L'eau peut-elle danser devant R'hllor ? [ Temple de R'Hllor Braavos]

Bien que sa ruse ait fonctionné, Melchior ne ressentait pas le goût de la victoire. Tout d’abord le combat n’était pas totalement achevé.

La suite s’en chargea. Ferrego acceptait de quitter le temple et par conséquent de s’exposer. Pour toutes protections il réclamait visiblement une jeune prêtresse.

Une personne dont il serait facile de se débarrasser une fois parvenu à la demeure des Prestayn voir même avant.

Alors qu’est-ce qui perturbait ainsi le danseur d’eau ? Il ramenait le fils prodigue comme promis.


Déjà Henosha envisageait sans sourciller, que son jeune élève parte seul. Elle devait le tenir par des chaînes bien plus solide que celles en acier.

Si Ferrego s’échappait de chez lui pour la rejoindre une nouvelle fois, Melchior n’était pas concerné du moins techniquement. Sauf qu’il mettait un point d’honneur à toujours mener sa tâche à bien dans sa totalité.

Or Ferrego était toujours d’une certaine façon, prisonnier de ce culte.

Un autre élément gênait également Melchior. Le jeune homme avait peur. Et ce n’était pas de Henosha ou de ses sbires.

Il la respectait voire l’idolâtrait, mais ne la craignait pas. Justement peut-être était-ce de ne plus être à sa proximité, qui le faisait paniquer ?

Cette réaction semblait exagérée même de la part de quelqu’un de si jeune.

Peut-être que quelqu’un de moins égocentrique aurait-il fini par comprendre ?

Melchior lui raisonnait généralement en terme d’opposition entre sa personne et les autres. Justement il reporta son attention sur la prêtresse rouge.

On sentait de l’animosité de sa part. Il ne s’agissait pas de la bouillonnante. Non c’était le genre froide et d’une certaine manière plus inquiétante.

Le spadassin venait peut-être de se faire une dangereuse ennemie. Car les pires vengeances se calculaient et prenaient leur temps.

Cette perspective l’amusa. Après tout Henosha pouvait se révéler être un adversaire intéressant.

« En effet j’ai ma réponse. » Répliqua-t-il Melchior toujours avec son air arrogant difficilement supportable.

Il tenait à se présenter comme le vainqueur, bien que le résultat demeurait flou. C’était plus par provocation que mauvaise foi.

Ensuite Melchior s’adressa à Ferrego d’un timbre plus froid et teinté d’une pointe de mépris.

« Dans ce cas partons au plus tôt, une fois que vous aurez trouvé un chaperon. »

Si après une telle réplique l’apprenti ne culpabilisait pas, c’est que son cœur était de pierre.

« Pour ma part je me contenterai de ma compagne d’acier. » Ajouta-t-il cette fois-ci à la volée.

Cette demande n’avait pas d’utilité. La remise de son arme était fort probable. Seulement le goût du spectacle l’emportait sur la nécessité chez lui.

Ainsi Ferrego et cette Mélina….. Henosha le percevait certainement elle aussi. Au vue de son intelligence le contraire aurait été surprenant. Et ça n’avait pas l’air de la déranger.

Sur certains points ses adorateurs du feu pouvaient être sympathiques. Tant d’autres cultes imposaient l’abstinence voir la castration. Quoique peut-être que cette relation les arrangeait puisqu’elle était en interne ? Ainsi ils réduisaient les possibilités d’influence extérieure.

Ferrego était « trop doux pour ce monde. ». Quel euphémisme !

Il paniquait de devoir juste sortir hors du temple. S’en était pathétique du point de vue de Melchior avec son esprit aventureux.

Mélina paraissait tout aussi paumée que lui. C’était presque trop facile. Dire que la pauvre allait devoir prochainement choisir entre son amour et ses croyances.

Un dilemme digne d’une tragédie. A ce propos Henosha était une très bonne actrice avec ses grandes tirades et son charme.

Elle ferait sans aucun doute un malheur sur une scène de théâtre. Melchior s’abstint de le lui dire.

Ce compliment ne présentait aucun intérêt. La situation ne permettait pas de la séduire. Car évidemment Melchior dans d’autres conditions y serait parvenu. En tous cas il s’en persuadait.

Son arrogance connut un ralentissement avec la demande de Henosha envers sa personne.

« Ne vous inquiétez pas. » Affirma-t-il toujours avec son surjeu. « J’assurerai leurs protections. Et personne ne s’est jamais opposé à moi dans cette ville, du moins toute personne encore de ce monde un ce jour. »

Cette dernière provocation n’atteignit pas uniquement sa destinatrice. Ferrego eut un mouvement de recul, et son visage se crispa.

La simple mention d’une mise à mort le mettait dans cet état. A croire qu’il avait passé toute son existence dans ce temple.

Pourtant comme disait les sans-visages « valar morghulis ». Alors quel mal y avait-il d’accélérer un peu les choses ?

Melchior avait bien envie de lui rappeler cette évidence. Mais il s’agissait de son client ou plus exactement du colis de ses clients. Il devait en prendre soin et le brusquer le moins possible.

Soudain une ombre encapuchonnée apparut à ses cotés avec sa lame dans les mains.

Gêné de s’être ainsi laissé surprendre le danseur d’eau se rattrapa en sortant une de ses paroles alambiquées tout en prenant la larme.

« Et voici la plus belle ou presque... »

Comme s’il n’avait pas été assez lourd il jeta un regard en coin à l’attention de Henosha toujours imperturbable.

Même s’il refusait de l’admettre complètement, Melchior espérait que la suite de cette affaire n’en ferait pas une ennemie.

Au-delà de la beauté transparaissait une forte détermination au sein de cette femme.

J'observais les deux jeunes apprentis. Ferrego avait été maltraité et pire encore par son père. Il s'était plongé dans la religion et semblait s'être apaisé ici... Mais ressortir était terrifiant pour lui. J'étais quelque peu inquiète pour lui. Melina elle était venue en même temps que lui. C'était soit le temple soit le bordel. Son choix avait été vite fait. J'observais le Danseur D'eau à ses mots et un fin sourire provocateur étira mes lèvres.

" Je suis donc la première à vous avoir désarmé ? Et m'être opposée à vous ?"

Ferrego n'aimait pas cette discussion mais Melina lui serra la main avec un sourire de malice avant de lui murmurer quelque chose. Une brioche au miel sans doute serait achetée au retour. Et l'une des prêtresses apporta l'épée alors que son porteur semblait surpris et il m'offrit un compliment. J'inclinai la tête

" Je vous remercies de ce compliment. "

Fis-je tranquillement sans rien dire d'autre. Ferrego jeta encore un regard en arrière et j'inclinai la tête avec douceur pour l'inciter à y aller et revenir.

La langue de cette femme en terme d’habilité rivalisait avec le bras de Melchior, lorsqu’il brandissait une épée.

D’ailleurs la réplique bénéficiait d’un tranchant remarquable. S’il s’était montré un peu moins loquace l’épéiste aurait pu éviter cette pique.

C’était là que se situait sa principale faiblesse : son besoin de se donner en spectacle.

Allait-il enfin l’admettre ? Visiblement non. Car il rendit d’abord un regard crispé à celui provocateur de Henosha. L’envie de riposter d’une manière ou d’une autre monta chez le danseur d’eau.

Seulement il avait une tâche à accomplir. Son professionnalisme s’opposa son orgueil. Puis une raison superficielle s’ajouta dans ce dilemme.

Cette prêtresse demeurait une beauté. Par conséquent on pouvait lui pardonner son offense.

« Vous le méritez amplement. » Dit-il bon joueur pour une fois au sujet du compliment.

Alors qu’il s’éloignait en compagnie des deux jeunes gens, un sentiment proscrit le travailla un peu.

Qui a peur de perdre a déjà perdu.

Venait-il de se faire une ennemie ? Car la suite des événements ne plairait sans doute pas à Henosha. Ferrego ne reviendrait pas aujourd’hui, ni demain, ni...

La crainte céda rapidement la place à l’amusement. Avoir une adversaire de valeur, particulière, et belle de surcroît, que demander de plus ?

Sur le chemin l’attitude Ferrego intrigua quelque peu Melchior.  Chez le jeune homme se dégageait de la crainte voir plus : de la peur.

Pourtant il s’éloignait seulement temporairement de sa supérieure avec son autorisation. Avait-il pressentit le piège ? Peu probable. Il paraissait du genre naïf.

Le danseur d’eau n’approfondit pas tellement la question. Après tout il était déjà parvenu à ses fins.

La demeure de la famille Prestayn lui tendait les bras. C’était une bâtisse ancienne et élégante. Son propriétaire actuel ne possédait lui-même qu’une seule de ces caractéristiques.

Cet homme à la mine renfrogné et au regard dur faisait plus penser à un chef de guerre qu’au marchand qu’il était pourtant.

Il attendait dans le salon avec comme toujours sa femme placée derrière lui comme un sorte d’accessoire et deux domestiques.

A sa vue Ferrego fut saisit de tremblement puis son attention se focalisa sur sa mère.

« Tu vas bien ? » Lui demanda-t-il avec étonnement.

La réponse étant évidente il se tourna alors vers Melchior, qui lui présenta d’abord un petit rictus narquois.

« La santé est un élément fluctuant. »

Le visage de Ferrego vira au blanc en un instant, celui nécessaire à la compréhension de la situation.

Son père lui se contenta d’un geste de la main dans sa direction. Les deux domestiques s’emparèrent alors de son héritier. Cet adolescent calme et effacé se transforma alors. Il cria et gesticula. Au point que les deux domestiques durent le traîner à l’extérieur de la pièce.

La scène choqua Melchior lui-même. Par contre le patriarche demeura parfaitement indifférent. Une seule personne réagit : Mélina. Elle aussi subit une sorte de transformation. La douce jeune fille se dirigea d’un air déterminé vers le père, pointa son doigt dans sa direction, et dit…. rien.

Car son interlocuteur lui infligea une puissante gifle, qui la fit à la fois chuter et saigner.

La violence ne gênait en rien le spadassin. Par contre l’inélégance s’était autre chose.

« On ne traite pas les dames ainsi. » Dit-il alors avec un air dégoutté.

Tout en s’adressant à son employeur, il remarqua l’attitude de son épouse. Sa mine triste et résignée indiquait que le père de Ferrego était coutumier du fait.

« Vous me dites comment me comporter chez moi ! » Beugla la brute en s’approchant de Melchior avec des intentions clairement hostiles.

Melchior avait été confronté à des pires menaces que cet homme. Par conséquent il ne tressaillit pas d’un cil. Il se contenta juste de descendre sa main sur le pommeau de son épée et d’ajouter une courte phrase à ce geste.

« Je pense être en mesure de dire ce qui me plaît. »

Oserait-t-il ? Se demanda le riche braavien.

Dans le doute il jugea plus sage de reporter sa colère sur une autre personne.

« Sortez de chez moi. » Cria-t-il cette fois à l’intention de Mélina.

Cette dernière dépassée s’éclipsa rapidement.

Les ressentiments du danseur d’eau envers son employeur le poussèrent à le taquiner un peu.

« Elle va certainement revenir. Et certainement pas seule. Dans ce temple une autre femme tient à votre fils. Et ce n’est pas le genre sur qui on peut porter la main sans de grave conséquence. »

La brute se tenant devant lui était aussi un négociant avisé. Par conséquent il perçut la réalité de la menace.

Il décida d’agir au plus vite. Ce spadassin arrogant était déjà parvenu à triompher de culte étrange. Alors autant faire encore appel à lui.

« Cette femme dont vous parlez. Vous accepteriez de vous en occuper ? »

« Avant que j’accepte un nouveau travail, il faudrait déjà que le précédent soit achevé. »

Le message était limpide. Le marchand tendit une bourse dont Melchior s’empara.

« Combien pour la suite ? »

« Navré mais je ne suis pas intéressé. »

La somme refusée valait largement le trouble sur la face de la brute. Doublement récompensé Melchior quitta la demeure à son tour.

D’autres opportunités l’attendaient au sein de cette ville grouillante de vie. Pourtant il resta devant la maison.

Des remords envers le pauvre Ferrego ? L’envie d’assister à la fin de la pièce ? Revoir la beauté du temple de R'hllor ?

Peut-être était-ce un peu des trois. Quoiqu’il en soit comme souvent le danseur d’eau céda à son envie.

Sa patience s’incarna en la personne d’Henosha. Elle était très élégante dans sa cape pourpre. La détermination émanant d’elle, réjouit Melchior. Il allait y avoir du spectacle.

Exceptionnellement sa réponse à la question fut brève.

« Ferrego se trouve à l’intérieur, contre son grès. »

Évidemment le spadassin ne pouvait pas s’arrêter là.

« Vous savez je suis libre tout engagement depuis peu. Si vous le désirez je peux vous accompagner. De nombreuses personnes décrivent ma compagnie comme agréable. »

Quitte à voir la fin de la pièce autant être au premier rang.

Ainsi elle ne le pensait pas capable d’avoir frapper Mélina. Melchior trouva ce détail flatteur. Enfin elle comprenait ce qu’il était réellement : pas un cupide mercenaire mais noble épéiste.

Il est vrai que le défi en lui-même l’intéressait plus que les gains. Même s’il ne crachait pas sur ces derniers.

Ce petit plaisir lui fit vite enlevé. Car Henosha proposait de l’acheter. La mention d’une mort prochaine de Ferrego le troublait bien moins.

Dénué de charme et de talent au combat, son existence ne représentait aucun intérêt.

« Effectivement ça serait fâcheux. » Parvint-il admettre.

Ce n’était pas un argument suffisant pour le libérer et surtout se brouiller avec l’influant maître de la maison Prestayn.

Une récompense conséquente ne constituait pas non plus une compensation valable.

L’acier et la beauté voilà où se trouvait les véritables motivations de Melchior.

Malgré son égo démesuré, il reconnaissait que son numéro de charme n’avait pas eu jusqu’ici prise sur la prêtresse rouge.

A vrai dire elle paraissait uniquement préoccupée par son culte. Quel gâchis ! Son regard azur, sa silhouette, sa longue chevelure pourraient lui attirer bien des prétendants et des plaisirs.

Le danseur d’eau s’imaginait non sans une certaine mauvaise foi, agir dans l’intérêt de cette femme.

Si bien qu’il lui dédia son prochain combat.

« Votre délicieuse présence me suffira largement comme paiement. » Déclama-t-il fier de sa tirade.

Il était un peu comme ces gens qui riaient de leurs propres plaisanteries. Et souvent ils étaient les seuls à le faire.

Alors que le duo se trouva devant la porte, Melchior après avoir demander la permission frappa.

Face au domestique surpris par son brusque retour, il se contenta d’une excuse assez triviale.

« J’ai oublié quelque chose. »

Le prétexte si grossier perturba le portier. Le spadassin en profita pour le pousser et entrer une seconde fois.

« Vous pourriez peut-être nous annoncer. » Ajouta-t-il à l’attention du serviteur toujours pris de court. « Si vous souvenez je nomme Melchior Zalyne et cette charmante personne est lady Hénosha. »

Le danseur d’eau réalisa un autre intérêt dans sa démarche l’amusement. En effet la situation était cocasse. Comment les différents protagonistes allaient-ils réagir ? Les possibilités étaient à la fois multiples et incertaines.

Un beau spectacle se profilait au coté d’une femme élégante. Décidément Melchior adorait son existence.

« Pas avec les femmes, seulement les dames. » Dit Melchior en prenant le bras de l’adoratrice du Dieu de la lumière.

Bien qu’il en soit satisfait cette tirade plutôt courte divergeait un peu de celles habituelles.

Après les paroles vint le temps de l’action. Du moins c’est ce qui serait produit sans l’autorité naturelle de Hénosha.

Quelle femme ! Pensa Melchior en voyant la prêtresse mater les domestiques d’un simple regard.

D’un autre coté il était déçu. Car le spadassin aurait aimé faire une démonstration de force. Est-ce que ce genre de spectacle suffisait-il à séduire Hénosha ? Probablement pas.

Toutefois le danseur d’eau appréciait toujours une occasion de se mettre en valeur.

Les cris et les bruits de coup lui déplurent également. La violence était acceptable lorsqu’on la pratiquait avec une certaine élégance. Or ce n’était pas le cas.

La si autoritaire Hénosha connut enfin une déconvenue. L’un des gardes ayant cédé face à son regard, se décida à agir du moins partiellement.

« Maitre ! » Déclama-t-il d’un timbre ambigu où se mélangeait dureté et nervosité.

Le maitre en question à savoir celui de cette maison sortit alors de la porte en provenance des cris.

Sa tenue accusait de quelques négligences depuis la dernière fois. Son teint virait légèrement au rouge. Ses cheveux étaient en bataille, et son pantalon dénué de ceinture. L’objet en question se trouvait dans sa main.

Il était facile d’en devenir la raison.

« Que se passe-t-il ? » Demanda-t-il agacé avant de percevoir le couple insolite en guise de réponse.

D’abord intrigué par la présence de cette inconnue en ces lieux, il finit par l’identifier grâce à sa tenue. Puis vint une révélation plus choquante : le retour ou plutôt le revirement de Melchior.

Car visiblement le spadassin soutenait la jeune femme.

« Sale…. » Commença-t-il à dire avant d’être coupé par le danseur d’eau à la fois par un geste et une phrase.

« Vous voulez vraiment finir votre phrase ? »

Le geste lui se résumait à resserrer le pommeau de son épée. Ce fut lui le plus efficace.

Le père indigne oublia un peu la violence, et revint à sa fonction initiale de commerçant.

« Nous avions passé un marché ! »

« Et nous l'avons mené à terme. Désormais libre de tout engagement j’ai décidé de prêter mon bras à une belle demoiselle de passage. »

Toujours à l’affut comme un véritable danseur d’eau, Melchior perçut, que le regard son interlocuteur divergeait un peu.

Apparemment il se passait quelque chose derrière lui.

Qui aurait cru que ramener un simple fils prodigue pourrait se révéler si amusant. Le Dieu Multiface en soit loué.

Décidément cet homme n’était pas digne des services de la deuxième lame de Braavos. Après son propre fils voilà qu’il s’apprêtait à lever la main sur une femme. Quelle vulgarité !

Pourtant Melchior n’intervint pas. Il savait que ce n’était pas nécessaire. Le charisme naturel de Hénosha suffit à le repousser.

Toutefois il demeurait d’autres personnes ayant été épargné par le numéro de la prêtresse. Car ils lui tournaient les dos. Et c’était bien dommage par deux fois. Déjà parce qu’ils venaient de rater un beau spectacle. Ensuite le danseur d’eau allait se charger d’eux.

Ce genre d’escarmouche ne constituait même un exercice tout juste une vague révision.

Trois leçons lui suffirent.

Toujours être à l’affût.

Melchior les entendit s’ approcher avant même que leur employeur leur ordonne.

Toujours mener la danse, c’est-à-dire conserver initiative.

Avant même qu’il soit à portée, il dégaina.

La vitesse ce n’est pas bouger vite, mais peu.

D’un seul mouvement il sortit son épée, et frappa du pommeau l’homme derrière lui. La vivacité du mouvement compensa son manque de force. Et surtout la frappe toucha le nez. Ce qui eut pour effet d’aveugler cet homme d’arme de second rang.

Le spadassin enchaîna immédiatement par un coup de taille avec le plat de son arme sur le poignet de l’homme agrippant Hénosha.

Suivirent un cri de douleur et un recul. L’articulation était brisée.

Pourquoi Melchior s’était-il retenu ainsi ?

Comme le professait le Dieu Multiface : la mort se mérite. Tel aurait été la réponse de Melchior face à cette question.

En fait il voulait éviter d’aller trop loin. Des lois subsistaient à Braavos.

Face ce spectacle le père indigne bredouilla dans un premier temps. Car il entrait dans la catégorie des brutes et non des guerriers. C’est-à-dire qu’il usait de la force uniquement dans une position avantageuse. Il était incapable de trouver une ruse ou déceler un point faible pouvant renverser une situation défavorable.

Il redevint une fois de plus un commerçant.

« Je vous promet le double de ce qu’elle vous paye. »

« Elle ne me donne rien en dehors de sa charmante présence. »

Le seigneur de la maison Prestayn eut une sorte d’absence. La situation le dépassait complètement.

Dans son univers tout était monnayable. Quant aux femmes il s’agissait juste d’une sorte d’ornement interchangeable.

Pourquoi le danseur d’eau se donnait-il donc de la peine vers celle-ci ?

Les motivations de son adversaire était-elle plus noble ? Face des traits moins fins, et une silhouette sans grâce Melchior n’aurait sans doute pas bouger le petit doigt.

Le silence fut rapidement brisé par des gémissements à proximité.

« Très chère. » Dit le danseur d’eau cette fois-ci à l’intention de Hénosha. « Je crois que quelqu’un a besoin de votre soutien. »

Quant à son ancien employeur Melchior se contenta de pointer sa lame dans sa direction en guise d’avertissement. Comme quoi il pouvait se taire de temps à autre.

Melchior espérait que sa petite démonstration impressionnerait la prêtresse. En fait elle resta de marbre. Même si ça semblait être son état naturel le danseur d’eau ne pouvait s’empêcher d’être déçu.

Il adorait avoir un public à condition qu’il soit réceptif. Hénosha le laissa en tête à tête avec le maître de maison. Les quelques instants qui suivirent malgré une certaine tension, ne causèrent aucun problème.

Chacun savait à quoi s’en tenir. L’un ne pouvait pas acheter l’autre. Et l’autre ne pouvait pas le tuer.

A la rigueur Melchior aurait pu le saigner un peu. Seulement cet adversaire était bien trop faible pour mériter le toucher de sa lame.

Hénosha réapparu avec le gamin dans un sale état.

Le spadassin n’avait pas un cœur de pierre. Et puis tabasser les gens ainsi à main nue. Quelle grossièreté !

Par conséquent il se permit une remontrance envers le père et bourreau.

« La plupart des gens traitent mieux leur chien. »

S’en était trop. Cet employé lui dictait comment se comporter au sein de sa famille.

« Je recruterais un autre, un meilleur. Et il va vous… »

« Un meilleur ici à Braavos. » Coupa Melchior en accompagnant le tout d’un éclat de rire. « Je vous souhaite bien du courage. »

Puis l’inévitable Syrio Forrel se rappela à sa mémoire. Son sourire se crispa un peu. Non Syrio n’accepterait jamais de travailler pour cette brute. Il avait des principes encore plus élevés que son rival.

Melchior constata qu’il redoutait cette confrontation. Il lui fallait vite trouver de quoi s’occuper pour chasser cette horrible penser.

Il effectua quelques moulinets tape-à-l’œil tout en rengainant avant de se rapprocher de Hénosha et de son élève.

« Vous permettez ? » Dit-il tout en soutenant le jeune homme.

Pas un frémissement ne transparut sous l’effort. Exceptionnellement ce n’était pas de l’esbroufe. Certes les danseurs d’eau travaillaient plus la technique que le physique. Toutefois leurs pirouettes exigeaient une certaine force en plus de la souplesse.

Et puis le malheureux Ferrego ne pesait pas bien lourd.

Une dernière épreuve les attendait devant la porte. Il ne s’agissait pas d’un garde armé et musculeux. L’obstacle était bien pire. C’était la mère de Ferrego.

Malgré son attitude effacée elle releva la tête, et s’adressa à Hénosha.

« Ne me l’enlevez pas, je vous en prie. »

Cette voix suppliante toucha même Melchior. Seulement il ne pouvait pas veiller sur tout le monde. Il fallait savoir se prendre en main.

Il tourna la tête vers l’adoratrice de la lumière. Comment cette femme d’apparence inflexible allait-elle réagir ?