[Port-Réal] Une imprudence coûteuse | Estel - Terminé

Pour Aelinor, fonder une famille était une évidence, pour elle, mais aussi pour toute personne qui vivait assez longtemps pour procréer. Sans ce désir profond, sans cette nécessité, peut-être serait-elle entrée dans l’ordre des Septa, sans le devoir, aussi d’apporter à sa maison une alliance fructueuse, devoir qu’elle se devait de remplir avec habileté en tant que fille aînée. Alors aux mots d’Estel, elle ne se posa aucune autre question et se contenta de sourire. Ce n'était pas sa sagesse qu’il transmettrait, mais la sagesse des auteurs de ses livres, la remarque était cependant trop adorable pour qu’elle lui rappelle la vérité.


Elle sourit. Optimiste, oui, on pouvait dire cela ainsi. Elle avait la foi surtout, foi en les Sept, foi en elle, foi en son nom et en ses valeurs. Ainsi comment n’aurait-elle pas foi en l’humanité dès lors qu’elle était guidée par celle qui éclairait la voie. Le peuple avait besoin d’un berger, et ce royaume avait besoin d’un souverain digne de ce nom, mais ça n’était pas le sujet.

__ Merci. Mais je n’avais aucune raison de ne pas l’être, surtout après avoir mis votre vie en danger.


La brune aux yeux céruléens s’en voulait toujours d’avoir ainsi galopé dans les rues étroites de la capitale, ce n’était pas un endroit pour foncer à bride abattu, surtout à cause d’une énième crise d’angoisse incontrôlée. Plus elle se remémorait la scène, plus elle se disait qu’elle avait été terriblement imprudente, non pour elle, mais pour les autres. Les habitants de Port-Real avaient déjà payé si cher la guerre de Cersei Lannister et le saccage de la ville par Daenerys. Elle aurait pu renverser un enfant, d’ailleurs, si elle n’avait pas ralenti pour tourner dans cette ruelle, elle aurait bien pu tuer Estel. Les signes du choc s’estompaient heureusement, et elle était presque certaine qu’il irait bien, mais que cela lui serve de leçon, elle ne devait pas recommencer une telle folie. Elle avait bien compris qu’il ne servait à rien de dire au jeune homme qu’elle était seule fautive et qu’elle lui devait bien ça, mais elle le pensait néanmoins et prendrait soin de lui jusqu’à être certaine qu’il s’en sorte indemne.

__ Où devons-nous l’envoyer ?


Demanda la Hightower en prenant le parchemin et en le pliant soigneusement pour en cacher le contenu sans le lire. Elle tendit la missive à l’un de ses hommes pour qu’il suive les instructions d’Estel, puis elle s’installa sur le lit avec l'Étoile à sept Branches et commença à lire un de ses passages préférés. Elle le connaissait manifestement par cœur ou presque.

__ Ne vous y trompez pas, mes frères et sœurs bien-aimés : tout bienfait et tout don parfait viennent d'en haut ; ils descendent du Père des lumières, en qui il n'y a ni changement ni l’ombre d’une variation. Ainsi donc, mes frères et sœurs bien-aimés, que chacun soit prompt à écouter, lent à parler, lent à se mettre en colère, car la colère de l'homme n'accomplit pas la justice des Sept.


Il y avait quelque chose de reposant et de rassurant dans la façon dont Estel la regardait. Elle ne saurait exactement dire ce qui différait des autres hommes, elle ne saurait définir précisément pourquoi elle avait cette douce impression qu’elle n’était pas, pour lui, une chose qu’il voulait s’accaparer. Mais c’est ce qu’elle ressentait. Et c’était rare et précieux de pouvoir faire confiance à un homme étranger à sa maisonnée. La plupart le regardait comme un bout de viande, et si elle en jouait, si elle usait et abusait de ses charmes pour arriver à ses fins, elle n'appréciait pas pour autant ce qu’elle voyait dans leurs yeux. Elle avait tôt fait de comprendre que son physique avantageux était un atout à ne pas négliger et qu’hélas, son esprit n'intéressait pas grand monde, alors elle jouait le jeu. Avec lui, c'était tout l’inverse, il semblait apprécier davantage son esprit que son décolleté et elle appréciait grandement ce qu’elle apercevait dans ses regards.