage d’affection et de respect de sa lignée qu’il avait pu représenter quand elle l’avait reçu. Le garderait-elle en sa mémoire ? Certainement, mais combien de temps pourrait-elle encore le garder au plus près de son cœur, autour de son cou ? Elle avait tant rêvé de ce mariage, tant imaginé le retrouver, tantôt sur un champ de bataille, tantôt dans le secret d’un petite septuaire, tantôt à Pentos ou Lys, tantôt à Villevieille ou Port-Real. Elle ferma les yeux, une fois de plus son cœur s’emballait comme un étalon fougueux et elle le revit poser le dragon tricéphale sur ses épaules. Une larme puis mille s’échappèrent de ses yeux azur.

__ Oui, c’est typique des Pentoshis, ils ont les cheveux colorés et aiment les couleurs vives, tout l’inverse des nobles braaviens, en dehors des spadassins et du carnaval, ils ont plutôt des vêtements sombres.


Répondit-elle en regardant encore le pendentif un instant, puis en le rangeant soigneusement entre ses seins. Elle leva alors la tête.

__ Un jour, je t’emmènerais à Lys. Peut-être même à Braavos ou Pentos. J’ai des connaissances là-bas.


Sourit-elle en plongeant son regard dans celui de son amie avant d’évoquer leur vengeance et la réalisation de leurs ambitions. Puis,étant donné que Megalis lui avait posé la question et que le souvenir d’Aegon lui serrait le cœur, elle finit par lui répondre.

__ Il s’appelait Griff le Jeune lorsque je l’ai rencontré.


Elle hocha la tête… Devait-elle lui dire ? Mais puisque l’heure était au confidences et qu’il était mort, pourquoi le lui cacher ?

__ Je n’ai su que bien plus tard qu’il s’agissait d’Aegon Targaryen…


Fit-elle finalement en baissant ses yeux emplis de larmes. Elle avait caché cela près de deux ans à son amie. Et elle avait un peu honte de l’avoir aimé bien avant de savoir qui il était. Mais il était mort, et il avait fallu qu’elle en parle à Megalis pour en prendre pleinement conscience, alors elle se mit à pleurer.

Aelinor était distante avec tout le monde, effectivement parce que les marques d’affection et les contacts physiques tout particulièrement n’étaient pas des choses dignes de son rang. Mais qu’importait à ce moment-là, car Megalis, elle le savait, avait également reçu cette stricte éducation qui les éloignait de leur propre humanité, mais elle était son amie et parfois, pour une amitié sincère, il fallait bousculer les codes. L’immense différence était que, malgré tous les défauts de son père, la brune avait grandi dans une famille aimante où les jeux et même les câlins étaient autorisés, en privé tout le moins.

__ Ce sera avec plaisir, dès que les événements nous le permettront.


Un tel voyage n'était probablement pas compatible avec leurs ambitions présentes et ce qui se tramait à Westeros, quoique ne serait-ce pas le bon moment au contraire, car après, après… Après, soit elles réussissaient et leurs devoirs se feraient immensément plus importants que cette promesse, soit elles échouaient et cette promesse mourrait avec elles. Mais en cet instant la brune ne voulait pas penser à cela, la brune pensait à Aegon et à ce qui avait bien pu lui arriver depuis leur dernier échange de missive.


La réaction de Megalis en entendant son nom de famille était sans équivoque, les Targaryen évoquait pour la blonde la terreur. A juste titre, ce qu’avait fait Daenerys à Port-Real était horrible. Peut-être n’aurait-elle pas dû lui dire, mais elle ne pouvait pas lui mentir, alors elle avait révélé qui il était vraiment, ce jeune homme qui faisait battre son cœur jusque dans la mort.

__ J’imagine, il n’a pas répondu à ma dernière missive et avant celle-là, il ne m’avait pas donné de nouvelles depuis un bon moment.


Ce n’était pas la question qui était difficile à entendre, c’était la réponse qui était dure à formuler. Aelinor l’avait souvent imaginé depuis quelques semaines, se rendant compte, peu à peu, qu’elle attendait un homme duquel elle n’avait plus de nouvelles depuis des lunes, et qu’une vie de mercenaire était faite de dangers que même un roi ne pouvait éviter. Mais le dire tout haut, c’était tout autre chose. Elle ne comprenait pas que pour son amie, se put être un grand soulagement, pour elle, c’était son cœur qui se brisait en mille morceaux. Elle savait pourtant que Megalis avait perdu à cause d’eux, mais n’était-ce pas cependant les Lannister les premiers responsables ?


Pas un instant Aelinor ne songea que Megalis serait si hostile à Aegon, pour elle, les Targaryen étaient et restaient les seuls Rois légitimes de Westeros, tout Westeros, les Sept Couronnes. Si elle pouvait faire des concessions pour son amie, pour que tout se passe sans heurts, il n’en restait pas moins que Robert était un usurpateur et Bran un profiteur dénué d'intérêt réel pour ce royaume. La brune se souvenait surtout que les Hightower avaient souvent été alliés, mariés, main et autres fonctions d’état sous le règne des dragons, et cela avait donné lieu à près de 300 ans d’histoire. Avec le Barathéon, rien de tout ça, ils avaient été relégués au second plan pendant plus de dix ans, mais seulement dix ans, avant que sa femme ne tue tous ses cousins, et Bran ? Bran leur avait collé le pire gouverneur possible, s’il avait voulu les humilier, il ne s’y serait pas pris autrement. Elle était bien consciente que ça n'était pas le but, peut-être seulement une bien mauvaise blague de Tyrion Lannister, qui non content d’avoir une soeur qui avait exterminé la famille régnante, trouvait certainement amusant de se jouer des plus riches et puissantes familles du Royaume en leur collant un plouc comme Suzerain.


Elle avait, finalement, de bonnes raisons de haïr les Lannister, tous, Tyrion compris, de bonnes raisons également, de vouloir le retour du Targaryen, 300 ans d’histoire, certes des guerres, mais aussi de longues périodes de paix et de prospérité. Ceux qui devaient éclairer la voie ne devaient pas oublier le passé, car le passé enseigne à ceux qui savent l’étudier. Comme elle l’avait dit à Alcaerys, même si, pour maintenir la paix et le statut quo dans les Six Couronnes, elle se refusait à mener un conflit, il y en aurait un dès lors que Bran mourrait, une terrifiante guerre de succession, et il y avait fort à parier que cette guerre se nouerai bien avant la mort de l’éclopé. Or, avec tout ce qui se tramait dans ce royaume corrompu, qu’en serait-il des grands noms, qu’en serait-il des traditions qui constituait le ciment de la société, qu’en serait-il de la culture, de la connaissance, de la religion. Tout risquait d’être détruit, absolument tout.

__ Maudit soit le Grand Concile. Maudite soit Lyanna Stark. Maudite soit Cersei. Maudite soit Daenerys. Maudit soit Tyrion, Maudits soient tous ceux qui nous ont menés à ses guerres, à ses morts, à nos pertes…


Fulmina-t-elle entre ses dents.

Aelinor avait-elle déjà songé à fuir toute responsabilité pour vivre d’amour et d’eau fraîche ? Possible. Elle s’était parfois prise à rêver de rejoindre Griff le Jeune avant de connaître son identité, n’avait-elle pas voulu, l’espace d’un instant, épouser Jonas Caron, sachant très bien qu’elle perdrait tout pouvoir à part sur Serena, bien loin de ses ambitions ? Parfois elle songeait que la vie serait bien plus facile si elle était née petite noble ou grande bourgeoise, sans plus de devoir que de faire un mariage correct et d’administrer un petit fief. Mais c’était pour mieux se rendre compte que ce n’était qu'une illusion de liberté que lui offrait une telle vie, car où, finalement, se trouvait la liberté quand on laissait d’autres décider pour nous.

__ J’y ai songé, oui, mais pour quoi ? Pour vivre une vie simple loin des tourments du pouvoir, loin des devoirs qui sont les miens ? Et ensuite ? Laisser les puissants décider pour moi ? Laisser des imbéciles diriger le royaume de mes ancêtres jusqu’à ce qu’il n’en reste plus rien ?


Elle sourit.

__ Et quand mes émeraudes et mes saphirs ne suffiront plus pour payer mes soieries et mes banquets, quand mes oreilles se seront éloignées de la musique, quand les tapis seront usés, quand il n’y aura plus de Treille Auré et de lamproie, que ferais-je donc ? Renoncer à mes responsabilités, c’est aussi renoncer à mes privilèges, et je crains fort de ne pas être faite pour une autre vie que la mienne. En tout cas, je n’ai aucune envie de connaître la faim et le besoin, de toucher du doigt la misère et, je crois, j’aurais infiniment peur si je n’avais plus mes gardes pour veiller sur moi et mon nom pour me protéger.


Mais la question restait entière, si Aegon était mort, plus que jamais. Qui pourrait-elle donc épouser sans avoir l’impression de tomber de son piédestal ? Sans avoir l’impression de perdre bien plus qu’elle ne gagnait. Comme elle l’avait avoué à Lorent, quel manteau pourrait bien prendre place sur ses épaules après la tour dont elle n’ait pas honte ? Où pourrait-elle bien vivre et quel fief pourrait-elle bien administrer qui ne lui laisse pas un arrière goût de petitesse ? Elle avait grandi à Villevieille, l'une des villes les plus peuplées, les plus riches, les plus grandiose de Westeros. La fierté qui accompagnait son glorieux nom auquel on attribuait l’ancien siège de la foi et la citadelle des Mestre n’avait d’égale que son ambition d’un futur plus grandiose encore. Comment pourrait-il en être autrement. Et pourtant les options qui s’offraient à elle était plus que limitées dans ce foutu royaume de pacotilles ou le suzerains étaient tous aussi nuls les uns que les autres et où le roi, en plus d’être u n éclopé ne voulait prendre femme et ne pouvait peut-être même pas enfanter. Le seul seigneur de région qui soit issu d’une lignée digne de ce nom et qui en soit pas encore marié était le faiblard gamin Arryn, d’ailleurs, sa légitimité pourrait très bien être remise en question du fait de l’adultère de Lysa.


Comment, après avoir été partie prenante d’une grande cité portuaire au commerce florissant, pourrait-elle aller se perdre au milieu des montagnes dont le flanc ouest était envahi de sauvages et dont l'isolement la faisait déprimer d’avance. En dehors de ça, un bâtard, un reître grossier et un nain. Elle n’avait pas le choix que de changer l‘ordre en place pour trouver un époux digne d’elle quitte à prendre quelques risques pour mettre Luthor sur le trône de l’Ouest. C’était là certainement sa meilleure option si on y réfléchissait bien. L‘Ouest avait des atouts non négligeables d’un point de vue géostratégique et elle ne serait pas dépaysée par le luxe apporté par l’or des mines. L’autre option était de prendre le contrôle du Sud, comme vu avec Alcéaerys, mais elle n’avait pas le moindre début de plan pour arriver à faire avaler aux Dorniens et aux Orageois qu’une Hightower, femme qui plus est, gouverne les trois contrées. Évidemment des opportunités pouvaient se présenter entre-temps et elle saurait ne pas les manquer. Mais gouverner seule, sans la légitimation d’un mariage, réclamerait probablement bien plus de sang encore que la rébellion qui la mènerait à sa couronne, quelle qu’elle soit. Mais ainsi, si elle n’avait jamais vraiment voulu fuir ses responsabilités, elle avait nourri ses ambitions pour que cette responsabilité ne lui fasse pas se sentir moins que ce pourquoi elle était née.


Aux excuses de son amie, Aelinor posa sa main sur la sienne en signe de pardon, au sanglot trop bruyant, elle la retira et hocha la tête, questionnant la lionne du regard.