Le visage comme toujours fermé, ne laissant passer aucune émotion, Luthor fixait une missive reçue de son oncle. Celui-ci s’enquérait des résultats des joutes et de savoir quand ils reviendraient à Belle-Île. Le seigneur insulaire soupira, profondément agacé. Les joutes importaient peu quand son frère avait failli y périr. Ce n’était pas faute de le lui avoir répété, les jeux des chevaliers étaient dangereux, mais comme toujours, Willos avait été trop arrogant, et dans un désir de s’approcher trop près du soleil, il s’y était brûlé. Il prit une plume et commença à répondre à Criston, lui assurant que tout allait bien. Il lui apprit dans ses mots que Willos avait été gravement blessé, et que s’il y avait perdu sa mémoire, au moins sa vie n’était-elle plus en jeu. Puis il donna à son oncle quelques directives, ainsi que des nouvelles de sa famille : Eddara était comme toujours invivable, Rowena respirait toujours et Megalis courait le dornien. Lorsqu’il eut fini, Luthor apposa le sceau de sa maisonnée et prit la route de la roukerie royale. Il confia la missive à un mestre et tourna les talons presque aussitôt. Un regard au soleil, dehors, lui indiqua qu’il était en retard.

Willos à peine réveillé de son accident, Luthor avait réservé un rendez-vous auprès de la dame de La Treille. Il la savait seule représentante de sa maisonnée, et espérait pouvoir trouver une alliance avec elle. Peut-être parviendrait-il à négocier la main de son idiot, mais néanmoins aimable frère. Revenu à ses appartements, il les constata vidés de toute âme – Eddara avait dû partir à la poursuite d’un de ses petits enfants, tandis que Rowena devait préparer son départ prochain pour Dorne, et Willos devait tenter de se souvenir de quelque chose…

Luthor arqua un sourcil désabusé avant de passer brièvement un linge sur son visage pour se rafraîchir, puis enfilant un pourpoint de cuir frappé des navires de sa maisonnée, se faisant fier représentant des Farman, il prit la route du salon privatisé. Sur le chemin, il trouva un page à qui il ordonna d’emmener rapidement un plateau de gourmandises et le meilleur vin qu’il trouve. Puis reprit sa marche dans les couloirs jusqu’à parvenir au boudoir. Il y trouva la dame, déjà présente, le regard rivé par la fenêtre. Il devait être un peu en retard. Il toussota pour s’annoncer.

— Ma dame, veuillez m’excuser, je pense être en retard.

S’il était désolé, son visage ne l’affichait pas. Fidèle à lui-même, Luthor était froid et inflexible. Toujours fermé, particulièrement depuis que son père s’était fait torche humaine devant ses yeux impuissants, il dirigeait Belle-Île d’une main de fer, faisant travailler Farman et Clifton de concert pour aller vers le meilleur. Et le meilleur était, à ses yeux, la voie de l’ambition. D’un geste, il l’invita à s’installer sur les divans tandis que lui-même prenait place.

— J’espère que mon invitation ne vous a pas paru malvenue, loin de moi l’idée de vous froisser. Permettez-moi de me présenter plus officiellement : lord Luthor Farman, sire de Belle-Île.

Il força un sourire, bref, de complaisance, sur ses lèvres sèches. Et guetta du coin de l’œil le page qui revenait les bras chargés.

Elle admirait la vue, fort bien. Luthor arqua un sourcil pour tenter de marquer un certain intérêt face à cette information, et d’un coup d’œil au page, il lui intima de les laisser. Il ne voulait pas d’oreilles indiscrètes pour entendre cette conversation, quelle qu’en soit l’issue. Il ne s’attendait pas à une acceptation franche et sans conditions, mais se devait de tenter. Un rapprochement avec le Bief, et tout particulièrement avec un port puissant, plus encore si celui-ci était dirigé par une femme seule… Cela valait le coup.

Elle l’excusa pour son retard avant de s’enquérir de l’état de son frère. Aucune émotion ne passa sur son visage, comme figé dans la glace, le seigneur de Belcastel paraissait insensible au sort de son cadet. C’était faux : il avait ressenti une peur profonde à l’idée de le perdre, aurait peut-être même crié, ou pleuré, qui sait, s’il n’y avait eu l’ombre d’Eddara dans son esprit. Luthor était persuadé que si Sebaston avait été là, cela ne se serait jamais produit.

— Il va bien, répondit-il. Il s’est réveillé hier, il s’en remettra.

Desmera voulut rentrer dans le vif du sujet, souhaitant savoir pourquoi lui avait demandé à la voir. Il fallait dire que les relations inter-régionales n’étaient pas tout à fait au beau fixe, même depuis la fin de la guerre. Les rancœurs étaient encore vives : Cersei Lannister avait fait exploser les Tyrell avec le Grand Septuaire, la Reine des Épines dont les lions avaient écourté la vie, et toujours ces mêmes salauds de lions d’or qui avaient placé à la tête du Bief leur chien de compagnie. La situation entre l’Ouest et le Bief lui parut grotesque lorsqu’il songea à tout cela. Il se redressa lentement et offrit à la dame un sourire plus franc, celui qu’il avait appris de son père et qu’il nommait son « sourire de seigneur » : pas trop prononcé, ni trop chaleureux, mais plein de bonne volonté. Puis reprit de sa voix profonde.

— Deux accords, plus précisément.

Il servit deux godets de vin et piocha sur le plateau un morceau de pain d’épices fourré aux mûres et aux noix. Lorsqu’il eut avalé sa bouchée, il reprit de sa voix mesurée.

— Tout d’abord, je pense ne pas me tromper en disant que vous aurez besoin d’un soutien fort à l’avenir. Je suis bien placé pour savoir que la position de seigneur est une tâche ardue, d’autant plus par les temps qui courent. Les guerres ont laissé le royaume défiguré et les tensions demeurent vives, quoi qu’en dise la Couronne. Il but une petite gorgée de vin avant de reprendre. C’est pour cela que je souhaitais vous voir, tout d’abord, afin de peut-être envisager un avenir commun. La maison Farman est suzeraine de Belle-Île depuis l’Âge de l’Aube, nous sommes puissants et respectés. D’autant que vous et moi avons en commun la mer du Crépuscule, dit-il avec un regard appuyé. Je crois ne pas me tromper en avançant le fait que mon frère et héritier, Willos, est un très bon parti.

Après sa longue tirade, il se rassit un peu plus au fond de son siège avant de piocher de nouveau parmi les douceurs qu’il avait fait amener. Puis, après avoir laissé quelques secondes à la dame afin de peser ses mots, il reprit la parole, un sourire plus doux coulant à ses lèvres.

— Ma seconde proposition est purement commerciale, rassurez-vous : je ne souhaite pas vous proposer la main de toute ma famille.

Espérant bien détendre un peu l’atmosphère, il sentait la bieffoise tendue. Et les tensions nuisaient aux affaires.

Il croisa les mains devant lui en se ravançant un peu sur le sofa, son sourire de circonstance aux lèvres paraissant taillé dans la glace. De toute sa fratrie, il était le plus froid. Même lorsque son père était mort sous ses yeux, même si cette image resterait à jamais gravée dans son esprit, il n’avait pas bronché. L’événement avait comme coulé sur lui et ce n’était que dans l’intimité de sa chambre, une fois seul, qu’il s’était permis d’afficher une rage sourde. Dans les couloirs de Belcastel comme dans ceux de Port-Réal, quand il n’était pas seul avec lui-même ou avec les siens, Luthor ne laissait jamais rien paraître. Peur, colère, tristesse, c’étaient des émotions qu’il gardait enfouies au fond de lui et qu’il ne portait pas en apparat comme le faisaient tant d’autres.

Willos, héritier, oui. Pour l’heure. Mais ce ne serait pas éternel. Il faudrait bien au sire de Belle-Île une épouse, un jour, et suivrait une descendance. Des enfants que déjà il espérait blonds et aux de glace, cet héritage Reyne qu’ils portaient avec orgueil.

— Il est mon héritier présomptif, à l’heure actuelle, répondit-il de sa voix mesurée. Mais je compte bien me marier moi-même pour poursuivre la lignée Farman. Ainsi, Willos n’aura aucune prétention sur Belle-Île et,  s’il venait à y avoir une alliance entre nous, la possibilité d’une union matrilinéaire ne serait nullement un problème. Vous auriez vos héritiez et perpétriez votre lignée, tout en étant forte d’une puissante alliance dans l’Ouest.

Il reprit une gorgée de vin tout en lui laissant le temps de répondre. La position de La Treille serait un atout stratégique pour les Farman dans les guerres à venir, Villevieille aurait été tout à fait envisageable aussi, hélas, Aelinor ne consentirait jamais à épouser Willos, bien que de ce qu’en sache Luthor, elle paraissait l’apprécier. S’allier aux Îles Bouclier serait aussi intéressant, mais il craignait que l’alliance que mettait en place sa propre sœur ne la rende impossible.

Vint le sujet de la proposition commerciale. Luthor regretta un instant que son oncle ne soit pas là, si Criston gérait la flotte Belle-Isloise, il était aussi en charge du gros du commerce. C’était lui qui établissait les routes commerciales, sa connaissance affinée du vent et de la mer lui permettant de savoir quels trajets seraient les plus judicieux.

— Nous avons déjà un accord commercial avec la maison Hightower, nous permettant d’échanger minerais et produits manufacturés contre des produits exotiques des Îles d’Été. Je suis persuadé que nous pourrions trouver le moyen de vous inclure à ces transactions. Vous jouissez du vin le plus fameux de Westeros, l’exporter par-delà la mer d’Été serait un atout commercial pour vous. De ce que je sais, vos meilleurs crus se vendent jusqu’à la baie des Serfs, mais pas plus loin. Nous pourrions tenter de le vendre à Grand Banian afin de voir ce qu’en pensent les Estiviens.

Avant de quitter Belle-Île pour Port-Réal et son tournoi, Luthor avait pris soin d’augmenter drastiquement les travaux dans ses mines. Il avait sorti des geôles de Belcastel les moindres criminels et, en échange d’une remise de peine, les avait mis au travail. Lorsque le seigneur reviendrait sur ses terres, il savait qu’il aurait toujours plus de minerais à commercer. Et il comptait bien faire de Belle-Île un port commercial renommé, même si sa position l’empêcherait d’en concurrencer d’autres comme Villevieille. Il pouvait au moins s’allier à eux pour s’élever, c’était toujours ça de pris.

La dame de La Treille paraissait nerveuse, alors Luthor força un sourire plus chaleureux à ses lèvres, tentant d’oublier ses manières froides et distantes qui pouvaient le rendre impressionnant. Il se redressa un peu et tenta de paraître plus avenant alors qu’il acceptait d’un hochement de tête ce qu’elle disait. Bien sûr, elle était très demandée – une femme à la tête d’une maisonnée si puissante, cela attirait forcément bien des vautours. Mais elle prendrait le temps d’y réfléchir, soit, c’était au moins ce qu’il espérait, qu’elle ne refuse pas en bloc.

— Prenez le temps qu’il vous faudra, ma dame, je ne suis point pressé. L’essentiel est pour vous de trouver le meilleur parti, et même si je gage que mon frère serait un bon choix pour vous et La Treille, je ne m’offusquerai pas d’un refus. Vous avez vos intérêts et j’ai les miens, l’on se doit des les protéger et les servir.

Son sourire s’affirma légèrement, se voulant rassurant face à son air un peu inquiet : il n’allait ni la presser, ni la contraindre à cette union. Au-delà de son visage, si Luthor était un seigneur implacable et déterminé, il était avant tout un frère aîné. Il savait se comporter avec un peu plus de douceur lorsque c’était nécessaire. Et face à cette dame visiblement peu affirmée, dont la région était grignotée par le rat La Néra et le fief encore affaibli des attaques Fer-Nées, il pouvait bien se montrer moins inflexible qu’à l’accoutumée. Ainsi, bien qu’impatient de connaître sa réponse à cette proposition – la guerre arrivait et il devait s’y préparer – il n’en montra rien.

Desmera parut plus sûre d’elle lorsque vint le sujet du commerce et bien que le visage de Luthor demeure figé dans sa constante expression neutre, il inclina la tête.

— L’alliance commerciale et la proposition de mariage sont indépendantes l’une de l’autre. Vous pouvez prendre l’une et pas l’autre, ou les deux, ou même aucune si cela vous chante. Bien que cette dernière option me paraisse peu judicieuse. Il ponctua sa phrase d’un sourire froid, mais néanmoins poli. Mais je suis ravi que nous nous entendions sur ce point, à mon retour à Belle-Île, je suis certain que notre récolte minière aura été fructueuse, j’ai pris le temps de m’assurer que l’exploitation de nos mines soit accrue avant de partir.

Il ne précisa rien de son intention d’augmenter aussi le prix de vente des minerais. Les temps seraient rudes, bientôt, et il comptait bien en tirer profit : s’il majorait le coût du fruit de son exploitation minière avant que les prix n’explosent partout, il pourrait se maintenir à peine en-dessous des tarifs en vigueur. Devenant le principal exploitant du secteur minier. L’idée lui paraissait bonne. S’enrichir pour financer ses navires. Toujours plus de navires.

Il hocha sobrement la tête aux mots de Desmera. Sa famille et ses intérêts passeraient toujours avant le reste, c’était certain, bien qu’il ne rechigne pas à une alliance pour consolider sa propre position. Luthor passa brièvement son regard sur le visage de son hôte, se demandant si elle plairait à Willos. Si celui-ci avait perdu la mémoire – chose que le seigneur de Belle-Île s’était bien gardé de dire à la dame de La Treille – il devait bien rester l’adorable petit con qu’il était au fond de lui. Son frère avait toujours aimé la compagnie des femmes, il les aimait belles et fraîches, mais peut-être aussi plus affirmées que celle qu’il avait en face de lui. Mais peu importait l’égard qu’il aurait pour elle, qu’elle lui plaise ou non. Car si elle acceptait, la politique primerait sur l’amour. Cette capricieuse de Megalis avait déjà fait des pieds et des mains pour épouser son dornien… Au moins jouissait-il d’une influente position à la cour et avait l’esprit ambitieux, autrement, la vacuité de l’union aurait conduit Luthor à l’interdire tout simplement. Sa sœur ne le lui aurait jamais pardonné, mais ça lui importait bien peu par rapport aux devoirs qu’il avait envers sa famille.

Il avait fait un jour une promesse à son père, se devait de la tenir.

— Je suis ravi qu’au moins l’une de ces propositions aboutisse, alors.

Si son visage n’évoquait nulle liesse, Luthor fidèle à lui-même, il était toutefois sincère. Il n’était pas aussi vicieux que sa grand-mère, bien qu’elle lui eut tout appris. Pourtant, il reprit un sourire de circonstance lorsqu’elle évoqua les minerais dont elle aurait besoin. Bien pratique pour lui qui n’avait qu’une hâte : récolter le fruit de l’exploitation à son retour pour mieux le revendre.

— Tout à fait. Puis cette alliance, notamment par la position avantageuse de Villevieille, nous garantira une quasi-exclusivité sur l’import-export avec les Îles d’Été.

Une posture qu’on leur envierait, pour sûr. Dans son esprit, le seigneur Belle-Islois repensa la carte de Westeros. Puis songea que Denfert, malgré sa place que l’on pourrait penser défavorable au commerce ouestrien, pourrait être une ouverture supplémentaire vers les Îles d’Été qu’il convoitait tant. Le fief des Uller se trouvait en bordure du Soufre, fleuve se jetant dans les mers du Crépuscule. Tout fous étaient-ils, intégrer Dorne à son trafic lui paraissait une idée intéressante. Il prendrait le temps d’y songer à nouveau mais tut pour l’heure ses pensées. Une fois de retour à ses appartements, pendant que les serviteurs achèveraient de préparer ses bagages, il se pencherait sur une carte de Westeros. Une fois le commerce avec l’archipel de la mer d’Été totalement maîtrisé, il tournerait son regard vers Essos. Peut-être pourrait-il aussi s’implanter là-bas, à l’avenir.

Tandis qu’il gardait pour lui ses pensées, la dame le devança en proposant ce à quoi il songeait. Lorsqu’elle évoqua le fait de révolutionner le commerce, un léger sourire plissa les lèvres de Luthor et il inclina brièvement la tête. Reprenant une légère gorgée de vin, regrettant un instant que le page n’ait su trouver un meilleur cru, il se pencha un peu vers l’avant et lui donna raison :

— Ma sœur se mariera bientôt au Maître des Lois, lord Uller. Nous espérons que cette alliance politique soit la porte ouverte à une activité commerciale avec Dorne. Denfert n’est pas au centre de la principauté mais je suis certain que sa proximité avec le Soufre saura nous ouvrir une voie supplémentaire avec les Îles d’Été.

Il piqua un morceau de pain d’épice dans le plateau, le mangea, et reprit la voix tranquille :

— À force d’expansion, en choisissant bien nos partenaires, je suis certain que nous saurons atteindre Essos et y dénicher des contrats des plus intéressants.

Puis il jeta un coup d’œil vers la fenêtre, qui se trouvait derrière la dame. Il ne devrait plus trop tarder s’il ne voulait pas quitter la capitale trop tard. Presque un mois le séparait de Belle-Île et son fief requérait son seigneur. D’autant plus que son imprudente de sœur le pressait par sa rencontre organisée avec les Fer-Nés. Il espérait bien que celle-ci se déroule bien et aboutisse à ce qu’elle espérait. Autrement, il craignait que le regard des Îles de Fer ne se braque sur les Farman, faisant des lions déchus le prochain repas du Kraken.

Luthor acquiesça aux félicitations de Desmera pour la remercier. Un très beau mariage, ce n’est pas le terme qui lui serait venu en premier à l’esprit. Il avait eu des idées pour Megalis. Avait songé à la marier dans l’Ouest, pourquoi pas renouer la vieille alliance avec les Fléaufort, ou encore un Crakehall. Ses pensées s’étaient même tournées vers les Lannister. Promettre sa sœur au lion pour se glisser insidieusement dans la lignée de succession de Castral-Roc, puis les faire disparaître un à un. Elle avait eu vent de cette idée, l’avait menacé. Fière et digne, Megalis aurait préféré mourir que d’être unie au lion d’or. Jamais elle ne s’inclinerait face à lui. Prête à tout pour honorer sa famille mais pas à se trahir. Il tut ces pensées.

— Je vous remercie. C’est un grand honneur pour elle que d’épouser le Maître des Lois. Il jouit d’une position influente à la cour, en plus d’être l’héritier d’une puissante maison de Dorne, c’est un excellent parti.

Il rongeait son frein. Taisait le dédain qu’il éprouvait face au dornien. Il se méfiait de cet homme comme il se méfiait de quiconque n’était pas de son sang. Seuls les Belle-Islois avaient, et toujours dans une certaine mesure, sa confiance. Mais le Scorpion avait une réputation sulfureuse, en plus de ne pas être des siens. Alors Luthor redoublait de défiance. Il voyait sa sœur s’enticher bêtement de lui et, s’il éprouvait pour elle une affection fraternelle, il ne pouvait s’empêcher de la trouver un peu ridicule. Le temps était à la guerre, pas aux mièvreries.

Il acquiesça ensuite aux mots de Desmera, l’accord trouvé serait bénéfique à la maison Farman. La main se tendit devant lui, attendant probablement un baise-main. Luthor n’aimait pas cette tradition, il n’aimait pas grand-chose à dire vrai. Mais se plia aux convenances sans rien laisser paraître. Il prit la main de la dame de La Treille et la baisa avant de se lever à son tour. Puis lui offrit un sourire plus courtois que sincère.

— De même, ma dame. Au plaisir.

Et inclinant légèrement le buste, il reprit la route de ses appartements. Il était temps qu’ils s’activent pour quitter cette cour de serpents – dans peu de temps, lui, sa grand-mère, son frère et sa sœur prendraient la route de la maison. Seules Rowena et Mellara partiraient pour les noces princières à Dorne. Lui, devait retrouver son fief et en reprendre les rênes.