[Braavos] Des prières pour les défunts | Ft Henosha [Terminé]

Jazara boit une autre gorgée de son jus de pêche, qui coule à la commissure de ses lèvres à cause de la grimace qui les tord. Putain. Encore quelques années auparavant, c’était à son père de s’occuper des funérailles des membres de l’équipage et de s’enquérir des rites à effectuer selon la religion suivie. Elle savait bien qu’elle devrait y passer à un moment ou un autre, mais elle espérait y échapper encore un moment.

Que les dieux aillent se faire foutre. S’ils régissent réellement la vie des hommes, alors ils sont des rois parmi les monstres.

Jazara soupire et referme sa gourde pour la rattacher à la ceinture à sa hanche. D’un geste vif – avant de changer d’avis – elle range son couvre-chef et son cache-œil dans sa besace qui cogne dans le creux de sa taille, avant de se diriger vers le temple du Maître de la Lumière. Il est impossible à manquer, avec son brasier constamment alimenté sur son toit. Au moins ne passera-t-elle pas des heures à le chercher.

Elle se fige devant la porte du temple pendant de longues secondes, quelques minutes peut-être ; elle déglutit, incapable de pousser le battant. A-t-elle le droit de souiller un lieu de culte de sa présence ? Certaine, elle n’est plus croyante, mais ce n’est pas pour autant qu’une petite partie d’elle ne pense pas qu’ils existent ; sinon, pourquoi serait-elle née ainsi ?

Peut-être devrait-elle faire demi-tour et demander à son second de s’en charger à sa place ?

L’idée même lui donne le courage d’ouvrir la porte du temple ; Xanthes lui a confié à la fois la Sirène de Rubis et son équipage, alors elle n’a pas le droit de se défausser de ses devoirs. Son regard parcourt l’intérieur du temple rapidement pour repérer le prête ou la prêtresse la plus proche et s’en approcher d’un pas vif.

Plus vite fait, plus vite quitte, n’est-ce pas ?

— Excusez-moi ?

Jazara interpelle à voix basse la prêtresse aux cheveux sombres dont elle s’est approchée, avant d’exposer calmement les raisons de sa venue.

— Un de mes membres de mon équipage est décédé et il était un adepte de R’hollor. J’aimerai connaître les rites funéraires de votre religion, s’il y en a. Nous n’en avions pas discuté avant et j’aimerai qu’il parte comme il l’aurait souhaité.

La capitaine ne se sent pas la bienvenue dans ce lieu saint. Tout lui crie qu’un monstre comme elle n’y a pas sa place et quelles sont ces ombres étranges qui dansent dans les flammes ? Est-ce la main de R’hollor la commandant de s’en retourner à son navire et de ne plus mettre les pieds ici ?

Ses mains tremblent, mais seulement à cause de la douleur dans ses articulations, pas par peur.

Jamais par peur.

Jamais.

Jazara tient sa langue alors que la prêtresse lui donne l’air de la juger et de lui faire la leçon comme à une enfant. Il y a un goût de bile dans sa gorge alors qu’elle a l’impression d’avoir de nouveau dix ans et ferme brièvement les yeux pour prendre sur elle.

Comme si tout le monde savait qu’il fallait incinérer les croyants de R’hollor. Elle venait des Îles d’Été, le Maître de la Lumière n’est pas vénéré chez eux, ou alors de façon si minoritaire qu’elle n’en a pas entendu parler.

— Nous avons pu conserver son corps en bon état jusqu’à Braavos. Je le ferais porter ici.

Autant éviter de lui dire de suite que le corps a été conservé dans une barrique de sel scellée de cire pour éviter sa décomposition le temps d’arriver à bon port. La prêtresse le découvrira sans doute assez vite et Jazara songe qu’au moins, elle ne sera pas là pour le voir.

Elle refilera cette tâche ingrate aux deux plus jeunes de l’équipage.

— Ashen. Il s’appellait Ashen.

Jazara esquisse un sourire triste en songeant à cet ancien combattant d’arène, vaincu par la gangrène. Elle aurait aimé pouvoir mieux le soigner, elle aurait aimé pouvoir arriver à Braavos avant de perdre cet homme courageux et grande gueule. Sa voix leur manquera, lorsqu’ils chanteront pendant l’entretien du navire.

Un soupir. Elle fera son deuil de retour à la maison, avec son équipage.

— Puis-je avoir votre nom ? Je ne serais sans doute pas celle à amener le corps d’Ashen ici. Je ne voudrais pas que mes hommes perdent du temps à expliquer la situation à une autre prêtresse.

Amener la barrique conservant le corps d’Ashen risque déjà d’être assez compliqué à expliquer sans en rajouter.

Henosha. Un joli prénom. Jaz acquiesce doucement, avant de répondre à son tour à la question de la prêtresse.

— Jazara Saaros, des Îles d’Été.

La capitaine imaginer sans peine Ashen esquisser un sourire à sa présentation et la tacler gentiment sur le fait que la plupart des gens se fichent bien d’où elle vient. Mais c’est plus fort qu’elle ; elle veut rendre hommage au père qui l’a adoptée et élevée et renier à chaque seconde la putain qui lui a donné la vie et le poids de ses péchés.

— Je veux bien allumer une bougie. Je vous remercie.

Jazara se saisit de la bougie tendue par Henosha et l’approche d’une autre déjà en train de brûler pour l’allumer. Elle la dépose ensuite et joint les mains pour adresser une prière silencieuse à son ami. Elle n’a peut-être plus foi en les dieux, mais s’ils peuvent passer l’éponge sur ce fait et accepter ses mots pour Ashen, cela lui suffit.

Elle tressaille à la proposition de la prêtresse, surprise, avant de hocher lentement la tête. Oui, cela lui ferait sans doute du bien de parler d’Ashen pour lui dire au revoir et partir d’ici l’esprit léger. Peu importe les ombres sur les murs et sol du temple, qui lui donnent l’impression que les mains de R’hollor s’apprêtent à la saisir pour la jeter en-dehors de ce lieu sacré.

Ce n’est qu’une illusion.

— Il était un combattant dans les arènes de Meereen avant que Daenerys ne libère les esclaves. Il ne savait plus trop où aller, ni même quoi faire. Il avait combattu toute sa vie. Il m’a demandé si je voulais bien de lui dans mon équipage. Pourquoi lui aurais-je dis non ? J’accueille qui le souhaite parmi les miens.


Un sourire tendre flotte sur ses lèvres. Au moins, Ashen aura goûté à la liberté avant de partir. N’est-ce pas le plus important ?

— « Car la Nuit est sombre et pleine de terreur ». Je crois que c’est lié au culte de R’hollor, n’est-ce pas ? Il le disait souvent.

Jaz retient de justesse une grimace horrifiée lorsque Henosha lui demande si elle ne croyait pas en R’hollor pour être aussi chaleureuse envers son équipage. La prêtresse n’a pas souhaité l’offenser et faire un scandale dans un temple n’aiderait en aucun cas la capitaine. Elle esquisse un sourire, alors que ses pensées tournent à mille à l’heure pour trouver une justification qui ne soit pas « Que les dieux aillent se faire foutre et qu’ils n’aiment pas ça ».

— Nous avons d’autres dieux dans mon pays, sans vouloir vous offenser.

Ça devrait passer, non ? Jazara ne ment pas, sans pour autant préciser qu’elle a cessé d’honorer les dieux il y a bien longtemps. Est-ce que la prêtresse la mettrait dehors, si elle la savait incroyante ? Son père a toujours fermé les yeux sur ce détail, tant qu’elle restait discrète à ce sujet ; Jaz est consciente de la chance incroyable qu’elle a eu de le croiser dans sa vie.

Elle serait sans doute morte à l’heure qu’il est, sans Xanthès, ou alors exhibée comme animal de foire dans quelque cirque.

Jazara écoute d’une oreille distraite les propos de Henosha, les yeux fixés sur la bougie qu’elle a allumée, avant de tourner à nouveau la tête vers elle lorsqu’elle cite une prière qu’elle n’a jamais entendu dans la bouche d’Ashen.

— Peut-être. Je ne l’ai jamais entendu le dire, mais ce n’est pas pour autant qu’il ne l’a pas fait.

Si Jaz ne crie pas sur tous les toits le fait qu’elle méprise les dieux, son équipage n’est pas composé d’imbéciles ; beaucoup savent qu’elle n’apprécie pas particulièrement les gens trop religieux et évitent de parler de religion devant elle.

De toute façon, vu le nombre de religions différentes au sein de son navire, cela vaut peut-être mieux que de telles discussions soient évitées.

Un rire doux lui échappe lorsque Henosha lui demande si elle est ennuyée par leur conversation. Elle hoche doucement la tête en signe de négation, avant de préciser.

— Pour être honnête, oui et non. Je ne suis pas une suivante de R’hollor, mais j’aimerai mieux comprendre mes amis qui croient en lui. Auparavant, je ne m’en souciais pas vraiment, c’était mon père qui s’occupait de tout ça.

Un sourire triste. Xanthès lui manque ; malgré les années écoulées depuis son décès, la plaie est toujours vive. Jaz se retrouve encore parfois démunie devant le nombre monstrueux de choses qu’elle doit gérer en tant que capitaine et elle aimerait tant qu’il soit encore là pour préparer la transition en douceur.

— Maintenant c’est à mon tour et je veux faire les choses bien.

Jazara ne compte pas échouer à protéger son équipage, comme son père l’a toujours fait avant elle.

Un rire échappe à Jazara alors que la prêtresse lui fait remarquer qu’elle aurait pu jeter le corps de son ami aux requins pour ne pas s’en encombrer. À ses yeux, respecter les derniers vœux des morts est la moindre des choses. Ils sont des amis, des compagnons ; ils ont été des mentors parfois. Elle ne serait pas mieux que sa génitrice si elle ne souciait pas d’eux même après leur mort.

— Même si la mer garde notre âme entre ses vagues et que pour la plupart d’entre nous, nous ne saurions vivre ailleurs, nous avons le droit d’exiger que notre dernière demeure ne soit pas au milieu des poissons.

La capitaine se redresse, un dernier regard pour la bougie qu’elle a allumé en souvenir d’Ashen, avant de faire craquer sa nuque. Une sueur froide glisse jusque dans le col de sa robe ; son malaise commence à s’intensifier. Ses yeux passent d’une ombre de brasero à une autre, inquisiteurs et inquiets, avant qu’elle n’adresse un sourire à la prêtresse.

Jaz ne compte pas montrer sa faiblesse. Elle ignore comment la prêtresse le prendrait et elle n’a pas spécialement envie d’être mise dehors parce que Henosha la soupçonnerait de quelques diableries. À raison, d’ailleurs ; si R’hollor existe, il ne doit pas apprécier sa présence monstrueuse dans son enceinte sacrée.

— À vrai dire, je crois que je ne saurais même pas par où commencer. Je ne connais pas vraiment R’hollor.

Jaz l’a déjà mentionné, non ? Bon sang, est-ce que cela sonne suspect ? Elle aurait vraiment dû envoyer son second à sa place, quand bien même cela aurait été lâche. Ashen lui pardonnera sans doute, où que son âme soit à cet instant, à moins qu’il ne sache avec son décès la vérité et qu’il la haïsse désormais.

Elle le comprendrait. Elle haït son image, après tout. Elle haït ce monstre que le miroir lui renvoie.

— Vous êtes née ici ? Vous n’avez jamais songé à partir ?

La question échappe à Jazara et elle se fustige mentalement, passant rapidement une main devant son visage pour dissimuler sa gêne brève. Voilà une question bien indiscrète, même si la partie d’elle qui hait le plus la religion et les dieux murmure que l’embrigadement depuis l’enfance est bien le seul moyen de former prêtres et prêtresses.

La capitaine sait bien que certains trouvent l’illumination au cours, voire à la fin de leur vie, mais elle ne les comprend pas, sans doute parce qu’elle est un monstre créé par les mêmes dieux qu’elle est censée vénérer. Devrait-elle les remercier de leur cadeau empoisonné et espérer leur clémence, plutôt que de vivre une vie sans prières, ni célébrations ? Elle l’ignore, mais jamais son frère ou son père ne lui ont fait la moindre remarque sur son manque d’enthousiasme religieux. Son père se doutait sans doute de ses raisons ; son frère a l’esprit libre des Îles d’Été et ne lui a jamais imposé de suivre sa propre religion, respectant ses choix sans la détester pour cela.

Jaz est heureuse qu’Henosha préfère lui poser à son tour des questions plutôt que de s’éterniser sur sa stupidité.

— Je dirais que ça dépend des équipages. J’ai pris la relève au pied levé du précédent capitaine à sa mort, mais il m’avait préparé à être sa successeuse, aussi les choses sont restées ainsi. Je savais que je prendrais sa relève, je… J’aurais juste souhaité que ce ne soit pas de cette façon.

Jazara aurait préféré reprendre la main parce que son père aurait enfin décidé de s’arrêter et de couler des jours heureux jusqu’à sa mort, vivant sur son pécule amassé au fil des ans et en s’appuyant sur ses enfants si besoin. Elle aurait aimé pouvoir compter sur sa sagesse et son affection encore de longues années.

Mais ni la maladie ni la mort ne s’embarrassent des vœux des vivants, aussi ne lui reste-t-il que des regrets qu’elle ne pourra jamais effacer.

— Et j’ai pris la mer il y a longtemps pour être libre, pour fuir une cage dorée qui m’étouffait peu à peu. Cela fait plus de vingt ans, maintenant. Le temps passe parfois si vite…

Les yeux de Jaz se perdent au fond du temple. Sa vie en tant que Jothiel lui semble si loin, comme dans un brouillard ; parfois, elle doute même que Jothiel ait vraiment existé, tant il y a si peu de lui qui a subsisté à travers les ans. Un bourgeon qui n’a jamais fleuri et dévoilé son plein potentiel, parasité par une autre fleur qui a éclos avant.

Mais Jazara préfère mille fois la fleur qu’elle est devenue que la fin qui attendait celle de Jothiel.

Un soupir, alors qu’elle se reconcentre. Elle n’est pas là pour se perdre dans ses pensées, surtout lorsqu’elles ne sont pas loin d’être déplaisantes ; elle veut plus d’informations sur R’hollor.

— Que prône R’hollor ? Quels sont ses enseignements ?

Peut-être que commencer par là n’est pas une si mauvaise idée. Peut-être qu’il n’est pas si terrible comme dieu ; Jazara peut bien rêver un peu, non ?

Jaz secoue doucement la tête lorsque la prêtresse lui adresse des condoléances – en quelque sorte ? Même avec des regrets, elle a fini par faire son deuil. Son père n’aurait sans doute pas encore vécu de longues années, après tout. La mer vole souvent du temps aux marins ; elle-même, combien de temps pourra-t-elle encore vivre avec une certaine aisance pour se mouvoir, avant que ses douleurs ne la condamnent à l’oisiveté ?

Pas assez.

—  Ne vous en faites pas, c’était il y a longtemps.

Elle écoute d’une oreille attentive Henosha, avant de se rappeler pourquoi elle ne parle pas de religion d’habitude. Bon sang, qu’est-ce qu’elle ne ferait pas pour les membres de son équipage ! Si ce n’était pas pour mieux les comprendre et s’accommoder à leurs traditions, elle ne serait pas là , aussi à l’aise qu’une moule en plein désert.

—  Oh, je vois ! Et j’imagine que l’Autre est responsable de tous les maux de ce monde.

Jaz essaie de sonner innocente, presque naïve, mais sans doute est-elle beaucoup trop amère face aux dieux pour que son sarcasme ne transparaisse pas. Évidemment qu’un dieu sera décrit comme bon par ses fidèles et le reste des ennemis. Rares sont les fois qui laissent en paix celle des autres, après tout.

Peut-être est-ce pour ça qu’elle aime tant les Îles d’Été. Ses habitants vénèrent tant de dieux qu’ils se fichent bien de la foi des autres et jamais elle n’a été forcée à prendre part à un rite pour être reconnue en tant que fille adoptive de Xanthes. Elle n’a jamais eu à prendre sur elle et à vénérer des dieux qu’elle hait, quels qu’ils soient.

Elle n’a pas demandé à naître monstre. Elle n’a rien fait pour le mériter, alors elle crache sur les dieux et leur soi-disantes justice et bienveillance.

Et elle ne croit clairement pas à ces histoires de champion. Même si elles étaient réelles – ce dont elle doute – pourquoi ces hommes et femmes d’exception choisis par un dieu serait meilleur que le reste du monde ? Ils auraient sans nul doute les mêmes défauts que leur divinité, ou que ceux dont le pouvoir a monté à la tête.

— …  Visiblement, les Autres menaçant de faire sombrer Westeros dans les ténèbres, ça l’a pas ressuscité.

Sa langue a agi plus vite que son cerveau ; Jaz se giflerait bien, pour le coup. Il y a sans doute mille et une raisons que les prêtres ont inventé pour justifier cela et elle ne fait que se mettre en position suspicieuse à trop l’ouvrir. Peut-être même que cette prêtresse considère cette histoire de Marcheurs Blancs comme un conte de Westerosi ivre, mais Jaz a rencontré des gens du Nord. Des survivants. Elle a vu dans leurs yeux qu’ils étaient sincères. Elle n’a pas besoin de plus pour les croire.

Il n’y a rien de plus terrifiant que de vieux mythes qui prennent vie et définitivement, la religion et elle, ça fait deux. Elle aurait mieux fait de partir et de s’instruire auprès de son équipage, ils auraient sans doute mieux toléré ses commentaires acérés. Peut-être. Elle n’y parierait pas sa solde.

Bien évidemment que Jazara a dit une bêtise plus grosse qu’elle. Elle l’a su au moment où elle a ouvert la bouche ; le regard de la prêtresse ne fait que confirmer qu’elle a dit pile ce qu’il ne fallait pas. Elle ne sait vraiment pas se tenir, ni quand se taire. Ou plutôt, elle ne sait plus ; les enseignements de l’autre salope ne sont même plus des souvenirs, contrairement à ceux de son père.

Elle hésite un instant à s’excuser, à essayer de récupérer ses mots maladroits et pourtant sincères, avant d’être invité à sortir du temple plutôt que de blasphémer. Rien ne rattrapera son comportement aux yeux de la prêtresse, de toute façon, alors autant suivre l’ordre dissimulé derrière son conseil.

Jaz ravale ses excuses et s'incline sans plus un mot, avant de tourner les talons pour rejoindre l’entrée du temple. À la fois une porte de sortie comme une porte qui lui est claquée au nez ; elle n'a pas intérêt à remettre les pieds de sitôt ici, ou en tout cas pas devant cette prêtresse. Tant pis pour les informations, elle les trouvera bien autre part. Après tout, c'est son boulot de récolter des informations, en partie, et elle subit déjà la haine des Dieux, ce n’est pas un blasphème de plus qui lui sera nuisible.

Elle franchit le perron avec un soulagement certain, alors que le soleil la réconforte de ses rayons chauds. Mon dieu. Non, justement, pas son dieu ; Jaz esquisse un rictus face à ses propres pensées. Elle préfère définitivement être dehors plutôt que dans ces enceintes sacrées où elle n’a pas sa place.

Peut-être est-ce pour ça aussi qu’elle est la seule enfant maudite de l’autre coureuse de remparts ; peut-être était-elle destinée au blasphème avant même sa naissance. Il faut bien un ennemi des dieux pour qu’ils aient une raison d’exister, en même temps. Sinon, ils seraient bien inutiles, juste des parasites suçant les offrandes de gens qui n’ont parfois pas de quoi remplir leur assiette le soir.

La prochaine fois, elle enverra son second faire le sale boulot à sa place.