[HAUTJARDIN] Echec et Mat ? | Aelinor
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Treyvir Cendregué
Aelinor eut un sourire et un regard en coin pour Treyvir, ravie qu’il reconnaisse son rôle et les actions d'apaisement et de séduction qu’elle s'efforçait de mener depuis plusieurs semaines. Elles avaient enfin porté leurs fruits, il avait fallu cet incident pour en arriver là, mais si la bataille était encore loin d'être gagnée, les cœurs eux, semblaient lui être acquis. Cependant, sa présence qui semblait répandre quelques angoisses parmi la population avait fait son œuvre ici, dans les geôles sombres et humides, largement bien que dans le souterrain par laquelle les ravisseurs avaient fui. C’étaient ses menaces qui avaient évité aux prisonniers de passer à la question sous les ordres de la brune aux yeux azur. Ainsi gardait-elle sa miséricorde intacte et lui, toute sa puissance. Le jeu du bon et de la brute en somme, avait fait parler les prisonniers, pas elle uniquement, pas lui uniquement mais eux deux dans leurs différences et leur complémentarité. Mais surtout, et pour cela, elle lui était gréé, cela lui avait épargné de laisser sortir le monstre de cruauté qui sommeillait en elle. Quel soulagement que de pouvoir rester une jouvencelle pure et pleine d’amour pour son peuple un jour de plus.
__ Vous minimiser votre action Sire. C’est la peur que vous leur avez inspirée qui les a fait se tourner vers moi pour me supplier de les pardonner. Sans vous, j'aurais été contrainte d’en venir à des mesures plus cruelles et je n’aime pas la violence, comme vous le savez. Aussi utile soit-elle parfois dans certaines situations.
Un moment, le temps fut comme suspendu aux branches des arbres et aux pétales de roses dans ce jardin qui sentait divinement bon. La mélodie des oiseaux se fondait dans le rythme les insectes et créait une symphonie aussi belle que complexe pour qui savait écouter. Or à son grand étonnement, la Hightower constata qu'elle n’était pas la seule à apprécier l’instant, l’endroit et le Cendregué se tut car il n’y avait rien à ajouter. Les rayons du soleil jouaient dans les feuillages qui ondulaient dans la brise légère du matin et les roses s’ouvraient dans la lumière. Les papillons virevoltaient de fleur en fleur, les abeilles, elles, étaient fort affairées, les pattes arrière chargées de pollen rendant leur vol lourd et imprécis. Deux libellules aux ailes bleues se poursuivaient et les oiseaux qui avaient gagné les branches en apercevant les deux nobles se remirent à se baigner dans la fontaine qui représentait une nymphe dénudée versant l’eau d’une amphore dans la bassin en forme de clématite.
Il aurait été doux de continuer ainsi à marcher en silence, d’aller observer les carpes dans la mare qui se trouvait au bout de l‘allée dissimulée à l’ombre des lauriers roses. De regarder les jardiniers tailler les haies du jardin à la bieffoise et de parcourir la roseraie. Mais en voyant le visage de Treyvir, Aelinor ne put refréner son besoin de le soigner. Et puis, elle n’avait qu’une parole, elle devait la tenir car il n’avait reçu aucun soin depuis son combat fort violent avec son maître d’arme.
__ Pardon.
Fit-elle en le voyant grimacer de douleur sous le passage de ses doigts. Mais peut-être que, contrairement à ce qu’elle pensait depuis qu’il était parvenu à se rencontrer sur la partie de Cyvosse, il n’était pas totalement insensible à ses charmes, car elle perçu comme… un frisson tandis qu’elle passait ses doigts sur sa lèvre. Pouvait-elle seulement s'empêcher de tout tenter pour que cet homme l’admire et la désire ? Ce regard, cette hésitation, y avait-il quelque chose au monde de plus suave ? La magie existait bel et bien quoi qu’en disent les raisonnables. Elle existait dans le cœur des hommes et des femmes qui connaissaient la passion, la languissante caresse des songes et la tendresse de l’amour. Les hommes appelaient sorcière la femme qui savait faire naitre cette magie dans le cœur de leurs comparses et ils avaient bien raison, car cette femme possédait un pouvoir infini. Par la grâce des sept, Aelinor était dotée de ce pouvoir même si elle ignorait tout de la passion et de l’amour. Ce qu’elle savait du corps humain, elle l’avait appris avec les Mestres de la Citadelle qui avaient accepté de la former, c’était très théoriques et surtout fort sérieux.
Une fois dans ses appartements, elle ouvrit la porte de sa chambre pour aller y chercher une sacoche et trois petites bassines. Elle demanda à sa camériste d’apporter de l’eau bouillante et du thé, car il était bien trop tôt pour boire du vin à son goût et qu’elle en avait déjà assez vu les effets sur Treyvir. Moira sortit et referma la porte derrière elle tandis qu’Aelinor ouvrait sa sacoche sur son bureau. En voyant le Cendregué rester debout au milieu de la pièce, elle se demanda ce qu’il attendait avec cet air perdu. Elle lui désigna le canapé et dit
__ Asseyez-vous Sire.
Elle retourna dans sa chambre et se lava les mains, puis, elle revint et sortit son matériel de sa sacoche. Un onguent, un petit sachet de feuilles, une huile, mais aussi du fil des linges propres soigneusement pliés qu'elle mit dans une des trois petites bassines. Puis elle retourna près du jeune homme avec les bassines et les morceaux de tissus.
__ C’est assez moche ça.
La brune aux yeux céruléens soupira en désignant la profonde blessure à la pommette.
__ Il ne vous a pas loupé. Mais dites moi vos entraînement se passent toujours ainsi ou c’était juste pour m’impressionner ?
Demanda-t-elle en observant à nouveau les plaies sans les toucher cette fois. Elle s’arrêta un instant et plongea son regard dans le sien.
__ J’ai été bien plus impressionnée par votre prestation lors de l’attaque, sachez-le.
Sourire sur les lèvres, elle continua.
__ On m’a tout raconté dans les moindres détails. La course poursuite, les toits, le combat. Et si j’en crois ce qu’a osé dire l’homme qui m’a étranglée, vous m’avez évité bien des tourments. Vous n’imaginez pas à quel point j’ai été soulagée quand je vous ai reconnu.
Moira revint avec l’eau chaude et Aelinor put commencer à nettoyer doucement les plaies en prenant soin de faire refroidir le linge avant de le poser sur la peau du jeune homme.
__ Ça va ? J’espère que je ne vous fais pas trop mal, mais je dois m’assurer que vos blessures soient bien nettoyées.
Plutôt que d'appuyer trop fort, elle préférait passer plusieurs fois doucement. le sang coagulé finissait toujours par partir. Et puis il avait déjà dû mettre de l’eau dessus lors de sa toilette, car elles étaient relativement propres.
Treyvir Cendregué
Aelinor s’était installée dans les appartements de Margaery, jamais elle n’aurait commis l’impaire de prendre ses quartiers dans ceux de Bronn et puis Mestre Lomys ne l’aurait pas bien pris. Elle était ici pour ramener la paix, pas pour provoquer un conflit ridicule sur les chambres des uns et des autres. Et puis de toute façon, elle n’avait aucune envie d'attraper des puces ou pire, la chtouille, dans les draps de La Néra, fussent-il lavés à l’eau bouillante entre-temps. Elle n’y avait d’ailleurs même pas mis les pieds car il était peu probable que le Grand Argentier ait laissé le moindre indice écrit sur ses intentions vu ce que le Mestre de Hatujardin lui avait révélé, à savoir qu’il savait à peine écrire. Non vraiment elle était mieux dans la chambre de sa cousine, malgré le sac qui avaient suivi la mort des Tyrell, ils avaient gardé une certaine féminité et cela n’était pas pour lui déplaire.
Ni Treyvir ni elle n’étaient maîtres des lieux et c’est d’ailleurs pour cela qu’elle ne s’était autorisée à exécuter personne, pas même son agresseur. Lomys seul pouvait prétendre à cette prérogative. Pourtant, elle était là, œuvrant pour apaiser les esprits des paysans échaudés par les fanatiques, mais aussi par le règne de Bronn qui n’avait finalement apporté que des problèmes sur ses terres qu’il ne visitait que si rarement. Probablement préférait-il les filles de joie Port-Real et la cour de son ami Tyrion. Il était certain que le comportement qu’il observait à la capitale ne serait pas passé inaperçu ici et qu’il aurait attiré les critiques de ses vassaux. Mais il avait beau se cacher, presque toutes les nobles maison du Bief s’entendaient sur le fait qu’il n’avait rien à faire à Hautjardin. Restait à trouver un terrain d’entente pour que tout ce beau monde œuvre de concert en faveur du Bief de manière à ce que Bronn ne puisse même pas remettre les pieds ici. Ainsi personne n’aurait à pâtir d’une guerre ouverte contre lui et la couronne, ainsi les pertes seraient limitées à défaut d’être inexistantes. Mais peut-être que d’autres Maisons avaient d’autres idées sur ce qu’il convenait de faire. Et Aelinor, comme Baelor étaient prêts à les écouter et évidemment à faire en sorte que tout se passe pour le mieux au sein des terres verdoyantes.
En revanche, le meilleur moyen d’éviter de faire face à une contre attaque de la couronne ainsi que d’autres Royaumes qui voudraient bien la suivre, l’Orage probablement, Dorne, possiblement, le Val, le Conflans et bien sûr l’Ouest, c’était de l’affaiblir, de lui enlever tout moyen de fédérer derrière elle et de lever les armées sur ses terres ainsi que chez ces vassaux les plus fidèles, la Truite, le Cerf. Qui veut la paix prépare la guerre. Si l’Ouest réunissait un armée au nord et que l’orage et la couronne attaquaient par l‘est, ils étaient faits comme des rats. Ils n’avaient en aucun cas les moyens de s’opposer frontalement à la couronne et de gagner leur indépendance sans faire tomber les couronnes voisines et sans alliés dans les royaumes voisins. Or des mécontents, il y en avait partout, Lamarck, Belle-Île, les Îles de Fer, les Montagnes Rouges et probablement dans l’Orage également. Mais si les nobles du Bief commençaient à s’entredéchirer pour le pouvoir, alors c’était déjà terminé avant d’avoir commencé.
La brune aux yeux azur retira le linge de la plaie qu’elle était en train de nettoyer et se recula, surprise par le geste d’agacement du Cendregué. Elle ne fit cependant aucune remarque et reprit son office avec un nouveau linge propre pour parfaire le travail.
__ Oui Sire, je comprends. Mais vous devriez songer à sécuriser votre lignée avant de finir aussi balafré que mon père.
Fit-elle en souriant.
__ J’imagine que cela pourrait vous aider à survivre effectivement, mais du peu que je sais des champs de bataille, la mort fauche même les plus vaillants combattants, c’est un jeu de hasard sanglante qu’une guerre, celle qui a la dernière déchiré les Sept Couronnes en est la preuve. Robb a gagné toutes ses batailles avant de perdre la vie, Cersei a perdu tous ses enfants pour garder le pouvoir, Tywin a été tué par son propre fils désormais Main du Roi, Lord Baelish a raflé le Val avant d’être démasqué dans le Nord. Daenerys a été tuée par son propre amant qui était probablement également son neveu. Ceci nous apprend que les guerres ne se gagnent pas toujours sur le champ de bataille.
Suite aux mots de Treyvir, la brune hocha exagérément sa tête sur le côté avec un sourire malicieux et un sourcil légèrement relevé.
__ Et si cela était vrai Sire, serait-ce un problème pour vous ?
Posant délicatement sa main sur la joue du jeune Lord en redressant la tête, elle ajouta :
__ Inutile de me remercier, c’est toujours un plaisir de soigner les gens. Et puis je vous dois bien ça après m’avoir délivrée des mains de ses monstres.
Reprenant les soins après avoir enlevé sa main, elle commença à appliquer l’onguent sur les blessures les moins graves, ou plutôt autour, car c’était pour réduire l'hématome et éviter la douleur.
__ Vous cicatrisez bien habituellement ?
Demanda-t-elle en se disant qu’il devait être habitué à finir les entraînements dans cet état vu ce qu’il lui avait dit et donc qu’il connaissait assez bien son corps pour le savoir.
Treyvir Cendregué
Nul ne pouvait penser à tout, tout anticiper, pas même la Hightower. Mais parfois la meilleure qualité qu’on puisse avoir était la capacité à s’adapter aux différentes situations qui se présentait. N’avait-elle pas négocié un alliance entre Cersei et Hightower au lendemain de l’explsiton du Grand septuaire alors que les corps de sa tante, de sa cousine et de son cousin n’avaient même pas encore été retrouvés et qu’elle était profondément par cet acte ignoble et profanateur ? Mais la politique était froide et ne s’encombrait pas de sentiments. Une politicienne devait savoir faire la part des choses et tirer le meilleur de n’importe quel événement aussi tragique soit-il. Se perdre en conjectures ou trouver le moyen de profiter de la conjecture. Telle était l’unique question. Et pourtant cela n'empêchait pas la jeune femme d'envisager un maximum de possibilités. Mais pas toute, jamais. Elle était consciente que toute stratégie mise à l'épreuve de la réalité pouvait connaître des écueils, même la meilleure. Alors elle ne critiquait pas celle de Treyvir, c’était somme toute compréhensible et logique, elle souhaitait seulement élargir son champ de vision.
Aelinor sourit et son regard qui s'était fait presque tranchant quand elle avait énuméré les faits qui avaient mené le royaume à sa perte se fit doux, aussi doux que les mots caressants de Lord Cendregué. Elle était touchée. Touchée et curieuse, la flamme serait-elle ravivée ?
__ Puissent les Sept me permettre de vous impressionner encore, même si vous commencez à connaître beaucoup de mes petits secrets.
Commença-t-elle en battant des cils avant de reprendre.
__ Normalement les Dames de mon rang laissent les soins aux Septa, mais moi, je veux être bien plus qu’une noble Dame, je veux apprendre, je veux connaitre, je veux sentir, je ne veux lire tous les livres du monde pour mieux le comprendre et avec ça, je veux éclairer la voie. Quand je serais vieille, que mes cheveux auront blanchis et que mes yeux ne verront plus clair, je ne veux rien regretter et je veux pouvoir regarder ce que j’ai accomplis avec fierté.
Plus elle parlait, plus sa passion et son engouement pour la connaissance débordait. Elle se garda de dire l’entièreté de ses ambitions, ce n’était de toute façon pas le sujet. Mais pour ce qu’elle révélait, elle était sincère et même enthousiaste. Car oui, avant d’être une belle jouvencelle, elle était un vrai rat de bibliothèque qui avait passé de nombreuses heures à étudier un tas de textes sur un tas de sujets très divers. Quand elle ne lisait pas, elle harcelait les Mestres pour apprendre l’art de la guérison. L’un des seuls sujets qu’elle ne connaissait vraiment pas, c’était ce qu’ils se passait entre une homme et une femme une fois le mariage prononcé. Et le peu qu’elle en savait ne lui donnait vraiment pas envie d’essayer. Mais bien sûr, elle le ferait, car c’était son devoir d’épouse que d’engendrer une lignée nombreuse et robuste et qu’elle ne comptait en aucun cas rester vieille fille.
__ J’ai eu la chance de naître dans une famille aimante avec un nom illustre, entre des draps de soie et des rideaux de velours. Je n’ai jamais eu faim et mis à part quelques rares fois, je n’ai jamais eu peur. C’est une bénédiction des Sept que d’avoir une telle vie et je crois que la moindre des choses, c’est de chercher à donner le meilleur de soi même et de se montrer digne de ce qu’en tant que noble nous représentons.
La noblesse représentait la richesse, un idéal bien sûr inatteignable, l’exemple à suivre dans la droiture comme, hélas dans le péché pour ceux qui aimaient s’y complaire, mais aussi la sécurité, la stabilité, la justice, tout ce qui constituait un Royaume durable.
__ Mon père m’a toujours dit que la noblesse d’un nom n'avait de valeur que si son porteur faisait preuve de noblesse de cœur. Et puis, j’aime les gens. Vous savez on apprend beaucoup aussi en parlant simplement avec eux, quelle que soit leur origine, aussi misérable paraisse leur vie, même le plus pauvre des journalier sait mieux que moi décrypter le ciel et le vent.
Fit-elle en écartant la main comme si une chaude brise soufflait dans la chambre et que le ciel bleu et l’air sec annonçait la moisson.
__ Mais surtout, ne dites rien aux Mestres ou aux Septons, ils auraient tôt fait de me mettre sur un bûcher.
Rit a brune aux yeux azur en ramenant sa main près du visage de Treyvir après avoir pris un peu d’onguent pour passer à un autre hématome. Il répondit alors à sa question et termina sur une étrange promesse en plantant son regard dans celui de la jouvencelle. La flamme était ravivée, et même attisée, elle flamboyait dans le regard du Sire de Cendregué et Aelinor en fut troublée. Elle cligna des yeux, la bouche entrouverte, sans trop savoir quoi répondre, alors, hésitante, elle continua
__ Très… très bien. Je…
Elle s'éclaircit la voix pour reprendre contenance. Elle se raccrocha à ses connaissances comme elle le faisait souvent quand elle était prise au dépourvu. Sur ce terrain-là, au moins, elle savait ce qu’elle faisait et pouvait regagner en assurance.
__ Si vous me le permettez, je vais surveiller vos plaies personnellement. En attendant, je préfère ne pas recoudre et laisser votre organisme faire le travail. Je n’ai pas envie de vous infliger de souffrance inutile et la seule que je serais vraiment tentée de recoudre ne me plait pas. Je préfère pouvoir voir comment elle évolue plutôt que de la refermer et de risquer de rater une infection en profondeur.
Toujours troublée par le regard qu’il dardait sur elle, la Hightower profita du fait qu’elle fermait le bocal d'onguent pour détourner les yeux et demander :
__ Vous êtes blessé autre part ?
Treyvir Cendregué
Bénie soit la Jouvencelle, il se passait beaucoup de choses dans cette chambre en ce jour, mais rien de répréhensible, enfin en tout cas du point de vue d’Aelinor. Du point de vue des Mestres et des Septons ce pourrait être une toute autre affaire puisqu’elle soignait quelqu’un, activité qu’elle n’était pas censée faire. De plus, elle avait préparé son onguent elle-même et elle versa de l’eau chaude sur les feuilles qu’elle avait sorties pour les laisser infuser un moment. La belle serait-elle un peu sorcière en plus d’être ensorcelante ? Elle le voulait en tout cas, parce qu’elle ne voulait pas être cantonnée à la place que lui réservait la société. Elle s’y conformait très bien, elle ne visait rien de moins que la perfection sur ce pan, et ce bien qu’elle n’ait jamais été douée pour coudre ou broder et même pour la musique, au mieux elle chantait, mais sa voix grave ne seyait pas aux chansons que les jeunes femmes aiment chanter. Alors la plupart du temps, elle ne faisait qu’écouter, avec grand plaisir, les airs que les autres jouaient, comme Gladys, sa suivante, qui jouait magnifiquement du luth et avait également une très jolie voix.
Ils échangeaient, conversation amusante ou enrichissante, en tout cas la Hightower se sentait suffisamment en confiance pour parler d’elle et de ses passions. Oh bien sûr elle gardait des secrets, elle ne disait pas tout. De toute façon, elle n’allait pas le saouler de paroles non plus et bien qu’elle soit jeune, elle en avait des choses à raconter. Elle faisait notamment partie des rares privilégiées à être allée jusqu’en Essos. D’ailleurs le parfum qu’elle portait aujourd’hui venait d'une fameuse parfumerie Lysienne avec laquelle elle était en affaire depuis quelques années maintenant. Il était plus capiteux que celui qu’elle mettait au quotidien, ambré au sillage envoûtant de bergamote, de vanille et d’iris, il avait quelque chose de sensuel et dégageait un soupçon d’interdit. Loin du sage et doux chèvrefeuille qu’elle avait, cette fois, laissé au placard. Elle ne pouvait décemment pas rester sur un échec et accepter le désintérêt du jeune homme suite à la partie de Cyvosse.
Pourtant, quand Treyvir fixa Aelinor elle crut se perdre un instant dans le bleu intense de ses prunelles et en fut toute chose. Car oui, la demoiselle ne manquait pas d’assurance, mais elle n’était pas totalement inébranlable tout de même. Mais c’était inhabituelle pour elle de ne pas savoir comment réagir à un regard, la plupart du temps, il lui suffisait de le soutenir pour que la partie adverse se désiste. Mais pas là et d’ailleurs, bien qu’elle n’ait pas tout de suite tourné le regard, elle ne l’avait pas vraiment soutenu. Non, c’était comme si elle y avait plongé, comme si les rôles étaient inversés. C’était donc ça que ça faisait aux autres quand elle sondait leurs âmes de ses yeux azur ? C’était vraiment très étrange comme sensation, elle en avait presque des frissons.
Surprise par la question du Cendregué sur ses propres blessures, la brune fit un mouvement machinal vers son cou avant de se raviser. Elle eut un moment de flottement plus que d’hésitation, mais elle s’était souvenu qu'elle ne devait pas les toucher pour ne pas enlever la poudre qui les masquait tant bien que mal.
__ Ça va… Elles ont presque disparu.
Mentit-elle avec un sourire avant d'ajouter :
__ J’ai mis le même onguent, et je suis presque sûre qu’il vous faudra attendre un peu plus longtemps avant que vos bleus ne se voient plus.
Les bleus sur son cou étaient encore visibles malgré les efforts de la camériste pour les poudrer autant que possible. Il fallait dire qu’avec un tel décolleté, elle ne pouvait pas laisser ces marques infâmes gâcher le tableau et encore moins rappeler à tous qu’elle avait été victime d’une odieuse attaque. Mais elle avait si peu l’habitude d’être blessée, que sa camériste manquait de pratique dans l’art tout féminin de dissimuler les hématomes laissés par un mari ou un père plus souvent que par un malandrin. Enfin, d’ici un ou deux jours, ils vireraient au jaune et seraient plus faciles à cacher. Et dans quatre ou cinq jours il n’y aurait plus rien. Ses côtes étaient encore douloureuses mais la marque n’était pas très visible. Quant à l'hématome sur son poignet, il était plus important qu’on aurait pu croire. Il était ressorti le lendemain de l’attaque et bien que dissimulé par les manches de la Hightower, on pouvait l'apercevoir plus violacé que jamais. Mais il devenait urgent de changer de sujet.
__ Voulez-vous que je les soigne également ?
Demanda Aelinor. Elle était manifestement nettement plus détendue avec le fait de le toucher ailleurs qu’au visage pour le soigner qu’avec ses propres blessures. La demande était purement médicale et personne n’entrerait pour les surprendre et répandre de viles rumeurs, aussi, il n'y avait pas de mal.
Treyvir Cendregué
Fort heureusement pour Aelinor, le combat n’était point physique. Il ne fait aucune doute qu’elle n’aurait alors eut aucune chance contre Treyvir, mais plus généralement contre n’importe qui et elle ne se serait pas engagée dans une lutte qu’elle ne pouvait pas gagner. Ça n'était pas son genre. Elle était meilleure en philosophie ou en négociation à n’en point douter et son corps tout en finesse et en courbes féminines était l’illustration d’un manque flagrant de force. Elle n’était pas flasque, loin de là, il fallait les porter les kilos de tissus qui définissaient son style vestimentaire, il fallait se tenir droite, pouvoir serrer les corsets, avoir une taille aussi fine que possible, rentrer le ventre. Des exercices quotidiens qui n’autorisaient pas le relâchement. Mais la finesse de ses poignets et de son cou témoignait qu’elle n’avait jamais porté de choses plus lourdes que des bracelets ou des boucles d'oreilles. Et voici qu’après des années sans frémir sous les yeux d’un homme, à se permettre, même, de leur lancer des regards noirs s’ils s’attardaient trop sur ses formes elle venait de se laisser happer par l’un d’eux. Rare étaient ceux qui pouvait se targuer d’avoir décontenancé la brune aux yeux céruléens, mais le Cendregué pouvait à présent.
Séductrice, elle pouvait l’être, mais la plupart du temps, elle ne se laissait pas prendre au jeu et maîtrisait son art d’une main de fer dans un gant de velours. Là, c’était différent, et il n’y avait pas uniquement le regard azur du jeune homme, mais aussi son sourire ravageur malgré les entailles qu’il avait sur tout le visage. Évidemment, elle ne pouvait pas le laisser prendre le dessus si facilement, il fallait qu’elle se reprenne, qu’elle garde le contrôle. Mais peut-être que dans cette chambre, quelque chose de plus grand qu’eux se jouait, peut-être était-ce l’avenir du Bief qui se dessinait, peut-être qu’en alliant les deux grandes Maisons qu’ils représentaient chacun à leur manière, ils pourraient unir le sud sous leurs bannières. Certes, c’était tentant. Et évidemment à ce stade, la jouvencelle y pensait très sérieusement elle aussi, d'autant plus que ces choix étaient très limités.
Immense était l’enjeu et l’idée de son mariage lui faisait tourner la tête. Le choix qu’elle ferait serait déterminant pour sa Maison, pour le Bief et peut-être même pour tout Westeros. Elle le savait depuis toujours et avait bien l'intention de garder ce pouvoir, celui de choisir elle-même, bien que son père n’ait pas apprécié l’entourloupe des dernières fiançailles, elle avait su le convaincre de la nécessité de les signer. Est-ce que cela fonctionnait encore après l'échec relatif de son plan pour contrer Bronn ? D’une certaine manière, s’il n'avait pas fonctionné comme prévu, il avait tout de même fonctionné puisqu’au procès, ils avaient récupéré les fiefs perdu par Baelor au lendemain de la rébellion. Le poids qu’elle portait sur ses frêles épaules était parfois trop lourd et pour s’en débarrasser, elle se redressa et inspira profondément.
Découvrant le torse de Treyvir, ses hématomes et cicatrices Aelinor écarta les mains et s’exclama :
__ Mais Sire, ce n’est pas possible, vous vivez avec des bêtes sauvages ou quoi ?!
Aelinor était horrifiée, pourtant elle en avait vu des torses plus ou moins abîmés, mais là, avec les bleus en sus, elle avait l’impression de faire face à un vieux guerrier et pourtant c’était bien celui du jeune homme. Et encore, elle n’avait pas vu son dos. Elle observa plus attentivement. Évidemment la peau lisse et tendre, les muscles parfaitement dessinés ne laissaient pas place au doute quant à l‘âge réel du Cendregué, mais elle se demanda tout de même comment il avait pu récolter tout ça. Elle se fit aussi la réflexion qu’il était fort bien fait et qu’il avait l’air savoir la peau douce ce qu’elle pourrait vérifier dans quelques instants. Elle appréciait donc le tableau, mais elle était avant tout concentrée, le corps devant-elle était un corps à soigner et pas un corps à toucher pour le plaisir. Elle releva la tête avec un sourire presque enfantin.
__ L’onguent ne fera pas de mal. Il devrait aider à apaiser la douleur et à faire disparaître les hématomes.
Répondit la Hightower en prenant l'onguent pour l’étaler délicatement sur les contusions, c’est ainsi qu’elle se leva pour faire le tour et s’occuper de son dos et qu’elle découvrit les cicatrices dont la nature ne laissait pas place au doute. Celles-ci ne les avaient pas récolté au combat ou à l'entraînement, aussi violent fut-il. L‘onguent déjà étalé sur les doigts, elle mit sa main sur sa bouche étouffant un petit cri, résultat, elle avait de l’onguent partout sur la joue. Mais elle n’essaya même pas de l’enlever, trop choquée par cette vision d’horreur. Et tout ce qu’elle put lâcher alors que les larmes lui montaient au nez furent ces mots :
__ C’est lui ?
Treyvir Cendregué
Quelle drôle d'idée ! Lui enfoncer un couteau ? Le frapper au crâne ? Elle salirait sa belle robe avec son sang et pour quoi ? Cendregué ? Une terre sur laquelle elle n’avait aucune légitimité et dont les habitants auraient tôt fait de venger la mort de leur Seigneur. L’or ? Elle n’avait nul besoin d’en avoir plus qu’une Hightower née dans la cité la plus riche de Westeros. Et puis ça n’était pas franchement une bonne manière de faire la paix. Aussi, quand dans son geste de stupeur, elle s'en étala sur le visage et que le jeune homme se mit à rire, elle rit aussi. Tout en pleurant pour lui, un peu nerveusement, mais la situation était fort cocasse et la dame avait de l’humour et ce qu’il fallait d'autodérision pour le prendre sur le ton de la rigolade. Treyvir s’arrêta cependant, mais elle non. Elle n’y arrivait pas. Elle pleurait en même temps. Elle s’essuya grossièrement le visage, larmes et onguent. Essayant de recouvrer son sérieux. Mais il avait ouvert une porte à la légèreté et là, en observant les traces des sévices qu'il avait subi, elle avait peut-être besoin de cela pour éviter de s'effondrer en sanglots. Or avait-elle le droit de souffrir alors qu'il avait souffert bien plus qu'elle ne le ferait jamais. Elle connaissait la morsure du feu, mais personne ne l’avait torturée elle. Et pourtant elle pouvait imaginer ce que chaque marque avait arraché de douleur au jeune Cendregué. Elle voyait à travers elles toute la cruauté de Morren, exercée sur un enfant, probablement. Elle savait parce qu'elle avait déjà vu exercée cette violence, heureusement, pas sur des jeunes gens innocents. Elle ne l'aurait pas permis. Quand il parla d’Ombelline en lui avouant qu'elle avait vécu pire, elle courut dans sa chambre rendre son petit déjeuner à l’abri des regards. Mais pas des oreilles.
Elle revint comme si de rien n'était après avoir prit le temps de se rincer la bouche et de se pincer les joues pour retrouver des couleurs et ne pas revenir blanche comme un linge. Port altier et démarche féline, égale à elle-même. Mais elle n’avait même pas songé à nettoyer son visage correctement et il restait de l'onguent.
__ Veuillez m’excuser.
Ses prières en cet instant allaient à la fiancée de Bronn. Elle se rassit derrière Treyvir et entreprit de mettre de l’onguent sur chacun de ses bleus avec une douceur renouvelée, presque de la tendresse. Elle ne dit rien de sa vision de la justice, pour elle la mort était bien peu cher payée pour ce qu’il avait fait. Et plus elle regardait les cicatrices, plus elle imaginait ce qu’elle aurait pu lui faire subir si elle avait su. Puis quand elle eut terminé, il se leva et vint avec un mouchoir essuyer son visage. L’onguent, et aussi quelques larmes qui s'étaient échappées alors qu’elle regardait son dos. Elle se laissa faire, ce qui était chose assez rare pour être soulignée, elle n’hésita même pas, en vérité, elle était trop affligée pour repousser son geste. Elle lui sourit et hocha la tête, les larmes aux yeux. Il faisait preuve d’une grande délicatesse malgré ses mains de guerrier et elle lui savait gré de faire attention à sa peau délicate. Mais il aurait bien pu s’y prendre comme une brute qu’elle n’aurait pas eu le cœur à le repousser. Il était rare qu’on s’occupe d’elle, pour la simple et bonne raison qu’elle supportait assez mal qu’on la touche, ceux qui avaient ce droit se comptaient sur les doigts d’une main et aucun homme en dehors de sa famille n’en faisait partie.
Pas d'avantage, la jouvencelle ne l’arrêta quand il passa son pouce sur sa pommette, sa main autour de son visage et ses doigts derrière sa nuque. En revanche, elle se tendit sur le champ. Ses clavicules ressortirent, ses poumons se gonflèrent, son sourire disparut et ses yeux s’agrandirent. Quand il plongea son regard dans le sien, elle avait arrêté de respirer et les deux secondes lui parurent une éternité. Qu’était-il en train de faire ? Allait-il l’embrasser ? Non non non non non. Peut-être, oui, pourquoi pas. MAIS NON !! Trop de questions fusaient dans sa tête, trop de doutes, trop d’incompréhension, aucune connaissance en la matière, y avait-il seulement des livres sur le sujet ? Comment est-ce qu’on embrassait ? Elle n’en avait aucune idée et elle ne savait pas si elle en avait vraiment envie ou si c’était juste parce qu’elle était triste pour lui qu’elle se laissait faire. N’importe qui d’autres se serait pris une baffe. Mais pas lui. Pourquoi ? Elle n’avait pas envie de le frapper, mais elle le supplia du regard de ne pas aller plus loin et pourtant elle entrouvrit la bouche en se perdant une fois de plus dans l’océan azur de ses prunelles.
Aelinor se rendit compte en cet instant qu’elle avait fait preuve d’une grande imprudence en l’emmenant ici. Elle ne pouvait décemment pas mettre une claque à Lord Cendregué, pire, malgré la situation, elle ne le voulait pas, elle ne voulait pas mettre un point final aussi violent à leur relation. Pas du tout de point final en fait. Mais elle devait se débattre, MAINTENANT. se dit-elle avant qu’il la lâche enfin. Il s’éloigna et lui offrir une petite révérence. Elle tenta de retrouver son souffle, ses mains posées sur ses cuisses depuis le début s'étaient accrochées à sa robe et la serraient si fort qu’elle en avait les jointures blanches. Quand elle s’en rendit compte, elle baissa les yeux et lissa sa robe. Ce qui n’était pas impressionnant pour lui l’était pour elle.
__ Merci Sire.
Elle esquissa un bref sourire qu'elle ne put tenir comme elle l’aurait voulu.
__ Oui, il valait mieux… ne point alerter mes gens et le Mestre.
La brune aux yeux céruléens se leva en évitant soigneusement de regarder Treyvir et se mit à ranger son matériel de façon légèrement frénétique. Ah oui pour être décontenancée, elle était décontenancée et cela était visible.
__ Bien. C’est heu… Terminé.
Jetant un coup d’œil à la tasse où les feuilles de sauge et de bardane avaient bien infusé, mais n’en dit rien.
Toutefois, il craignait que ces réactions mêlées de craintes, de peur, de terreur même et de naïveté, n’aient trop désarçonnées la jeune femme qui semblait en proie à une panique plus que visible. Pour une séductrice invétérée, se voir ainsi prise à son propre piège était comique… Mais son attitude trahissait un réel inconfort, et, surtout, un réel manque d’expérience en la matière. Changeant alors son fusil d’épaule après s’être éloigné d’elle pour lui rendre son espace et lui apporter un peu de repos et de répit, Treyvir se rhabille en faisant attention de ne point enlever tout l’onguent apposé sur ses plaies. Il gémissait à deux ou trois reprises… Les douleurs demeuraient vivaces, cela ne faisait aucun doute. Oui, aucun doute.
Une fois rhabillé, Treyvir pose un œil sur cette infusion qui avait été faite tout à l’heure. Il s’arrêta, interloqué. Ses souvenirs revinrent : cela devait sans doute faire parti du processus de guérison ? Ou de soin ? En tous les cas, l’oublier serait sans doute une insulte pour la jeune femme, et Treyvir n’était point disposé à réaliser une telle erreur aujourd’hui. Se saisissant de la tasse, le seigneur la porte à sa bouche pour en apprécier autant le fumet du goût. C’était tout à fait adéquat, et réellement apaisant. Et doux. Et attentionné. Cette femme avait sans doute tout pour elle…
Il dépose alors la tasse et se tourne à nouveau vers elle. Cette fois, si son regard se fait à nouveau intense, ce n’est point par défi ou par séduction, mais par crainte. Il souhaite faire quelque chose, maintenant. Outre ses intenses réflexions qui n’en finissaient plus, quelque chose, encore une fois, avait changé en son esprit et en son cœur. Il voulait… S’en assurer. Oui, il le devait. Il s’approche alors, le visage de plus en plus grave, et se place devant elle, à quelques centimètres seulement.
- « Veuillez me pardonner ma Dame. »
Il se penche, aussitôt sa phrase terminée. Se faisant, ses lèvres décrivent une trajectoire allant de sa position initiale à une autre, au milieu du front de la jeune femme. Là, il dépose un simple baiser : ni trop intense, ni trop long, ni trop lent. Un baiser qui, dans la symbolique, représentait la protection. Mais il faudrait être définitivement naïf pour ne point voir que cette initiative avait été précédée par une peur grandissante dans les entrailles du Seigneur, qui, lui aussi, n’y connaissait rien en amour. Lorsqu’il s’éloigne, et fait deux pas en arrière, il offre une vraie révérence cette fois-ci.
- « Puissent les Sept vous bénir. »
Et, reprenant la tasse, il fit volte-face. Présentant son dos à la jeune femme, il pu laisser aller toute sa stupeur et sa peur d’avoir mal agi, ou d’avoir été tout simplement stupide. Ses yeux, écarquillés, trahissaient la peur qui animait son esprit. Son corps battait à tout rompre, et sa respiration, saccadée était presque inefficace et la sensation d’étouffement lui commandait de fuir pour se retrouver le plus vite possible dehors, à l’air libre. Aussi entreprit-il de quitter cette chambre.
Treyvir Cendregué
Oui, l’instant avait été délicieux pour Aelinor également, avant que le jeune homme ne prenne totalement le contrôle et n’envahisse la zone de confort de la jouvencelle qui n’était pas prête à se laisser ainsi toucher, même avec les meilleures intentions du monde. Elle aimait s'occuper des gens, elle avait aimé s’occuper de lui avec toute la délicatesse et l’attention qui la caractérisait. Elle aurait bien continué dans les jours suivants, mais après ce qu’il venait de se passer, elle ne le pouvait pas, pas comme ça, pas ici en tout cas. Elle en avait appris beaucoup sur lui et il en avait aussi appris beaucoup sur elle. Il avait partagé la douleur d’un passé tragique. Elle avait partagé secrets et passions. Ils s’étaient écoutés, ils avaient rit et elle avait pleuré. C’était un beau moment mais elle ne pouvait pas le prolonger.
Treyvir se rhabilla, Aelinor pensait qu’ensuite il partirait, mais non, il se saisit de la tisane et la but sans s’inquiéter de ce qu’elle contenait. Si elle n’avait pas été aussi désarçonnée par ses propres sentiments à l’heure actuelle, elle aurait pu faire une blague en lui criant que c'était de la cigüe. Mais elle n’avait pas le cœur à rire, ni à pleurer en vérité, peut-être à prier. Tout était tellement confus. Oui, prier lui ferait le plus grand bien. Son sac était rangé, elle avait seulement laissé dehors un bocal avec les mêmes feuilles que celles de la tisane. Elle les lui ferait porter. La question étant, par qui. Gladys ou Moira ? Prier et demander pardon d’avoir un instant pensé à l’embrasser. Elle ne pourrait plus jamais embrasser personne après ce que lui avait fait Jonas, lui voler son premier baiser et prendre la fuite pour ne plus jamais lui adresser la parole. Rien que d’y penser elle avait envie de pleurer. Elle était peut-être une vile séductrice, mais la plus frigide de toutes. Et surtout, elle ne voulait être la femme que d’un seul homme or elle avait déjà pêcher en embrassant Jonas. Malgré ses prières, elle peinait à se pardonner cet écart de conduite. Et pourtant, elle y avait pensé aujourd'hui encore, pas à Jonas, au baiser, à la douceur des lèvres d’un homme au goût de sa peau, à son odeur. Par les Sept. Elle secoua la tête pour chasser ces pensées impures de son esprit.
Ce n’était pas la première fois qu’elle était prise à son propre jeu, et la dernière fois non plus elle n’avait pas mis une claque à celui qui s’était approché d’un peu trop près à son goût. Elle ne l’avait pas frappé parce qu’elle avait un service à lui demander. Mais le Prince Edmund était mort, il ne pourrait donc pas raconter à Treyvir comment elle était partie en pleurant après qu’il ait approché son visage trop près du sien pour remettre son pendentif dans son décolleté. Mais il ne l’avait pas touchée, fort heureusement. Là, elle pouvait encore sentir la main du Cendregué sur son visage, son pouce sur sa pommette comme elle pouvait sentir les mains de son ravisseur sur son cou ou la caresse de l’eau sur ses cuisses. Elle ne savait pas trop. Elle eut un frisson. De peur ? De désir ? Les deux mêlés ?
Les mains posées sur la sacoche qui contenait ses instruments et ses remèdes, la Hightower était totalement perdue dans ses pensées, elle ne remarqua pas que le Cendregué la regardait à nouveau, qu'il n‘était pas encore parti. Aussi, quand Treyvir s’approcha, elle sursauta et voulut reculer, mais le bureau l’en empêchait. Elle était par trop affolée pour se rendre compte qu’il était aussi paniqué qu’elle, en vérité elle ne voyait que ses yeux et ses yeux océan semblaient absolument déterminés.
__ Vous êtes tout pardonné, partez tranquille.
Répondit-elle précipitamment, trop vite, terrifiée avant même qu’il ne s’approche. Elle couina alors qu’il déposait ses lèvres sur son front. Elle s'appuyait si fort sur le lourd bureau dans l’idée de s’enfuir qu’il finit par bouger de quelques centimètres ce qui lui permit par un mouvement digne d’une anguille de s’écarter. Elle était bien consciente de la symbolique du baiser, elle était bien consciente qu’il n’avait pas voulu la choquer, ni abuser d’elle, ni rien de mal en vérité. Elle le regarda un instant haletante et apeurée comme un animal prit dans un piège. Il avait reculé et il faisait une révérence. Mais pour s’assurer qu’il ne s’approche plus d’elle, elle préféra courir vers sa chambre sans même prendre sa sacoche et refermer l’imposante double porte derrière elle dans un grand fracas.
__ Soyez sept fois béni. Partez maintenant, je… je dois prier. Et heu… je vais me retirer pour les prochains jours. Faites… profitez de Hautjardin.
Elle avait fermé à clé et elle tenait les portes, comme si cela allait changer quoi que ce soit. Peu de temps après, elle crut l’entendre partir, mais elle n’osa pas sortir pour autant, au lieu de ça, elle s’effondra contre la porte et se mit à pleurer. Elle hoqueta alors une prière
__ Sainte Jouvencelle -hic - ô fontaine de pureté - hic - Préserve moi du pêcher - hic - je t’en conjure - hic - puisse ma vertu rester intacte - hic - Permets que ma grâce soit - hic - aussi chaste que la tienne -hic - Sainte Jouvencelle, - hic - ô force des vierges, - hic - Soutiens moi dans ce combat, - hic - Daigne apaiser le désir et calmer la tentation, - hic - Enseigne-moi les voies de la pudeur. - hic -
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