[PORT REAL] L'angoisse pour une amie

Bien que satisfaite du verdict, Aelinor était loin d’être ravie de ce procès et à dire vrai, elle Desmera à la barre, elle aurait préféré la tenir éloignée de cette histoire, mais Bronn ne lui avait pas laissé le choix. Toute sa défense reposait sur le fait qu’il n’avait aucune éducation, sérieusement, comment cela pouvait-il constituer une défense audible. Et puis cela n’excusait pas tout, la loi de l’hôte et le respect le plus basique n'était pas qu'une question de noblesse. Bref, la brune aux yeux céruléens était furibonde et elle essaya de faire passer sa colère en lisant quelques traités de droit dans la bibliothèque du Donjon Rouge. Le procès était certes terminé, mais elle n’avait pas dit son dernier mot quant à la loi, cela l’insupportait qu’un homme qui ne remplissait pas ses devoirs s’en sorte à si bon compte. Les lois étaient pourtant claires, mais il fallait voir par quel genre d'énergumène ce royaume était dirigé ! Un parricide ! Évidemment qu’avec de tels antécédents Tyrion ne souhaitait pas voir la loi triompher, s’il devait un jour répondre de ses actes, il serait condamné à mort. Mais ça, tout le monde s’en fichait. Tout le monde sauf elle évidemment. Elle s’était gardée d’en faire part au procès, s’attirer les foudres du juge en l’attaquant personnellement n'était pas une bonne idée, mais elle n’en pensait pas moins. Elle cherchait un moyen légal de faire les faire tomber tous les deux, mais vue leurs positions et leur, leur quoi d’ailleurs, leur notoriété, leur popularité. Oui c'était cela ils étaient populaires, des petits merdeux populaires. Les gens admiraient ces deux zigottos imbus de leur personne et irrespectueux. Elle ne pouvait pas comprendre comment ils pouvaient être ainsi appréciés. Il faudrait qu’elle étudie cette question également.


Après l’avoir cherchée un moment, Sarah entra dans la grande pièce remplie de bibliothèques et finit par apercevoir la Hightower. Elle s’approcha et l’informa à voix basse de l’état de Lady Redwyne. Il n’y avait personne d’autre cela dit, les gens étaient trop occupés à cracher sur la véritable noblesse pour se complaire dans la médiocrité des deux connards, à cancaner et à commenter le procès autour d’une bière. Aelinor se tourna vers Sarah, son visage était fermé, glacial, la colère et le mépris se lisait sur ses traits. Et puis merde, que poivait-elle bien faire pour Desmera qui vomissait tripes et boyaux après cette mascarade !

__ Pourquoi n’appelez-vous pas le Mestre ?


La servante expliqua que la Redwyne refusait d’en voir un pour éviter les ragots. Alors, poussée par la culpabilité et sachant qu’elle pouvait aider, Aelinor se leva, rangea soigneusement les livres qu’elle était en train de consulter et se rendit à ses appartements pour prendre ses herbes et ses remèdes. Elle arriva bientôt dans les appartements de son amie avec tout cela, toujours vêtue de la robe qu’elle portait au procès quelques heures plus tôt et se fit annoncer.

__ Ne fais pas semblant Desmera, tu as une mine de déterrée.


Fit a jouvencelle, à peine entrée, en apercevant le sourire de la rouquine. Elle posa sur la table le petit coffre en bois marqueté avec des inserts dorés qu’elle avait apporté.

__ Déjà, ne t’inquiètes pas, tout ira bien.


Elle ne parla pas des deux possibilités qu’elle avait de faire tuer Bronn, le Donjon Rouge n’était pas suffisamment sûr pour cela. Mais son petit sourire en coin en disait aussi long que son regard espiègle.

__ En plus j’ai obtenu que ton mariage avec Humfrey ne souffre pas des sautes d’humeur de l’autre connard.


Souffla-t-elle.

__ Pardonnes mon langage, je suis… fâchée.


Du coffre elle sortit plusieurs fioles et bocaux remplis d’herbes et d'onguents, de liquides odorants et d’autres substances étranges.

__ On va soigner ça.

__ Je ne suis pas inquiète, je vais te soigner. Mais intoxication alimentaire ou pas, cela fait trop longtemps que tu es malade et si ça continue, ça finira par te tuer. Or, non seulement mon cher oncle ne mérite pas de perdre sa dulcinée, mais surtout, la Treille à besoin de toi. Et en forme avec ça.


Dit Aelinor en dardant son regard azur sur la rouquine avec un air sévère avant de lui sourire. Elle n’était pas dupe de la raison de ces malaises, même si elle ignorait encore leur raison, et puis après tout les intoxications alimentaire pouvaient tuer, surtout les personnes déjà affaiblies par d’autres problèmes de santé, et Desmera cumulait. Elle l’avait bien vu au procès, et avant à Villevieille, Desmera était angoissée, elle dormait mal, elle était aussi pâle qu’un cadavre et à présent elle avait des nausées. En d'autres termes, cela faisait plusieurs semaines, voir lunes que son corps appelait à l’aide et la brune comptait bien répondre à cet appel. Et puisque, semblait-il, la Redwyne essayait de l'ignorer, elle voulait aussi lui faire prendre conscience que sa santé ne concernait pas seulement elle, peut-être ainsi se déciderait-elle à en prendre soin. En la voyant resserrer le châle autour de ses épaules, Aelinor dit :

__ Sarah, allumes un feu je te prie.


Aelinor était en train de déballer ses petites fioles quand Desmera lui dit qu’elle n’était pas inquiète. Une fois encore, la brune posa ses yeux de glace sur son amie qui, manifestement, la prenait pour une idiote ou était totalement idiote, car vu son état, il y avait de quoi s’inquiéter. Elle soupira bruyamment. Mais elle retrouva le sourire quand la Redwyne vomit dans une cuvette, ne s'offusquant ni du spectacle, ni même des mensonges de son amie. La jouvencelle s’en saisit immédiatement pour en observer le contenu. De la bile…

__ Depuis combien de temps tu n’as rien avalé ?


Fit-elle en s’approchant de Desmera et en commençant à l’ausculter avec autorité. Elle observa la couleur de sa peau et du blanc de ses yeux, prit son pouls et sa température.

__ J’ai peut-être l’air d'une petite chose fragile Desmera, mais il n’en est rien, que ce soit le spectacle de te voir ainsi malade ou le procès, je m’en remettrais et… Je n’ai jamais été véritablement en danger, j’avais la possibilité de m’enfuir si besoin. En plus, les Sept veillent sur moi.


Elle offrit un grand sourire et un clin d’œil à son amie, les attaques de Bronn n’avait même pas touché Aelinor, peut-être avaient-elles convaincues certaines personnes dans l’assemblée, mais elles seraient bientôt oubliées, elle en était persuadée, et seuls les faits resteraient et les faits étaient que la Nera ne remplissait pas ses devoirs de Suzerain. Elle avait cependant du mal à comprendre que les gens soient aussi naïfs et se laisse avoir par les paroles d’un tel homme, mais elle s’en fichait pas mal, elle se plaçait, de fait, bien au-dessus de cela. En d'autres termes, elle n'avait absolument pas le même ressenti que la majorité des gens, évidemment elle était fâchée que Bronn l'ait traité ainsi et que Tyrion ainsi qu'Ulwyck soient tombé dans le piège, fâchée également d'avoir fait quelques erreurs chronologiques dans lesquels ce connard s'était engouffré pour la faire passer pour une folle. Fâchée que se soient les mensonges du paysan qui aient fait mouches plutôt que la vérité. Pour elle, ce n'étaient que des détails de rien du tout et la vérité avait malgré tout triomphé lors du verdict, alors elle n'avait que faire de ce que pouvaient penser trois pelés et deux tondus ignares ainsi qu'un reître lui même totalement débile et dénué de tout sens politique. De plus, elle avait récupérer les fiefs et fait en sorte que Bronn ne puisse plus emmerder la Maison Hightower et cela importait plus que quelques insultes, c'était même une conditions indispensable à la suite de sa stratégie. Or sa stratégie se souciait peu des petites piques ridicules lancées lors d'un procès qui serait bientôt oublié. Elle haussa donc les épaules à la question de la rouquine

__ Si, c’est grave Desmera. et tu as de la chance que je connaisse les plantes sans quoi j’aurais appelé le Mestre. Est-ce que tu arrives à boire ?


Aelinor serra la main de Desmera à son tour.

__ Je vais bien. Mieux que toi en tout cas. Il faudrait que tu te mettes en chemise et que tu t’allonges pour que je puisse tâter ton ventre.

__ Desmera, Humfrey t’aime, vous êtes fiancés, son rôle est de s’inquiéter pour toi et de prendre soin de toi. Tu devrais lui dire, il n'apprécierait pas que tu lui aies caché ton état. Je ne doute pas que tu seras bien mieux chez toi, mais le voyage sera long et tu ne peux pas l’entreprendre en étant aussi faible. C’est dangereux. Et puis entre nous, crois-tu vraiment qu’Humfrey, qui va voyager avec toi, ne va s'apercevoir de rien ?


Aelinor fit une grimace à la rousse jouvencelle, une grimace qui voulait dire qu’Humfrey ne serait pas dupe. Lorsque Desmera accusa le flan aux carottes, la Hightower leva un sourcil. Elle posa ensuite un doigt sur son menton en se demandant comment un flan aux carottes pouvait bien rendre quelqu’un malade. Encore s’il avait été servi dans une vieille taverne crasseuse, admettons, quoi que c’était loin d’être un plat risqué vue la cuisson. Mais là, il était servi par les cuisines du Donjon Rouge…

__ Du poison ?!


Fit-elle avec un regard plein de stupeur en se précipitant vers son amie pour lui ecarrquiller les yeux afin d’en mieux voir le blanc.

__ Tire la langue ?


Rien. Elle eut beau regarder Desmera sous toutes les coutures, ses gencives, ses ongles et ses doigts, aucune trace d’empoisonnement.

__ Tu as bu quoi ? Tes selles, elles sont molles ? De quelle couleur ? Et ton urine ?


C’est pleine d’angoisse qu’Aelinor essayait de déterminer quel poison avait été utilisé et comment il avait été administré. Mais après que la rouquine lui révéla que non, elle n’avait en rien l’air d’une petite chose fragile, ce qui lui arracha un sourire en coin, elle se mit à rougir violemment à l’évocation d’Essos. Ce n’était pas Essos qui lui manquait. Mais à cette idée, elle se sentit tout chose et se perdit un instant dans ses pensées, ce qui n’arrangea en rien la couleur de ses joues. Elle tâche de se concentrer à nouveau quand Desmera lui répondit.

__ Tu dois boire, ce que tu préfères, tout ce qui passe. Du bouillon avec des vermicelles serait idéal. Sarah ? Pourrais tu demander en cuisine de faire monter du bouillon je te prie, tu le goûteras pour voir s’il te rend malade également, mais finalement, je ne pense pas qu’il s’agisse d’un empoisonnement.


Rassura-t-elle Sarah, en même temps que son amie et elle-même. Peut-être surtout elle même car elle s’était fait une sacré frayeur en listant dans sa tête tous les poisons, et elle en connaissait beaucoup, qui auraient pu expliquer l’état de Desmera et un tout particulièrement. Elle était grandement soulagée que ça ne soit pas ça.

__ Tu préfères le lait chaud au miel ? C’est bien aussi…


Demanda-t-elle en se disant qu’elle était peut-être allée un peu vite pour commander le bouillon. Cela dit, Sarah devait savoir parfaitement ce qui conviendrait. Elle se rendit alors compte qu’elle s’inquiétait beaucoup pour son amie et qu’elle se précipitait un peu trop. Alors elle prit le temps de se calmer pendant que la jeune femme se débarassait de son châle et reprit un rythme normal pour la suite de l’examen.

__Ne dis pas ça, je pourrais bien finir au bûcher si cela venait à se savoir. Mais oui, j’avoue, j’ai appris beaucoup de choses dans les livres empruntés à la citadelle et au contact des Mestres. Mais j'écoutais quand même ma Septa, seulement… je ne me suis jamais résolue à n’être qu’une jolie potiche pour un riche seigneur. Si tu veux mon avis, et avec tout le respect que je dois aux Septas et aux Septons, ils oublient un peu vite que c’est l’Aïeule, une femme, qui éclaire la voie.


La brune fit un clin d'œil à la Redwyne tout en commençant la palpation, à chaque déplacement des ses doigts sur le ventre, elle demandait si cela faisait mal. concentra à nouveau sur la palpation du ventre de Desmera qui était rassurante, tant pour l'emprisonnement que pour son état de santé général. Elle conclut donc.

__ Je pense que c’est dû au stress. Je vais te faire des tisanes pour que tu dormes et que tu te détendes.

__ Soit ma chère, c’est toi qui décide, mais il sera mécontent que tu lui cache ton état. Je comprends cependant très bien que tu préfères rentrer, même si tu es faible, la perspective d’être chez toi suffira peut-être, j’espère, à te redonner un peu de vigueur. Promets-moi seulement d’être prudent et de t’arrêter pour te reposer si le besoin s’en fait sentir. Lord Caswell et Mestre Lomys nous accueilleront avec plaisir pour quelques jours.


Baelor souhaitait également quitter Port-Real au plus vite et rien ne retenait Aelinor si ce n’était cette histoire avec Duncan, alors Aelinor venait de prendre la décision de partir avec Desmera et Humfrey, ainsi pourrait-elle surveiller son état. Et puis si par hasard, elle était retenue à la capitale, elle pourrait aisément rattraper la colonne si ses affaires ainsi que sa suite étaient déjà en route. Elle n'aurait alors que ses gardes et son cheval, ils pourraient filer à vive allure.


Desmera rassura tout de suite Aelinor sur l'empoisonnement, ce qui n'empêcha pas Aelinor de se faire un sang d’encre et de vérifier qu’il n’y avait pas de trace de poison. Les filles de Denys étaient peut-être les prochaines héritières sur la liste, mais la brune ne doutait pas un seul instant que si son amie mourait, il trouverait une excuse pour faire main basse sur La Treille, et si ce n’était lui, c’était peut-être, le père de son ancien fiancé, ou qui sait qui et pourquoi. Alors il y avait toutes les raisons de l’empoisonner, ne serait-ce que parce qu’on était à Port-Real !

__ On ne sait jamais Desmera, ici la mort peut venir de partout et quand on s’y attend le moins.


Aelinor s’arrêta net en voyant la rousse jouvencelle rendre ce qu’elle pouvait à l’évocation du lait chaud. Ainsi, quand Desmera dit qu’il valait mieux éviter le lait chaud, elle leva un sourcil et acquiesça.

__ Oui effectivement.


Elle prit la cuvette et l'éloigne de la Redwyne pour éviter que l’odeur ne lui donne de nouveau des relents. Mais par précaution elle approcha un pot de chambre propre, au cas où cette dernière vomisse à nouveau.

__ Et de femmes comme toi Desmera… Mais que veux-tu, ils ne seraient pas grand chose si nous ne faisions pas semblant d’être ce qu’ils veulent que nous soyons.


Sourit la brune aux yeux azur en serrant la main de son amie. Quand elle dit que son Mestre avait tout fait pour la dissuader de venir, elle soupira.

__ Je suis tellement désolée que tu aies dû témoigner.


La jeune femme s’assit sur le lit et prit la main de Desmera dans ses deux mains en lui offrant un sourire de réconfort plein de culpabilité. Peut-être le MEstre avait-il raison, elle n'aurait pas dû venir, mais en même temps, elle représentait une des plus grandes maisons du Bief et la Hightower ne pouvait que comprendre pourquoi elle était venue malgré tout. Puissent les Sept lui épargner tout nouveau voyage vers la capitale et tout nouveau stress.

__ Tu sais ce qu’il y a dans ses tisanes ?


Remontant la couverture sur la Redwyne pour l’aider à se tenir au chaud elle ajouta.

__ Peut-être as-tu besoin de quelque chose de plus fort ? Je peux regarder si tu veux.


Un peu plus calme que jusqu’alors, elle parlait d’une voix adoucie. Ce serait idiot d’ajouter ses propres angoisse au stress de son amie et c’était bien tot ce qu’elle avait réussi à faire jusqu’ici, ne l’aidant pas le moins du monde. Or parfois, pour aider quelqu’un, il ne fallait rien faire de plus que d’être là pour lui. Alors, il fallait simplement reconnaître son impuissance et laisser faire les Dieux. Il fallait prendre un peu de recul et arrêter de s'agiter en tous sens, comme elle l’avait fait dès son arrivée. Ses connaissances ne suffisaient pas à tout soigner et à sauver tout le monde, quand à un nouveau rituel pour la sauver, on n’en était pas là, elle l’avait fait pour Willos qui était véritablement entre la vie et la mort, mais Desmera n’était que fatiguée et dénutrie, elle n’était pas encore aux prises avec l’Étranger.

__ Père prépare déjà le départ et moi je n’ai aucune raison de m’éterniser ici. J’ai à faire à Villevieille.


Faire faire une chevalière pour Aegon et lui répondre, enfin. A cette pensée, elle soupira et ses joues se teintèrent de rose. Elle avait tellement hâte de pouvoir lui dire tout ce qu’elle pensait, ce qu’elle ressentait pour lui.

__ Et puis cela me fera le plus grand bien de rentrer chez moi, même si mon anniversaire a été annulé.

Dit-elle d’une voix mélancolique, attristée par ce que lui avait coûté ce procès sur le plan personnel. L’annulation de son anniversaire, ses vingt ans passés sous silence, sans que personne ne s’en aperçoive. Au moins à Villevieille, elle serait un peu célébrée, même si c’était plus tard.

À présent rassurées quant à un empoisonnement potentiel, Aelinor et Desmera discutaient tranquillement, notamment du procès. C’est alors que la Redwyne lui rapporta les propos de Lady Telanie. Elle ouvrit de grands yeux, choquée par la remarque de la Dame d’Herbeval.

__ Non !? Elle a vraiment dit ça ?!

C’était plus que déplacé à tout point de vue, mais la De La Nouë ne saisissait probablement pas les véritables enjeux de la position de Desmera. D’un autre côté, son désir de soutien à la Hightower était pour le moins inattendu. Elles n’étaient pas vraiment proches, s'inquiétait-elle vraiment où était-ce seulement qu'elle voulait à tout prix faire tomber Bronn. La brune était en quelque sorte flattée, mais elle n’aurait voulu pour rien au monde que son amie se fasse ainsi rabrouée alors que déjà la situation était terriblement difficile pour elle.

__ Ton témoignage était parfait. Les enjeux sont bien trop grands pour que tu trahisse ta position. Et puis nous avons eu ce que nous voulions et même plus. Je n’avais pas prévu de profiter de cette audience pour récupérer les fiefs. C’était une option et je dois dire que je suis ravie d’y être parvenue. J’aurais cependant aimé que notre loyauté à Bronn soit remise en question sur la base de faits que j’aurais pu contredire et non sur la base de la paranoïa de La Néra. Le droit n’a pas vraiment été respecté et il n’y a rien de plus frustrant que cette victoire en demi-teinte. Mais bon, je m’en contenterai et je ne te remercierai jamais assez d’avoir été là et d’avoir dit ce que tu avais à dire à la barre. C’était très courageux de ta part.

Elle rit doucement en repensant à un fait qui l'avait bien arrangé, mais qui la laissait encore dubitative sur la tenue du procès, tant de la part de la main que de la part de Bronn.

__ Tu remarqueras que personne ne m’a appelée moi à la barre. Certaines questions auraient pu me mettre en grande difficulté.

Levant un sourcil, elle hocha la tête. En jurant sur l'étoile à Sept branches, comment aurait elle pu omettre la nature de ses fiançailles avec Damion, sur sa véritable position vis à vis de Bronn, sur ses ambitions.

__ On va éviter le bonshomme quand-même.

Répondit Aelinor avec un clin d'œil avant de se lever pour aller renifler les tisanes afin d’en déceler les ingrédients. Sarah ne tarda pas à revenir avec le bouillon et elle le proposa à Desmera.

__ Boit doucement. Prends ton temps.

Il y avait dans les tisanes tout ce qu'elle aurait pu elle-même y mettre en première intention, aussi, trouver une synergie plus puissante lui demandait un peu de réflexion.

Quand la brune aux yeux céruléens entendit Desmera dire qu'elle rougissait beaucoup en ce moment, elle se figea et devint écarlate.

__ Non… je… il fait chaud dans ta chambre, voilà tout.


Aelinor aurait voulu lui dire la vérité, elle aurait voulu pouvoir partager avec elle sa joie et tous ses sentiments emmêlés. La confusion régnait à propos de tout. Quand son père accepterait-il de la fiancer ? Qu’adviendrait-il d’elle et de Villevieille une fois l’alliance conclue ? Comment faire en sorte que ce mariage ne signe pas la fin tragique des deux glorieuse Maisons Targaryen et Hightower ? Était-ce l’idée de porter la couronne tant convoitée ou le souvenir du jeune Griff qui lui mettait des papillons dans le ventre ? Une seule chose était certaine, elle ferait tout pour que ce mariage ait lieu, malgré la peur panique que l’idée de la nuit de noces faisait naître en elle. Mais voilà, Desmera était son amie certes, mais si elle réagissait comme Megalis à l’évocation de ce nom emprunt de puissance et de prospérité, mais également maudit par les tyrans qui l’avaient portés ? Si elle s’opposait à cette alliance ? Si elle en parlait à Baelor et faisait pencher la balance en faveur d’un refus ? Si elle comprenait que certaines actions d’Aelinor, directement liées à son espoir de voir Aegon sur le trône, visait à engendrer des conditions favorables à son retour, quitte à faire des milliers de morts ? Et puis elle n’était pas encore fiancée alors lui parler de tout cela lui semblait bien précipité. Quant à se confier sur ses sentiments à l'égard du beau blond dont le souvenir estompé par le temps revêtait des allures de statue parfaite en tout point, c'était fort peu convenable. Elle était bien inconsciente de tous les changements qu’Aegon avait pu vivre, était-elle même consciente de qui il était vraiment ? Elle n’avait partagé qu’une partie de Cyvosse après tout.

__ Je crois qu’elle a été isolée trop longtemps pour comprendre. Mais quand bien même, elle n’avait pas à te parler comme ça. J’espère que tu l’as remise à sa place, si non je lui en toucherai deux mots !


Répondit la Hightower, courroucée, au sujet de Telanie.

__ Et elle est fort belle, car avec les fiefs, nous récupérons l’ost qui y est rattaché.


Sourit-elle avant d’ajouter, en serrant les mains de son amie.

__ Un pas après l’autre.


Elle sourit. Puis quand Desmera dit qu’ils savaient qu'elle était trop maline pour eux, elle fit une grimace. Elle n’en était pas si sûre.

__ Ils auraient pu me confondre, ne serait-ce que sur la vraie nature de mes fiançailles avec Lord Damion.
 

La jeune femme demanda quelque chose à Sarah. La mention d’un phare, évidemment, ne manqua pas de l’étonner. Quand elle le vit elle le trouva magnifique, mais malgré son anniversaire prochain, elle n’avait pas anticipé que c’était son cadeau ! Elle le prit alors que Desmera le lui tendait et resta un instant bouche-bée.

__ Oh merci !


Notre jouvencelle observa le coffret un bon moment, il était vraiment magnifique. Elle l’adorait. Elle finit tout de même par l’ouvrir pour regarder l’intérieur, ne s'attendant pas à y trouver un peigne en or, une chaîne pour les cheveux et une broche.

__ Desmera tu as fait des folies !


Absolument ravie, elle prit la Redwyne dans ses bras.

__ Merci beaucoup. Le simple fait que tu y ait pensé malgré tout ce qu'il c'est passé me fait très plaisir. Mais en plus tu me gâtes ! C’est vraiment magnifique.


Elle prit le peigne entre ces doigts pour en observer les détails. Mais elle referma le coffre, elle aurait tout le temps de s’extasier plus tard. Là elle devait s’occuper de la belle rousse.

__ Merci encore. L’ensemble est superbe.


Pleurant presque parce qu'avec toutes les émotions qu’elle avait dû affronter, elle n’avait même plus le cœur à fêter ses vingt ans. Mais grâce à Desmera, elle reprenait un peu le cours de sa vie de jeune femme.

__ Merci.


Fit elle une dernière fois en écrasant une larme.

Aelinor qui perdait ses moyens était chose assez rare pour être remarquée. Elle ne pouvait que se douter que Desmera avait senti quelque malaise et le sourire suivi du clin d'œil confirma les craintes de la brune. Heureusement, la jolie rouquine n’en dit rien et ne lui demanda pas de s’expliquer sur ce qui la troublait. Elle en aurait été fort gênée et n'aurait probablement pas su quoi répondre. Ce qui en soit, pour une jouvencelle à la langue si affûtée était un aveu de culpabilité sans appel. Mais elle n’eut à répondre que par un sourire et quelques mots d’amitié sincère.

__ Je peux souffrir autant qu'il le faudra pour que tu te sentes bien.

C’était plus facile que de lui mentir ou de lui dire la vérité sur Aegon. Même si garder ce secret pour elle était une torture, les conséquences d’une telle annonce pourraient être désastreuses.

__ Tu as raison, ce n’était ni le lieu ni le moment. Veux-tu que je lui parle à ce sujet pendant le voyage ? Je sais être ferme quand il le faut. Et puis venant de moi elle comprendra peut-être mieux. Je pense que, bien que blessante et déplacée, sa remarque partait d’une bonne intention. Or, je crois qu'il est important que nous restions unis pour l’avenir du Bief. Tu n’as pas besoin d’elle à ton service, mais qu'au moins, elle garde l’illusion d’être dans notre équipe afin de ne pas rejoindre l’autre bord par dépit ou par vengeance.

Elle vit rouge aux mots de Desmera sur le procès et sur Bronn. Elle répondit d’un ton plus sec qu'elle n’aurait voulu.

__ Je ne joue pas Desmera, je n’ai fait que me défendre contre les attaques incessantes d’un homme qui, visiblement, nous veut du mal. Je ne peux que t’encourager à ne pas te mettre dans sa ligne de mire, mais pour nous, pour une raison que j’ignore, il est trop tard. Je tâcherai d'être prudente, mais le laisser nous dépouiller de nos droits et de nos terres sans broncher, ce n'est pas de la prudence, c’est de la couardise. J’ai d’abord pensé qu'en nous montrant aimable, il le serait également, mais c’est tout le contraire. Il a profité de notre respect vis à vis de sa position pour nous mettre plus bas que terre.

La brune aux yeux céruléens ferma la bouche sur le conseil de la Redwyne avant de rire avec elle.

__ C’est réussi, je me demande même si nos artisans n’auraient pas intérêt à travailler avec les tiens à l’occasion. Quant à mon goût pour la mode, il est comblé.

Les deux jeunes femmes se serrèrent dans les bras et échangèrent quelques mots affectueux, mais alors que Desmera parlait, elle vomit à nouveau.

__ Bon, je crois qu'il est temps pour moi de te laisser te reposer. Encore merci pour tes présents, vraiment ça me touche.

Elle sourit.

__ Si tu as besoin de quoi que ce soit, fais moi appeler… de jour comme de nuit. N’hésites pas. Et… je suis désolée de t’avoir parlé comme ça, je serais prudente ne t’inquiètes pas.

Elle prit le coffret et dit à Sarah de la faire appeler si l'état de la Redwyne s'aggravait. Elle lui donna pour instruction de la garder bien hydratée avec des tisanes et des bouillons et de la faire se reposer au maximum. Elle récupéra ses affaires excepté un bocal d'herbes pour éviter les nausées et un autre pour dormir. Elle dit à Sarah d’ajouter une petite cuillère à café de ces herbes dans ses tisanes habituelles et passa la porte avec un dernier sourire à son amie.