[BRAAVOS] “ Tears are not a woman's only weapon ” ❃ Myria

Il ne fallait pas se leurrer. En dépit de sa tolérance et de son ouverture d'esprit revendiquées, Braavos n'en demeurait pas moins être une Cité encore bien régit par des règles transcendants le temps et les frontières. Parmi elles, il y avait toutes celles qui avaient attrait, ne serait-ce qu'un peu, aux principes du patriarcat et à ses relents de misogynie et de sexisme. Si certaines femmes, en ces lieux, pouvaient faire entendre leur voix, leurs arguments et leurs opinions, cela n'était jamais que le résultat d'intenses combats et d'efforts consentis et se devant d'être souvent renouvelés. D'une certaine façon, Nesaleah, à ce sujet, se savait relativement épargnée, bien que consciente qu'elle devait sa chance à qui était sa mère. Neserah était née Otherys, dans cette Famille plus que réputée pour ses courtisanes et l'intellect de ses femmes. Cette dernière avait alors sans doute voulu inculquer ces soupçons d'éducation là auprès de ses filles, et ce dès leur plus jeune âge. À moins que pour Nesa', cela n'est surtout à voir avec le fait qu'elle était la sœur jumelle de Rhysand, que tous deux partageaient cette relation si particulière et si intense, et que jamais ô grand jamais il n'aurait laissé qui que ce soit mal la traiter et mal la considérer, même si ces personnes se trouvaient être leurs parents. Pour ainsi dire, la jeune femme ne s'était jamais réellement attardée à savoir expliquer cette différence de traitement qu'elle recevait par rapport à bon nombre d'autres jeunes femmes aristocrates. Il lui importait surtout de pouvoir jouir de ces libertés et de ces prérogatives là, sans perdre son temps à vouloir les décortiquer plutôt que de les exploiter à leur avantage ainsi qu'au propre sien. Quoi qu'il en était, c'était sans doute là l'un des grands points expliquant pourquoi elle n'était toujours pas mariée aujourd'hui, en dépit du fait qu'elle représentait un excellent potentiel d'alliance et que la réputation de sa beauté et de son esprit n'était plus à faire. Sur ce terrain, elle ne se sentait ni brimée ni réprimandée par les siens, qui devaient tout de même être bien aise de pouvoir profiter de ses capacités et de ses compétences pour contribuer à développer la richesse et le prestige de leur Famille.

Toutefois, n'ignorant pas qu'il était loin d'en être de même hors du foyer des Tours Ombreuses, la jeune femme ne pouvait s'empêcher d'éprouver de la pitié pour toutes celles qui, du même rang qu'elle, ne partageaient pas son sort enviable. Mais elle n'éprouvait tout de même pas vraiment de compassion à leur égard, à quelques exceptions près. Et elle ne manquait pas d'approuver celles qui se rebellaient ou cherchaient au moins à se faire entendre, à plus d'une reprise, dès que les choses leur étaient présentées comme actées alors qu'elles n'avaient pas été consultées ou que leur avis n'avait été que purement informatif. Dès lors, son regard sur sa cousine Myria ne manquait pas de fierté. Si cette dernière portait le patronyme des Antaryon, Nesa' n'oubliait pas que, de par sa mère, elle était Prestayn, tout comme elle. Elle non plus n'était toujours pas mariée, mais l'aînée des deux cousines n'était pas sans savoir que les choses avaient tourné ainsi pour elle aussi sous sa propre impulsion, et non parce que ses parents, et surtout son père, lui avait laissé la bride libre. Belicho n'était pas un homme que Nesaleah portait haut dans son cœur, là où elle ne manquait tout de même pas de lui reconnaître un grand nombre de qualités. Malheureusement pour lui, l'ouverture d'esprit et le dialogue serein et à équité avec ses enfants n'en faisaient pas partie ... Quoi qu'au final, ceux qui en pâtissaient étaient surtout ses enfants, et non point lui, quoi que son arrogance et ses ambitions devaient lui faire avaler sec les choses ... Il était en tout cas toujours plaisant pour Nesa' de passer du temps avec la cadette de ses cousines Antaryon, d'autant plus parce qu'elle s'entendait mieux avec Myria qu'avec Berea, quoi qu'il n'existait pas non plus de détestation entre les filles aînées des deux patriarches. C'était juste différent, sans pouvoir être comparé avec la relation qu'entretenaient les deux héritiers des deux Familles.

Myria, justement, était de retour à Braavos depuis quelques semaines déjà. Nesaleah en avait été informée presque à l'instant où sa cousine avait reposé pieds à terre, les deux ports de la Cité étant truffés de marins, de débardeurs et autres corps de métier à la solde des Prestayn. Mais elle n'avait pour ainsi dire même pas eu à forcer de retrouvailles entre elles, car Myria l'avait faite informée de son envie de la voir et de passer du temps avec elle. La jeune femme ne s'y était pas refusée, loin de là, même, bien qu'elle se soit gardée d'en toucher réellement un mot à son frère, ne souhaitant pas l'entendre persifler sur les Antaryon avant même de savoir ce dont leur cousine souhaitait lui parler. Confier Nileah n'était pas chose aisée, car cela lui faisait toujours un pincement au cœur, mais Nesa' ne manquait nullement de confiance en sa mère ou en sa sœur pour veiller à ce que sa fille ne manque de rien en son absence, qu'elle soit bien traitée et que l'on prenne soin d'elle. Mais il y avait des choses auxquelles le cœur d'une mère ne pouvait rester insensible. Les choses étaient malgré tout atténuer de par le fait que la jeune femme ne serait absente que quelques heures tout au plus, qu'elle ne quittait pas Braavos et qu'elle laissait sa fille aux bons soins des femmes Prestayn, au sein des Tours Ombreuses, pour passer du temps avec une autre femme qu'elle appréciait. Comme un petit acte de défi et de taquinerie envers son frère jumeau, Nesa' n'avait pas cherché à aller à la rencontre de sa cousine en dehors des murs des Quintes Tours, là où elles auraient pourtant eu le loisir et la possibilité de passer du temps ensemble chez les Prestayn ou même dans un lieu public et bien plus neutre. Mais aux dernières nouvelles, il n'était tout de même pas défendu à la jeune femme de se rendre chez ses cousins, surtout lorsqu'elle y était invitée. Une façon comme une autre de prouver n'avoir aucun complexe et aucune crainte. Habillée et coiffée de façon à se mettre en valeur, cela résidait plus de l'habitude que de l'envie d'en mettre plein les yeux à sa cousine : aucune rivalité n'existait entre elles sur ce plan là, et puis, c'était une marque de respect que de ne pas arriver débraillée et échevelée. Debout au milieu du hall d'entrée, la jeune femme époussetait donc sa tenue, plus par réflexe que nécessité, après avoir demandé à ce qu'on informe Myria qu'elle venait d'arriver. Songeuse quant à ce que sa cousine avait bien à lui dire, elle ne manquait pas non plus d'observer les environs, un petit sourire arqué au coin des lèvres alors qu'elle ne pouvait s'empêcher de comparer le domicile des Antaryon au propre sien.

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En affaires, il était plus qu'essentiel de ne pas se focaliser uniquement sur soi-même et d'accepter de tisser liens et échanges avec l'extérieur. Que cela soit sur le plan national ou bien encore sur le plan international. Si Nesaleah laissait les rênes en cette matière à son père comme à son frère, elle n'était pas sans contribuer, à sa façon et à sa portée, au développement et à la prospérité des affaires Prestayn. Elle savait agir en ce sens, non sans savoir montrer à quel point son propre arsenal était plus que bien achalandé. Dans ce contexte, elle se gardait bien de s'enfermer dans sa tour d'airain, ou plutôt à l'intérieur des Tours Ombreuses, et elle savait, au besoin, se rendre dans les différents évènements mondains organisés par l'aristocratie et les hautes Familles de Braavos. Ce genre d'évènements se tenant de façon assez régulière, cela permettait de garder l’œil les uns sur les autres, chacun étant bien conscient que tous se devaient plus ou moins de jouer au même jeu. À défaut de toujours y passer un bon moment et de ne pas quelque peu se lasser de ce jeu de dupe, au moins nourriture et boissons y étaient-ils le plus souvent exquis, là où on pouvait toujours se trouver de la compagnie pour médire dans son coin ou pour se lancer dans quelques commentaires en direct des différentes pirouettes sociétales et verbales auxquelles se livraient les autres convives. Les Prestayn avaient beau avoir une haute idée d'eux-même et, sans aucun doute, attirer eux-même médisance, convoitise et jalousie, il n'en demeurait pas moins que personne ne les fuyait ou se refusait à automatiquement passer du temps en leur présence. Ou peut-être la jeune femme percevait-elle les choses ainsi pour la simple et bonne raison que l'on trouvait toujours un membre de la Famille Otherys dans le coin dans ce genre d'instants, et puisqu'elle leur était liée de par sa mère ...

Mais il n'était pas question de grand decorum ou d'un instant officiel au sein duquel il allait falloir trouver à s'occuper pour ne pas se mettre à bailler. Car en ces lieux, dans ce grand hall du domaine des Antaryon, Nesaleah s’apprêtait à retrouver sa cousine Myria. Et ça, ça changeait tout. D'ailleurs, la voilà qui arrivait, la rejoignant au pas de course en descendant les marches. Une démarche que la jeune femme n'aurait elle-même pas adopté si les positions avaient été inversées, non pas par manque d'entrain quant à pouvoir serrer sa cousine dans ses bras, mais parce qu'elle ne savait se départir de sa méfiance quant à trop se précipiter dès lors qu'il y avait des marches dans l'équation. Mais sa cousine n'était pas faîte du même bois qu'elle, et elle avait sans doute bien plus l'habitude des péripéties si l'on se souvenait du fait qu'elle savait plus qu'y faire sur un bateau, elle. Quelque peu surprise par son entrain, elle lui rendit tout de même son étreinte et son baiser avec un joli sourire aux lèvres, non sans manquer de rapidement la détailler du regard, constatant, une fois de plus, à quel point elle tenait bien plus des Antaryon que des Prestayn, sans que cela n'enlève rien de ses charmes. “ Et bien moi aussi je suis ravie de te voir Myria ! ” Cela l'amusa de se rendre une nouvelle fois compte du fait que si son oncle et sa tante avaient pu vouloir s'évertuer à faire de leur plus jeune fille un modèle de jeune femme issue de l'aristocratie braavienne, ils n'avaient pu aller entièrement à contresens de celle qu'elle était profondément.

On pouvait en attendre beaucoup de vous dès lors que vous naissiez au sein du berceau de l'aristocratie, surtout lorsque vous vous trouviez être une femme. Mais sans qu'à Braavos, les filles étaient plus difficiles à mater et à dompter qu'ailleurs, baignant et évoluant depuis leur enfance dans des eaux peuplées de tolérance, d'ouverture d'esprit et de grands idéaux brocardant bien haut le fait de défendre en premier lieu la liberté. Sans parler de cette ouverture sur le monde et de cet appel du commerce tout autant que du grand large qui battait dans les veines des enfants de la Cité. Cela s'illustrait de façon différente et à des degrés variables chez chacun, mais on ne pouvait nier qu'il y avait définitivement quelque chose de particulier à Braavos. Et Nesa' était bien contente d'avoir une cousine qui avait su s'imposer pour rester heureuse et épanouie, plutôt qu'une petite souris qui ne savait ni ou se mettre ni comment se comporter. Et puis, si cela pouvait créer quelques cheveux blancs supplémentaires dans la chevelure de son oncle Belicho, sans que cela n'ait pour le coup rien à voir avec ses ascendances valyriennes ... Elle était loin d'être contre ! “ Et bien allons-y, je te suis ! Je ne me refuserais jamais à passer du temps avec toi alors que tu viens tout juste de rentrer à Braavos. ” Et puis si cela lui permettait de faire d'une pierre deux coups en passant un agréable moment avec une personne qu'elle appréciait tout en pouvant laisser traîner ses oreilles si jamais elle pouvait attraper au vol quelque information intéressante concernant les affaires des Antaryon ...

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Nesaleah ne se se sentait nullement impressionnée par la demeure de ses cousins Antaryon. En de tels lieux, elle se sentait à sa place et ne sentait peser sur ses épaules aucune autorité supérieure à celle qu'elle ressentait lorsqu'elle était chez elle, au sein des Tours Ombreuses. Nul émerveillement dans ces lieux, donc, car elle était de ce même monde, et était issue de ce même moule, celui de la haute-aristocratie de Braavos, qui se trouvait, pour sa part comme pour celle de sa cousine, être également celui des Capitaines-Marchands braaviens. Toutefois, cela ne signifiait en rien qu'elle se montrait critique face à l'intérieur des Quintes Tours. Cela aurait été de la mauvaise foi que de se refuser à voir la beauté et la grâce des lieux, et si elle ne manquait pas de mauvaise foi, elle préférait ne pas la dépenser dans des domaines stériles et puérils. Oui, cela pouvait être fort étonnant pour les mauvaises langues qui persiflaient sur son compte, mais c'était ainsi. Dans le même temps ... Dans le même temps, Nesa' restait une Prestayn, et discrètement, alors que ce fut plus fort qu'elle, elle ne put s'empêcher de tirer la langue face à quelques uns des portraits représentants les ancêtres Antaryon de sa cousine. Ce n'était peut-être pas de bon ton, mais dans les faits, il n'y avait pas mort d'homme, et ce n'était tout de même pas comme si elle avait décidé de sortir un crayon de khôl de son décolleté pour affubler l'une des peintures de belles moustaches noires et grasses ! Et puis, elle avait veillé à ce que Myria ne la voit pas, ou en tout cas elle l'espérait, alors elle n'en serait pas sermonné et un tel acte bravache n'aurait aucune conséquence. Et puis, s'il était puéril de tirer la langue, cela ne l'enlaidissait personnellement en rien. Elle avait une belle petite langue, Nesaleah, et l'ourlet de ses lèvres ne se trouvait en rien déformé à outrance par ce petit tirage de langue.

Finalement, Myria les avait menées vers ses appartements privés, dont Nesa' était déjà familière, mais cela ne l'empêcha pas d'y jeter un coup d’œil circulaire. Comme pour s'assurer, instinctivement, peut-être, qu'il n'était pas venu à l'idée de son oncle et de sa tante de tout y changer en profitant de l'absence de leur fille. Mais, visiblement, ils ne s'étaient pas abaissés à une telle mesquinerie. La jeune femme s'en sentit tout à la fois rassurée pour sa cousine et déçue, car cela lui retirait un motif de critiquer Belicho. Tant pis, ce serait pour une prochaine fois, en une autre occasion. À l'invitation de Myria, la Prestayn s'installa donc, non sans veiller à ce que sa tenue ne fasse aucun pli, sans même s'en rendre compte, geste réflexe s'il en était, hérité de l'habitude et de la force de la répétition. Restant un instant hésitante quant à quoi choisir parmi les boissons que lui proposait sa cousine, elle arqua finalement un petit sourire. “ Je ne dirais pas non à de la liqueur braavienne. J'ai beau trouvé nombre de défauts à ton père, mais son bon goût pour les liqueurs n'en fait pas partie. ” Encore une fois, elle savait que les occasions ne lui manqueraient jamais d'envoyer des piques à l'homme que sa tante avait fait le choix préoccupant d'épouser, et la jeune femme se refusait de gaspiller ses coups d'estoc pour rien. En tout cas, elle offrit un large sourire heureux, jovial et amical à Myria, non sans se saisir de l'une de ses mains pour les porter à ses lèvres. “ Moi aussi tu m'as manqué ! Quelle étrange idée de partir si longtemps loin de Braavos ! Les hommes Prestayn ont beau m'y avoir habituée, ce n'est pas pour autant que j'en suis à chaque fois joyeuse. Et voilà que toi aussi tu t'y est mise ... Si triste. ” Une lueur mutine éclairait son regard, faisant quelque peu danser les reflets améthystes qu'on pouvait parfois y déceler. “ Hmm, que pourrais-je bien te dire concernant les Tours Ombreuses ? ... La vie y est toujours douce et prospère, et je me refuse toujours à en partir, y ayant tout ce que je désire ! ” Elle avait la chance de n'avoir qu'à se baisser pour ramasser tous les délicieux fruits de la vie qu'elle voudrait avoir dans son existence, alors, à partir de là ...

Les Tours Ombreuses étaient le berceau de l'affection familiale, de l'amour charnel et sentimental, et de l'amour filial, aussi. C'était ici que vivaient Rhysand et Nileah, alors, à partit de là, hors de question pour elle de changer de cap quant à aller voir ses parents pour leur demander de lui trouver un époux qui l'emmènerait dans sa propre demeure ! “ Les affaires familiales sont toujours florissantes et continuent de prospérer, je continue d'y prendre part, à mon échelle, et les tiens ne sont pas encore prêts de nous surpasser. ” Nesaleah savait combien Myria n'était pas l'Antaryon la plus à même de prendre part aux petits conflits interfamiliaux, mais elle n'en ignorait quand même rien. Et puis, la Prestayn plaisantait, ne se faisant pas incisive ni injurieuse. Elle était égale à elle-même, la même cousine que Myria ne manquait visiblement pas d'apprécier.

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On pouvait reprocher bien des choses à Nesaleah, et le fait d'être des plus patriotiques étaient l'une d'entre elles. À moins qu'il n'y ait dans le fond rien de répréhensible ni de bien fâcheux là-dedans, puisque cela ne faisait pas pour autant d'elle une vile xénophobe. Pas plus que cela ne lui avait fait développer un sentiment de supériorité. Enfin, si, mais pas pour des raisons liées à Braavos et au reste du monde en particulier. Pour autant ... Pour autant, elle savait très bien, malgré sa mauvaise foi, qu'elle observait sans doute un peu trop les choses de Braavos avec les yeux de l'amour, en ne se permettant pas vraiment de donner d'emblée la chance à quoi que ce soit qui n'en émane pas. Cela fonctionnait tout autant pour la nourriture que pour la culture. Alors même qu'elle n'avait que rarement mis les pieds hors de la Cité libre. Mais, enfin, bon, on ne pouvait quand même pas estimer qu'elle était sans cesse en tord. Prenez la fameuse liqueur de Braavos, celle-là même dont elle avait fait le choix parmi les propositions que lui avaient adressées sa cousine. Et bien il ne s'agissait en rien d'une vulgaire piquette ou d'un alcool de bas marché, loin de là ! Rien qu'en y portant les lèvres, sur le rebord de ce verre que venait lui servir Myria, et bien elle se félicitait de sa décision ! Bien qu'elle n'avait pas besoin de ça pour se délier la langue quant aux petites questions que lui offrait sa cousine. Il existait certaines choses que Nesa' était loin d'être encline à partager avec sa parente, mais il en existait également de très nombreuses pour lesquelles aucun souci de confidentialité ne s'érigeait entre elles. Et puis, qu'elles en viennent à n'avoir rien d'autre qu'à se dire que des banalités, par tous les dieux, quelle perspective plus que rebutante !

Non, fort heureusement, une telle situation ne semblait pas du tout sur le point de s'annoncer. Pas plus que maintenant que hier. Et elle l'espérait, pas plus que demain. “ C'est une vision que je peux comprendre, et qui te sied totalement, je dois bien l'avouer. Mais je n'ai personnellement jamais ressenti les choses ainsi. Enfin, presque. ” Il y avait bien eu ces années durant lesquelles, porté disparu et jugé mort par un grand nombre de personnes, Rhysand avait fait retomber sur ses épaules une charge dont elle se serait bien passée, et qui lui avait coupé le souffle. Même si, en regardant en arrière, aujourd'hui, la jeune femme estimait que tout ce qu'elle avait pu ressentir et qui était venu perturber son quotidien était en grande partie plutôt dû à l'absence de son jumeau dans sa vie que par rapport à tout ce qui en avait découlé. C'était en tout cas là un sujet sur lequel elle ne s'étalait pas et qu'elle ne daignait même pas verbaliser. Elle préféra ne pas s'y attarder, alors qu'un sourire malicieux naquit au coin de ses lèvres. “ Tu sais que je pourrais presque tenir un recensement, un peu comme une liste de bal, avec toutes les propositions qui me sont faîtes de m'emmener voguer vers des eaux étrangères ? Mais la tienne figurera dans le haut de la nase, je puis t'en assurer. ” Il était évident que Rhysand squattait la tête de liste, et que nul ne pouvait l'en déloger, mais Myria figurait elle aussi en très bonne place ! Entrechoquant finalement avec grâce son verre contre celui de sa cousine, elle trinqua avec elle, là où ses yeux pétillèrent à leur tour d'une certaine malice. “ Le trône de Braavos, rien que ça ? Continuons ainsi et bientôt, nos Familles seront accusées de vouloir faire main basse sur le pouvoir, non sans renverser l'ordre établi. Une perspective qui titille tout de même mon imagination. ” Surtout parce qu'elle était totalement improbable ! ... N'est-ce pas ? Observant, amusée, sa cousine goûter aux effets de la liqueur, elle but à son tour, pour la seconde fois, cependant, la concernant.

Ce n'était pas que, pour elle, cela ne produisait aucune réaction, mais elle n'était plus une jouvencelle face à ses premiers émois liquoreux. Pour ainsi dire, elle avait eu sa première expérience en la matière en dérobant l'un des verres de leur grand-père Prestayn, quand elle était encore enfant, coupant l'herbe sous le pied de Rhysand et Nymeros qui avaient eu l'idée en premier mais qui s'étaient perdus dans des joutes verbales censées savoir qui des deux auraient la primeur. Qui va à la chasse perd sa place, ou quelque chose comme ça ! Se laissant resservir sans se faire prier, elle demeurait attentive à ce que l'alcool ne prenne pas le pas sur sa maîtrise, parce qu'elle ne voulait pas laisser penser à sa cousine qu'elle était si barbante qu'il fallait se saouler pour la supporter. Et elle ne voulait pas non plus ne plus se rappeler de ce dont elles avaient parlé, surtout si le sujet "Belicho Antaryon" était de la partie. Cependant, elle ne put s'empêcher de faire la moue en entendant le sujet évoqué. Son oncle était loin de marquer des points dans son estime, lui qui s'y trouvait déjà en déficit ... “ J'aimerais te dire que je suis fort étonnée, mais ... ” Mais elle se mordit presque la langue pour ne pas d'emblée lui exposer le fond de sa pensée concernant ce cher Belicho ... “ Je ne comprends pas l'obsession de tes parents à ce sujet. Tes horizons ne sont en rien bouchés, tu n'as pas besoin qu'on fasse de toi une épouse pour te trouver un rôle à jouer, et de toute façon, personne ne mérite ta main à Braavos. ” Pas plus que quiconque ne méritait la sienne, celle de son frère, de sa sœur, ou du moindre de ses cousins, tout Antaryon que ces derniers pouvaient être ! “ Aucun mari à l'horizon me concernant, et je dois dire que si mes parents ont des vues sur le sujet, ils ne m'en ont plus jamais fais part depuis ... En fait, je ne sais même plus trop quel Fregar mes parents avaient évoqué à l'instant où Mère a tenté de me parler de mariage. Tormo lui-même, peut-être ? Enfin, bon, cela n'a pas d'importance. C'était il y a déjà 10 ans, et ce fut sans conséquences. ” Quant à avoir des amants ... C'était là un secret, ou plutôt un mystère que la jeune femme prenait plaisir à entretenir. Observant les réactions de Myria, un petit rire lui échappa. “ Quoi, que t'arrive-t-il ? Mon khôl a coulé, ou quelque chose comme ça ? ” Ce serait fort fâcheux, avouons le !

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