[Villevieille] Poser un pied sur le rivage | Desmera Redwyne & Aelinor Hightower

Les troupes Hightower veillaient sur les chemins le long de la côte et il n’y avait plus eut de contrebandiers depuis un bon moment, mais ces voies restaient escarpées. Cependant magnifiques, avec vue imprenable sur le Murmure, Aelinor comptait bien les montrer à Desmera, ou peut-être serait-ce Humfrey qui lui montrerait. Elle se mit à rire quand son amie lui parla de revanche.

__ Si ce que vous m’avez dit sur Asfaloth est vrai, je n’ai aucune chance. Mais je relèverais le défi du mieux que je pourrais.


Denyse échangea quelques mots avec sa nièce et lui promit ainsi de venir à la Treille. La brune aux yeux céruléens espérait qu’ainsi, la rousse jouvencelle se sentirait moins seule, même si elle espérait surtout lui trouver un compagnon pour la vie en la personne de son oncle.

__ Ce sera avec plaisir, et je resterais tant que vous aurez besoin de ma compagnie.


En parlant de Lys, le souvenir d’Aegon fit sourire Aelinor qui baissa les yeux un instant, gênée par le désir ardent qu’elle éprouvait quand elle pensait à lui.

__ Oui, j’y ai passé quelques mois et j’ai également visité d’autres cités libres grâce aux bateaux de Tregard Omorlen. J’ai notamment rencontré une femme qui était rousse comme vous, mais bien moins avenante. Oh elle n’était pas laide loin de là, mais elle avait combattu dans les arènes, elle n’avait aucune éducation, nous avons un peu discuté, elle était curieuse, je lui ai donc parlé de Villevieille. Elle faisait partie de la compagnie dorée et s’appelait Nesora si j’ai bon souvenir.


Suite à cette conversation, tout le monde se mit à danser. Après la ronde, une danse de couple se mit en place et Humfrey, bien sûr, invité Desmera. C’était un excellent danseur et il guida la rouquine d’une main délicate et assurée à la fois. Durant toute la danse, il ne quitta pas la Redwyne des yeux, et même après qu’elle ait accepté de danser avec Gunthor et qu’Aelinor ait pris sa place, il continua à couler sur elle des regards tendres et protecteurs. Il savait qu’entre les mains de son frère, elle ne risquait rien et certainement pas l'opprobre, mais cela ne l'empêchait pas de vouloir la garder près de lui. Ainsi, il revint dès la fin de la seconde danse lui proposer de profiter de la suivante avec lui. La Hightower dansa alors avec son père. Un quatrième danse commença et Ser Baelor alla se rassoir tandis que le fils aîné de Lady Leyla et de Ser Jon Cupps s’approcha de l’invitée d'honneur pour lui demander une danse. Le chevalier en gris ne vit pas d'un bon œil qu’un autre séduisant célibataire de la famille approche la rousse jouvencelle de si près, mais par courtoisie, plus pour la rousse jouvencelle que pour son neveu, il ne s’accapara pas pour autant la danse, la laissant choisir en regardant le jeune homme d’un air glacial. C’est alors qu’Aelinor sauta dans les bras de son cousin et se mit à l’entrainer avec elle pour danser la folle farandole que les musiciens jouaient. Humfrey eut un léger sourire, reconnaissant bien là sa nièce adorée et il tendit la main à Desmera pour la faire danser à nouveau. C’est avec un sourire et les yeux plongés dans les siens qu’il la faisait tournoyer, la soulevait par la taille avec fermeté sur les nombreux sauts de la farandole, tenait délicatement les doigts de la belle en posant sa main sur son dos, pas trop bas par bienséance et afin de mieux la guider lorsque les coupes se rapprochaient sur quelques pas avant de s tourner autour, les mains jointes.


Après cette danse épuisante, Aelinor s’effondra sur sa chaise et Desmera ne tarda pas à la rejoindre. Les jeunes hommes restaient sur la piste demandèrent à l’orchestre une musique pour danser en ligne et firent une démonstration de leurs talents à ses dames essoufflées.

__ Ici, aucun homme ne vous marchera sur les pieds, Ser Humfrey encore moins que les autres. J’ai vu comment il vous regardait…


Tournée vers son amie, Aelinor lui sourit. Elle se souvenait que les frères de celle-ci n’étaient effectivement pas aussi doués, ou simplement manquait-il d'entraînement peut-être. Elle avait dansé avec eux au mariage de Denyse.

__ Toute à l'heure, vous me disiez que vous prendriez ce qui se présentait malgré votre situation, je vous ai répondu que vous méritiez le meilleur. Humfrey n’a ni terres ni titres à transmettre, et c’est sans aucun doute le meilleur homme que je connaisse. Je sais que votre devoir vous enjoint à prendre votre temps et à peser le pour et le contre, mais s’il vous plaît, songez à ce qu’il pourrait être pour vous si vous le souhaitez.


Danses et rires continuèrent, Humfrey invita Desmera et seulement elle plusieurs fois encore, Gunthor dansa avec son épouse et Aelinor tint le cousin à distance de l’oncle et de la rousse jouvencelle jusqu’à ce que la fatigue ait raison des plus âgés, puis, peu à peu, de moins en moins de danseurs se retrouvent sur la piste. Lady Redwyne prit elle-même congé, et si certaines révérences polies saluèrent son départ, Denyse la serra dans ses bras après une seconde d’hésitation et le grand chevalier blond lui fit un baise main retenant ses doigts dans les siens quelques instants de trop. Tout le monde était ravi de la soirée ,parce que même sans lien du sang, la famille comptait à présent un membre de plus.


Humfrey prit Aelinor par le bras pour monter les imposants escaliers jusqu'à leurs chambres respectives et ils échangèrent quelques mots sur la journée passée et elle à venir. La beauté de Desmera fut le sujet principal du chevalier et la belle et fructueuse alliance à venir celui privilégié par la brune aux yeux azur. Elle lui parla de la piste dorienne et lui promit de le tenir informé si elle en apprenait davantage et avant de la quitter au seul de sa chambre, il l’embrassa sur le front et se disant qu’il aurait aimé que ce soit la Redwyne. Il adorait sa nièce, mais la rouquine occupait ses pensées et il eut du mal à s'endormir en repensant à cette journée, malgré la fatigue bien présente.


Un cri retentit dans la nuit et deux gardes accoururent devant la porte de l’invitée d’honneur pour s'enquérir de sa sécurité. Ils furent rapidement rassurés par le soldat Redwyne qui tenait la porte et s’éloignèrent. Au matin, Gladys porta son petit déjeuner à la rouquine tandis que le château commençait à s’animer, les chevaliers se préparant pour l'entraînement et les dames se retrouvant au petit salon pour grignoter. Aelinor laissa Desmera vaquer à ses occupations préférant lui laisser un peu d'air elle lui envoya cependant un mot pour la prévenir qu’ils se retrouvaient tous à 11h devant la grande porte pour aller à la messe et qu’elle serait ravie de l’y voir. Il y avait bien dans la cour un petit septuaire privé,, mais les Hightower avaient l’habitude de se rendre en ville pour l’occasion, afin de prier au Grand Septuaire de Villevieille, ancien siège de la foi et de partager le sermon du septon avec leurs gens. Ainsi, toute la famille était réunie devant carrosses et chevaux pour aller prier.

Denyse, veuve Redwyne sourit et s’inclina pour remercier sa nièce de ses bons mots, puis la conversation reprit entre les deux jouvencelles.

__ Oui, c’est très étrange, je crois que ce sont des esclaves qui combattent dans les arènes.


Suite aux danses, qu’elles soient endiablées et sautillantes ou plus lentes et gracieuses, Aelinor se rassit, quelque peu fatiguée par les efforts et l’heure tardive. Peu nombreuses étaient ici les jouvencelles de son âge, elle n’avait que rarement de compagnie pour rivaliser sur la piste de danse. Évidemment ses tantes dansaient, mais rarement jusqu’à en perdre haleine et le plus souvent avec leurs époux. Elle avait donc généralement l’embarras du choix sur ces cavaliers et pouvait donc attester qu’Humfrey était l’un des meilleurs. Mais tous étaient de sa famille et la venue de la Redwyne était rafraîchissante dans cet entre soi. Cela avait cependant quelques avantages, notamment celui d'être certaine qu'aucun d’entre eux ne dansait avec elle pour la séduire, ce qui avait quelque chose de confortable, elle n’était ainsi pas en représentation et eux ne cherchaient pas à en profiter. Elle était certaine que, si certains pensaient séduire Desmera, ils ne dépasseraient pas les limites de la bienséance. Pour les plus débauchés, y avait suffisamment de prostituées à Villevieille pour se satisfaire les hormones et éviter tout dérapage avec un Lady de haute noblesse.


Aelinor ne fut pas surprise de voir son amie rougir à l’évocation d’Humfrey, c’était un homme fort agréable, avenant et attentionné en plus d’être bien fait. Elle fit mine de ne pas réagir lorsque celle-ci répondit qu’elle songeait déjà à ce qu'il pourrait devenir pour elle, mais elle en était ravie.

__ Avec plaisir Desmera, en tout cas ici et lorsque nous sommes en privé. Je préfère que nous gardions l’apparence d’une certaine distance entre nous lorsque nous serons à la capitale. Vous… tu n'imagine pas ce qu’une telle familiarité pourrait engendrer de rumeurs.


La rousse jouvencelle fut une fois de plus enlevée à la brune aux yeux azur par le chevalier blond puis par la fatigue de la nuit qui avançait. La Hightower ne tarda pas à rejoindre ses pénates au bras de son oncle sans lui dire quoi que ce soit de ce que Desmera lui avait avoué. Il faudrait être aveugle, et Humfrey ne l'était point, pour ne pas voir que la Redwyne n’était pas insensible à la cour qu’il lui faisait. Mais elle préférait ne pas intercéder entre eux et laisser les choses se faire, après tout, elle en avait déjà bien assez fait avec l’invitation lancée à la Lady de La Treille et avec le traquenard de l’après-midi.

__ Merci Desmera, vous êtes flamboyante.


Ces cheveux vraiment c'était magnifique, Aelinor était un peu jalouse. Elle laissa son amie observer la cité blanche millénaire durant le trajet et Humfrey l’emmena jusque devant la statue immaculée du Père. Les gens s’inclinaient au passage de la famille qui traversa la saint batiment pour s’installer sur les bancs du premier rang et écouter le sermon du Septon. L’office touchait à sa fin, pourtant, personne ne quitta le Septuaire avant les Hightower qui traversèrent la foule et passèrent les portes Humfrey attendit Desmera qui allumait des bougies pour veiller sur elle pendant que les habitants pauvres ou riches sortaient du septuaire. Une charrette attendait dehors devant le parvis, les enfants de la famille hissés dans le chariot passaient le pain qu’il contenait aux dames qui le distribuaient à tous ceux, souvent les plus pauvres, qui en réclamaient. L'escorte assurait la sécurité empêchant toute bousculade, mais les habitants étaient calmes et disciplinés, sachant que ce rituel bien huilé avait lieu tous les jours et que si le pain venait à manquer, ils auraient quelques sous pour en acheter. Ce pain était bien évidemment payé aux boulangers de la cité par le Sire de Grand Tour. D’ailleurs,    lui, ses frères et beaux frères étaient alignés sur le côté. Ils seraient les mains des notables qu’ils connaissaient et échangeaient quelques mots. Les uns et les autres se connaissaient, on demandait des nouvelles et si les roturiers parlaient avec respect, les nobles connaissaient les prénoms de leurs interlocuteurs et de leur épouse, fils aîné, voir plus.


Riant à la remarque de Desmera, Humfrey la regarda avec un sourire et serra un peu plus sa main dans la sienne avant de reporter son regard sur la foule devant eux qui devaient contourner.

__ Si vous vous envolez, je chevaucherai un aigle pour vous rejoindre.


Humfrey rejoignit ses frères avec Desmera à son bras et Aelinor l’invita à prendre une miche de pain pour la donner à une vieillarde avant de s’adresser à une jeune femme.

__ Bonjour Joline, comment se porte Donel ?
__ Il est toujours malade Dame Aelinor.


La brune aux yeux céruléennes glissa en plus du pain quelques pièces dans la main de la jeune mère.

__ Voici pour payer les remèdes. Je vous envoie notre Mestre, sans faute, dans l’après midi.


Joline s’inclina et remercia la Hightower qui ne manquerait pas de tenir parole pour que son fils soit correctement soigné. Lorsque le parvis du septuaire ce fut vidé, la famille retourna à Grand Tour en échangeant quelques informations sur les personnes avec qui ils avaient discuté. Décès, naissance, rumeurs, achats ou vente, ce moment était l’occasion de prendre le poul de la ville et de sa population, de garder le contacte avec leurs gens et de faire leur devoir d'aumône.


Tous se retrouvèrent en début d'après-midi devant les écuries, les chevaux étaient sellés, Aelinor avait une large robe de laine grise avec laquelle elle pouvait monter à califourchon, suffisamment longue pour ne pas découvrir ses jambes une fois à cheval. Elle portait un pantalon en dessous pour le confort et un manteau vert de gris fendu à l’arrière, un chignon et un chapeau bien fixé sur sa tête pour éviter de salir ses cheveux. Quant à Humfrey, cette fois il avait abandonné son armure de plate pour une tenue d'équitation plus confortable, mais néanmoins faite de belles étoffes et galonnée de rubans argentés brodé de la tour Hightower. Son épée à la ceinture, il sourit à la rouquine.

__ J’étais surtout impatient de vous retrouver ma Dame et détrompez vous, j’étais un élève calme et assidu, même si je l’avoue j’ai toujours préféré l’équitation et l'escrime aux livres, contrairement à ma nièce.


A la question de Desmera, les jeunes gens répondirent en chœur qu’ils étaient prêts et se mirent en selle attendant que la rousse jouvencelle soit prête pour sortir de la cour au pas. Ils empruntèrent un chemin qui s'enfonçait dans la campagne pour avoir la latitude de faire une course et prirent le temps d’échauffer graduellement les chevaux avant d’arriver à un champ parfait pour une course.

__ Je l’ai vu combattre, les Sept soit bénis, uniquement contre un de ses compagnons, nous n’avons pas subi la moindre attaque. Mais elle s'est farouchement battue, je ne mettrais pas en cause sa parole. Les cicatrices qu’elle avait en attestent également.


Aelinor voyant que Desmera avait compris les enjeux de préserver les apparences à Port-Real lui sourit d’un air entendu et appuya le propos d’un clin d'œil complice.


Humfrey accompagnant la rousse jouvencelle sourit. La replique de la jeune femme était un bon signe, elle était receptive à la cour qu’il lui faisait et il comptait bien être là, effectivement, pour elle, quoi qu’il arrive, s’il l’épousait finalement. Le temps déjà passé avec elle lui faisait penser qu’elle était une belle personne et il avait envie d’en apprendre plus, mais ne voulait pas cependant la brusquer. Flamboyante, c’était le mot, ses cheveux de feu, ses yeux vairons, elle avait un  charme fou. Sa bouche gourmande était à se damner, elle lui ferait oublier son devoir de chevalier s’il n’était pas résolu à la traiter avec toute la délicatesse qu’elle méritait et toute la courtoisie due à son rang.

__ Ce n’est pas grand chose. Nous ne saurions laisser nos gens avoir faim et être malades alors que nous ne manquons de rien et avons à disposition les meilleurs Mestres. La Mère d’en haut nous enseigne la miséricorde et le ferrant l’humilité, quand à l’aïeule elle nous montre la voie pour construire un monde meilleur. A notre niveau, notre devoir est de suivre leurs préceptes autant que nos âmes de mortels nous le permettent.


Vraiment, la brune trouvait cela normal de rendre un peu de la chance qu'elle avait eut par sa haute naissance et de l'argent que sa famille amassait notamment grâce aux travail de ces personnes. C’était elle qui avait remis cela en place quand elle était encore à Villevielle, mais elle n’était pas la première Hightower à préférer l’action à la contrition dans sa foi et à proposer le pain aux habitants de la cité. Le devoir des Seigneurs était la protection envers leur peuple, protection armée en premier lieu, en échange du droit de ban, mais protection spirituelle et financière également. L’une des familles les plus riches du continent pouvait se le permettre. Quant à la Redwyne, il fallait voir.

__ Nous faisons cela depuis plusieurs années, cela n’a pas été facile au début, les gens se bousculaient de peur de ne pas avoir leur miche de pain. Il a fallu de la patience et du tact. Nous avons tenté plusieurs options, de la tournée dans les quartiers à l’invitation à Grand Tour pour les nécessiteux. Tu peux essayer de faire quelque chose à Port-Ryam pour commencer, et tu verras bien comment cela est accueilli par tes gens. Denyse pourra t’aider, elle était déjà mariée quand nous avons commencé, mais elle participe chaque jour depuis son retour à Villevieille, elle connaît bien le rituel.


Baelor et Rhonda n'auraient jamais accepté que sa fille se montre en pantalon, même à Grand Tour au sein de la famille. Elle avait déjà dû faire des pieds et des mains pour que son père accepte qu’elle monte à califourchon. Elle avait argumenté des jours durant pour pouvoir se faire faire une robe qui ne laisserait rien voir de ses jambes ou même de ses chevilles. Il avait refusé craignant qu’elle puisse perdre sa virginité à cause de l’équitation. Elle avait joué sur ses sentiments de père, arguant que si elle se tuait, il ne pourrait s'en prendre qu’à lui-même et qu’elle espérait qu’il se satisfasse qu’elle soit morte vierge, mais même ainsi, il n’avait rien voulu entendre. Pour le convaincre, elle avait dû proposer de se soumettre à des examens réguliers de son hymen pour pouvoir attester qu’il était toujours intacte et pouvoir dater et documenter les circonstances de sa rupture le cas échéant. Les Sept étaient témoins que cela lui coûtait bien cher d’avoir obtenu le droit de monter comme un homme, écarter les cuisses devant une septa tous les mois n’était pas une partie de plaisir. Son entêtement avait payé et malgré sa pudeur ainsi bafouée, elle refusait de céder maintenant qu’elle avait obtenu ce qu’elle considérait comme une victoire, même si elle l’était à moitié car elle devait faire fi de l’immense gêne occasionnée par ses examens. Heureusement, elle était toujours intacte et l'histoire restait entre son père, la septa et elle.

__ Dans ce cas, nous sommes fait pour nous entendre.


Répondit Humfrey avec un sourire charmeur. Il se mit devant et Asfaloth le rattrapa bien vite en sautillant presque sur place. Il éclata de rire tant on pouvait lire dans l’attitude de la jument qu’elle voulait en découdre et n'appréciait pas le moins du monde d’être ailleurs que devant.

__ Hé bien Ma Dame, vous avez une monture de caractère. Elle vous ressemble sur ce point, délicate, magnifique et néanmoins fonceuse.


Gunthor aurait préféré que l’on prenne le temps d'échauffer les chevaux qui sortaient de l’écurie, mais les Hightower se préparèrent néanmoins sur la ligne de départ lorsque Desmera proposa une course.

__ Allons y… 3, 2, 1, PARTEZ !


La Hightower talonna son cheval, mais malgré ses efforts, La Redwyne et sa monture bondirent devant comme un ressort se détachant dès les premières foulées. Les cavaliers se penchèrent en avant et acclèerèrent, atteignant une vitesse folle, mais quand ils atteignirent la moitié de la distance, seul Aelinor était encore en mesure de gagner. Cette dernière talonnait la rouquine poussant son meilleur cheval comme jamais. En effet, cette fois, elle avait prit son coursier et non l’un de ses palefroi, plus rapide et plus maniable, mais cependant moins beau. Le cheval n’avait rien de spécial en dehors de sa robe grise pommelée, mais c’était une bonne monture pour les balades, la chasse et les courses. Mais après que la rouquine fit encore accélérer sa jument, Aelinor ne parvint plus à la rattraper. Elle finit deuxième, Humfrey troisième et Gunthor bon dernier. Ils laissèrent ensuite marcher les cheveux tranquillement parcourant la campagne et discutant jusqu'à Grand Tour.


Ils partagèrent un diner sans extravagance cette fois, mais préparé avec soin et gout tout de même. Baelor proposa une chasse à cour pour le lendemain matin.

__ Chassez vous Dame Redwyne ? Il faudra se lever tôt, nous partirons au lever du soleil, alors pas de danse ce soir.

__ N'aies crainte Desmera, quand tes gens auront faim tu le sauras. Il vaut mieux s'en rendre compte et agir avant que les choses dégénèrent en émeutes, mais il y'a toujours des signes. Ici cela a commencé avec la guerre des cinq rois. Entre les impôts, les réquisitions de vivres et la menace fer-nés qui pesait sur le commerce les plus fragiles ont commencé à manquer. Quand nous avons levé le ban pour Renly, certains ne se sont pas présentés et quand ils ont été arrêtés, j'ai discuté avec eux. J'ai compris que des bras en moins dans une famille qui peinait déjà à joindre les deux bouts pouvaient les faire basculer dans la plus sordide des misères. Alors je leur ai juré sur la mère que leurs enfants ne manqueraient de rien pendant leur absence. C'est comme ça que tout a commencé et je suis très contente de faire cela pour eux. Depuis la situation s'est nettement améliorée, les nécessiteux sont toujours moins nombreux, mais nous continuons. C'est l'occasion de se tenir informé de la situation des petites gens, de leur montrer que nous sommes là pour eux et je gage que leur loyauté en est renforcée.


Aelinor était consciente qu'elle serait jugée à son apparence toute sa vie. Aussi elle mettait un point d'honneur dans le fait d'être toujours apprêtée selon son rang quitte à n'avoir rien de confortable. Son père et sa mère l'avaient éduquée ainsi et au fond elle n'avait pas le choix, les Hightower étaient scrutés par leurs gens et par les autres seigneurs du Bief et plus largement du continent. Leurs vêtements devaient refléter tout à la fois la fortune, la puissance, la noblesse et l'histoire de leur maison millénaire. L'habit ne faisait peut être pas le septon, mais un septon se devait de porter l'habit, c'était dans l'ordre des choses, comme le sang bleu coulant dans ses veines lui donnait le pouvoir de gouverner et le devoir de le faire au mieux.


Humfrey sourit à la remarque de Desmera, lui aussi pouvait constater qu’ils avaient des choses en commun et qu’il n’avait aucun besoin de se forcer pour se trouver des atomes crochus avec elle. Bien au-delà de son physique enjôleur, il l'appréciait pour ce qu’elle était. Il appreciait nettement moins l’idée que sa jument la mette par terre, mais cela semblait amuser la jeune femme, alors il ne fit aucune remarque, se contentant d’arquer un sourcil et de rire. Il se dit que lui aussi aimait les chevaux difficiles et que sa crainte de la voir blessée à cause d’Ashaloth, bien que légitime, était déplacée. Après tout elle montait très bien et à l’évidence avait appris à ne faire qu’un avec sa monture quitte à enlever le mors. Aelinor en revanche aimait les chevaux bien dressés, qu’ils puissent avoir un trop plein d'énergie ne la dérangeait pas, il fallait qu’elle se plie à sa volonté et non l’inverse. Elle était une bonne cavalière, belle assiette, techniques et aides irréprochables, main naturellement légère et jambe discrète, elle avait appris avec les meilleurs, tout comme ses oncles. Mais elle n’avait presque jamais connu de monture récalcitrante, une seule en fait, qui était parvenue à la mettre par terre. Elle n’avait pas bien pris de se retrouver le cul dans la sciure et sa belle tenue toute crottée. Elle avait immédiatement rendu le rênes aux palefreniers, leur confiant le soin de remettre le rebelle à l’endroit de gré ou de force et de réfléchir à deux fois avant de lui proposer à nouveau de poser son noble fessier sur un tel engin. Ils s’étaient bien gardé suite à cela de lui confier un bourrin difficile sans avoir pris le temps de le rendre docile. Pour elle, il était clair qu’un cheval devait obéir et qu’elle avait autre chose à faire que de parfaire le dressage d’un équidé.


Tandis que le coursier d'Aelinor peinait à se calmer, cabriolant sur place et donnant du fil à retordre à la jouvencelle, Desmera salua sa performance. Elle se mit à rire en répliquant, légèrement essoufflée et jouant dans ses doigts pour que le hongre cesse de sautiller et se remette sur la main :

__ Brume c'est bien battue, mais Ashaloth est vraiment trop rapide et toi certainement meilleure cavalière que moi.
__ Oh oh, Lady Aelinor reconnaît être inférieure à quelqu'un dans un domaine ?!


Fit Gunthor d'un air entendu en regardant son frère qui ajouta en riant :

__ Lady Desmera je ne sais pas ce que vous lui avez fait mais je crois que vous avez une bonne influence sur notre chère nièce.
__ Je reconnais qu'à force de végéter au Donjon rouge, je manque de pratique.


Répondit la jeune femme d’un air courroucé en regardant tout le monde de haut avant de rire elle aussi.

__ Ah je me disais aussi.


Ses oncles savaient que la brune aux yeux céruléens ne s'avouait jamais vaincue et qu'il était presque impossible qu'elle accepte une défaite. Mais le plus important n’était-elle pas qu’elle accepte d’en rire ?

***

Une fois encore, un hurlement de terreur retentit dans la nuit, alarmant les gardes qui veillaient sur le sommeil des nobles. L’un d’eux courut chercher Humfrey qui déboula dans le couloir desservant les appartements des invités en chemise avec un pantalon de lin noir enfilé à la hâte, épée à la main pour protéger la belle si besoin. Peu de chance qu’un intru se soit faufilé pour l’agresser en plein cœur de Grand Tour, maison n’était jamais trop prudent. Voyant que Dandelion n’avait pas sorti les armes, pas plus que les gardes au bout du couloir et que l’agitation s’était déja calmé, le chevalier baissa sa lame mais ne put la ranger, n’ayant pas pris le temps de boucler son baudrier.

__ Comment va Lady Redwyne, que s'est-il passé ?


Il connaissait le protecteur de la jeune Dame pour avoir guerroyer à ses côtés.

***

Le soleil se levait à peine que les chevaux sellés attendaient déjà leurs cavaliers dans la cour. L’importante meute de chiens Beagle hurlaient et couraient en tous sens attendant impatiemment le signal du départ. Lances, arcs, épées, les hommes étaient équipés pour chasser du beau gibier et certaines femmes également. Aelinor, elle n'avait aucune arme, elle se contenterait de suivre le groupe car la chasse qu’elle pratiquait elle n’était pas compatible avec l’invitation de Baelor et qu’elle ne voulait pas délaisser son amie. Elle portait une robe de lin vert clair brodée d’argent et une sur-robe de velours vert sombre aux larges manches doublée de brocart et au col en V ourlé de fourrure grise et fermé devant par une large ceinture de galon argenté avec des tours et une boucle en argent ciselé de motifs floraux. Sa longue cape de laine gris sombre dotée d’un large col de fourrure couvrait ses épaules et la croupe de sa monture. Elle n’avait pas de chapeau mais une simple tresse qui coulait dans son dos. Les trompettes retentirent et la troupe sortit de la cour au pas, devancée par les chiens, avant de prendre le petit trot vers le bois.

__ Ne t'inquiètes pas, il suffit de savoir monter à cheval et j’ai vu que tu te débrouillais très bien. Par contre, il faut éviter de passer devant le groupe pour ne pas effrayer le gibier avant que les chasseurs ne soient dessus. Si tu penses que ta jument ne va pas apprécier, nous pouvons te prêter un autre cheval. Nous allons chasser le gros gibier à cours dans notre bois, la plupart des femmes suivront les hommes, pour certaines qui craignent la vue du sang, de loin. Mon père te proposera peut-être une mise à mort en tant que seigneur invité, mais ce n’est pas certain étant donné que tu es une femme et s’il le fait, tout le monde comprendra que tu refuse.


Humfrey s’approcha des deux jouvencelles et les salua ainsi que les deux épées liges qui veillaient sur elles. Il avait entendu sa nièce expliquer le déroulé de la chasse et en avait donc conclu qu’elle n’était pas coutumière du fait, il proposa donc de lui enseigner quelques rudiments.

__ Lady Redwyne, je me ferais un plaisir de vous apprendre à tirer à l’arc si vous le souhaitez. Ma nièce a toujours refusé de toucher une arme et je n’ai ainsi jamais eut personne pour partager ma passion, mes frères préférant la lance à l'archerie.

__Par les sept, je me garderai bien de monter un étalon, je préfère les juments pour ma part. Mais tu vois Humfrey, elle a l'occasion de s'exercer souvent, contrairement à moi.


Aelinor était bien consciente que ça n'était pas la seule raison de la victoire de la rouquine, la première étant certainement les qualités de vitesse d'Ashaloth. Quant aux mâles, la simple vue de leur gigantesque verge pendante et dégoûtante lui donnait la nausée. Elle pouvait éventuellement supporter les hongres, mais certainement pas les entiers qui, à peine voyaient-ils une jument en chaleur, perdaient toute raison. Quand elle était enfant, l'étalon de son père avait essayé de monter sa ponette alors qu'elle était sur son dos, elle en avait été grandement traumatisée. Personne, alors, n’avait trouvé bon de lui expliquer les choses clairement et le malaise s’installait dès qu’elle évoquait l’incident. Son imagination d’enfant faisant le reste et le mystère entretenu par les adultes autour de cela s’ajoutant, son souvenir de la scène était devenu horrifiant. Quand quelques années plus tard elle avait compris que c'était ainsi que les chevaux faisaient les poulains et que c’était sensiblement la même chose chez les humains, elle n’en était pas sortie rassurée le moins du monde quand à la nuit de noces qui l'attendait.

***

Mystère encore. Dans la nuit noire, le couloir était seulement éclairé de quelques torches. Humfrey renvoyé à ses pénates par les mots de l’épée lige de la rousse jouvencelle ne trouvait plus le sommeil. Il ne se satisfaisait pas de la réponse de Dandelion au sujet de Desmera. Il ne remettait pas en doute l'intégrité de la Redwyne, son protecteur n’aurait jamais abandonné sa sécurité sans cela, mais il y avait quelque chose qui clochait. Aucun intrus cette nuit-là, ni rien qui justice le cri qu’elle avait poussé. Et pourtant, ses hommes l'avaient bien entendue hurler de terreur. Il se promit de monter la garde la nuit suivante près du couloir pour en apprendre plus. Il en parlerait avec Aelinor également, la brune avait eu quelques réveils en sursaut après l’explosion du Grand Septuaire, peut-être s’agissait-il du même genre de mal.

***

Un grand sourire étira les lippes d’Humfrey quand Desmera lui dit de rejoindre les hommes qui suivaient les chiens.

__ Vous ne me privez de rien Lady Redwyne, je peux chasser quand je veux mais je n’ai pas tous les jour l’honneur d’apprendre à la Dame de La Treille à tirer.


Il s’inclina et Aelinor rit à l’autre remarque de la jeune femme.

__ Bien sûr, je comprends. Je dois avouer que ne sais pas ce que cela peut faire de monter sans corset dans une robe légère ou avec pour seul bas un pantalon. Cela doit être nettement plus confortable que cette tenue qui pèse une tonne, mais je crois que mon père me renverrait vite fait me changer si je sortais comme toi. J’imagine que le tiens n’était pas aussi attaché aux apparences et à présent, tu fais bien ce que tu veux.


Sur ces mots, la chasse commença et ils trottèrent un moment pour rejoindre le bois. Pendant ce temps, Humfrey, qui était resté avec les jouvencelle, reprit :

__ Tirer à cheval n’est pas des plus simple et si vous le souhaitez, je vous montrerais à terre également. Mais vue votre niveau d’équitation, vous pouvez d'ores et déjà essayer.


Fit Humfrey avant d’expliquer la marche à suivre à Desmera tout en faisait lui-même les gestes qu’il décrivait.

__ Vous faites un nœud à vos rênes, indispensable pour pouvoir les lâcher en toute sécurité. Alors, vous dirigez votre cheval avec vos jambes et votre assiette. Ensuite, vous prenez une flèche et vous encochez, puis vous bandez l’arc, comme ceci. Et pour finir, vous lâchez la corde.


Partant à toute vitesse, la flèche alla se ficher dans l’arbre que le grand blond avait visé. Il partit au galop pour la récupérer avant de revenir auprès des jeunes femmes. Une fois la troupe arrivée sous les frondaisons, elle s’arrêta, les chiens cherchant une piste à exploiter. Aelinor prit le petit galop pour rejoindre les hommes et laisser les deux tourtereaux tranquilles. Humfrey profita du fait qu’ils étaient tous arrêtés à l’orée de la forêt pour détacher le deuxième arc qui était attaché à sa selle et le donner à Desmera, mais sans flèche.

__ Essayez déjà de tendre l’arc. Je vous en ai apporté un mieux que le mien pour débuter.


Son arc personnel était très dur à bander, un arc dur adapté à un bras d’homme expérimenté.


Devant, les chiens avaient fini par trouver une piste et la troupe repartit, les chasseurs au grand galop pour pouvoir suivre les chiens, les moins téméraires au pas, profitant seulement de la balade. Humfrey proposa à Desmera de rattraper les cavaliers de l’avant. Au vu du bruit et de l’agitation, les chiens avaient débusqué quelque chose et ils n’auraient aucun mal à se porter à la hauteur des autres en quelques minutes. Ils étaient à quelques foulées de la meute, les hommes avaient sorti les lances les femmes leurs arcs, c’est alors qu’un imposant sanglier sortit des fourrés. Rabattu par les chiens, il était furieux et il chargea sans hésiter, si tous purent l’éviter sans problème, Aelinor se retrouva par hasard pile sur sa trajectoire et hurla de terreur en voyant l’animal lui foncer dessus. Brume se cabra et bondit au triple galop, manquant de peu de désarçonner sa cavalière sous les yeux médusés et horrifiés des autres membres de la famille. Baelor, Humfrey et Gunthor, eux, n’hésitèrent pas un instant et se lancèrent à la poursuite de l’animal pour le tuer, mais le cadet de la fratrie prit tout de même le temps de s’excuser auprès de Desmera. Les chiens à ses trousses, le sanglier ne pouvait qu'accélérer ou faire demi-tour pour essayer d’en transpercer un de ses longues défenses. Aelinor eut un mal fou à se replacer correctement en selle tant la jument était hors de contrôle et filait à toute allure entre les arbres. Mais bien consciente du danger, elle n’était pas décidée à tomber devant un animal enragé.


La brune aux yeux céruléens se coucha sur son encolure juste à temps pour éviter une branche basse et resta ainsi cramponnée à la crinière. Malgré son allure, la jument ne parvenait pas à distancer la bête lancée à pleine vitesse et les rois poursuivants peinaient à la rattraper pour pouvoir l’atteindre. Seul Humfrey pouvait agir d'aussi loin, et c’est ainsi que dans un mouvement fluide, il lâcha ses rênes, prit son arc, une flèche, encocha et décocha une flèche dans le postérieur du sanglier, espérant le ralentir. Ce ne fut pas exactement ce qu’il se passa, puisque l’animal trébucha lorsque la flèche pénétra sa chair, furieux, il se retourna, envoya voler un des chiens et se mit à gratter le sol en direction des hommes de la maison qui s'arrêtèrent promptement pour lui faire face. Aelinor, quant à elle, ignorant qu’elle n’était plus poursuivie essayait tant bien que mal de prendre le contrôle, mais n'arrête pas sa course tout de suite.

__ Oui c’est sûr.


Desmera aurait pu les revendre ,mais après tout s’ils ne lui posaient pas de problème, autant les garder. Aelinor comprenait qu'elle souhaite monter les chevaux de ceux qu’elle avait perdu. Si elle venait à perdre les hommes de sa famille, elle garderait probablement leurs chevaux, elle les ferait monter par les palefreniers et leur ferait faire de la reproduction. Son mauvais souvenir l'empêchant d’envisager de poser ses fesses sur un de ses créatures.

***

Habituée à ses tenues, elle prit peur lorsque Desmera lui proposa d’essayer quand elle viendrait à La Treille. S’imaginer dans une tenue similaire à celle de la Redwyne lui faisait l’effet d’une terrible transgression. Que diraient les gens ? Qu’une Hightower dégingandée se baladait sur l’Île, qu’elle avait des envie de roture ? Qu’elle ressemblait à une fille du peuple, ou pire, une fille de mauvaise vie ? Les catins n’avaient pas souvent de chevaux, il est vrai. Les rumeurs se propageraient-elles dans le Bief ? Les gens de la Treille étaient peut-être habitués avec leur Dame, peut-être ne diraient ils rien, peut-être même trouveraient-ils ça normal ? La transgression pourrait être amusante dans ce cas. Mais si cela venait à se savoir… Elle hésita longuement, décontenancée par cette proposition qui frisait l’indécence mais qui avait aussi quelque chose de terriblement excitant pour la brune qui aimait marcher sur la corde raide de l’interdit concernant des sujets bien plus grave, finalement, qu’une robe. C’était amusant que changer d’apparence lui fasse plus d’effet que de pratiquer des sciences occultes. A méditer. elle finit donc par répondre :

__ Il faudrait que vous me prêtiez une tenue dans ce cas.


Aelinor eut un sourire compatissant, suite à la remarque de la rouquine. Elle n’en voulait pas à son père d’être stricte et de l’avoir habituée à porter des tenues élégantes en toute circonstances, quitte à ne pas être à l’aise. C’était sa façon de la protéger, et elle lui serait toujours reconnaissante pour cela, quand bien même cela était parfois maladroit et entrait en conflit avec son caractère et ses ambitions. La brune aimait profondément Baelor même si elle ne se montrait pas toujours respectueuse. Quand bien même aurait-elle voulu se plaindre auprès de son amie qu’elle ne l’aurait pas fait par égard pour elle. Elle trouvait fot malvenu de se plaindre d’avoir une famille qui veillait sur elle, de quelque manière que se soit, face à une jeune femme qui avait, elle, perdu ses proches.

__ Oui, mais c’est normal de ne pas y arriver du premier coup, plus vous pratiquerez, plus votre corps prendra l’habitude.


Répondit Humfrey avant que le chaos ne gagne la troupe. Suite à la poursuite, le sanglier se retourna et chargea vers le groupe. Le grand blond s’approcha de Desmera pour s’assurer qu’elle allait bien, mais la voyant entre de bonnes mains avec Dandelion, il reprit sa course. Heureusement, vue la distance, ses sœurs avaient eu largement le temps de s’écarter et Baelor s’étant rapproché de la bête à bout de souffle et blessée, il put l’achever d’un coup de lance avant qu’il n’arrive sur le groupe. Suite à tout ce ramdam, Desmera fit remarquer qu’Aelinor n’était pas avec le reste de la troupe. Alors on commença à l’appeler et à la chercher.


La brune aux yeux céruléens était totalement perdue dans la forêt suite à cette course imprévue. Les arbres se ressemblaient tous et quand elle s’arrêta enfin et fit demi tour, elle ne vit personne ni n’entendit plus aucun bruit venant des autres. Seulement les bruits inquiétants du sous bois, craquement par-ci, bruissement de feuille par là, elle n’avait aucune envie de rester seule ici. Ainsi, quand elle entendit les appels et pu estimer la direction à prendre, elle ne se fit pas prier pour retourner vers la troupe. Pendant que tout le monde paniquait, elle arriva tranquillement au petit trot en pestant.

__ Ce n’est pas de la chasse ça ! On n’a pas idée de débusquer un sanglier pour le faire charger les chevaux ainsi. Vos chiens sont idiots, père ! Se faire embarquer ainsi et poursuivre par un sanglier, je m’en souviendrais.


Cette belle frayeur fit place à la détente quand tout le monde lâcha la pression et se mit à rire devant la mauvaise humeur affichée d’Aelinor.

__ Ce n’est pas drôle ! C’était terrifiant ! Franchement, vos chasses se passent-elles toujours ainsi ? Ce sport est indigne de moi.. La prochaine fois je partirais de mon côté avec mon faucon.


Elle s’arrêta devant le sanglier mort qu’on chargeait sur un cheval.

__ Regardez moi ça, il a l’épaule déchiquetée, c’est du travail de sagouin. Les rapaces sont bien plus efficaces et sans effusion de sang avec ça. Non vraiment l’art de la fauconnerie vaudra toujours mieux que votre jeu cruel et dangereux.


Furieuse, la brune prit le petit galop pour rentrer à Grand Tour. Une partie du groupe continua la chasse et une autre rentra. Humfrey, rassuré sur le sort de sa nièce, s'approchait de Desmera pour lui demander si elle voulait continuer ou rentrer.

Aelinor acquiesça.

__ J’ai pensé la même chose concernant nos statures. Je ne pense pas que cela posera problème, mais promis, si je sens que je risque de faire craquer une couture, je m’abstiendrais.


La brune aux yeux céruléens n'était probablement pas prête de se rendre à La Treille, même si cela lui ferait infiniment plaisir de passer plus de temps avec Desmera et de découvrir l’île avec elle. Elle n’avai vu que Port-Ryam et le chateau des Redwyne lors de sa venue pour le mariage de sa tante et cela remontait à des lustres. Hélas, elle avait des obligations, tant à Port-Real qu’à Villevieille. De plus, s’aventurer dans le Chenal Redwyne alors que les Fer-Nés rôdaient lui semblait un peu dangereux.

__ Alors je vais essayer d’être un bon professeur.


Sourit Humfrey à la remarque de la rouquine.

***

__ Grâce aux Sept ! Je vais bien.


S’exclama Aelinor acceptant brièvement l’accolade de Desmera avant de repartir en pestant toujours.

__ Je crois que vous avez raison.


Répondit Humfrey en arquant un sourcil vers sa nièce adorée qui ne semblait pas d’humeur à partager un moment agréable avec son amie pour le moment. C’était judicieux de la part de la Redwyne de s’en éloigner, et tout à fait pour lui plaire à lui. Il voulait lui proposer de rentrer à Grand Tour pour s’exercer au tir à l’arc dans le calme et éviter une nouvelle frayeur pendant cette première chasse, mais Desmera était déjà en train de suivre le groupe alors qu’il venait d’ouvrir la bouche. Il lui emboita donc le pas et se tint près d’elle pour s’assurer qu’il ne lui arrivait rien. Il ne tira même pas le cerf, ses frères et les gardes chasse se débrouillant très bien sans lui. C’est alors que Baelor mit pied à terre et s’approcha de la Dame de la Treille. La tradition voulait que lors de la chasse qui était organisée pendant une visite, l’hôte offre l’honneur de mettre à mort un gibier noble à son invité. Généralement, ce dernier repartait également avec le trophée et la Maison Hightower était une famille de traditions. Mais Baelor ne voulait pas mettre la jeune feme dans l'embarras, achever un animal n’était pas une mince affaire, et dans la mesure du possible il convenait de le faire rapidement et le plus proprement possible. Il y avait plusieurs manières de faire, l’une au couteau, qui exposait le chasseur et l’autre à la lance, il pouvait alors rester à distance, mais cela impliquait néanmoins d’être précis avec une arme de plusieurs kilos entre les mains. Bref, il ne voyait pas de bonne solution pour ce cas précis sachant désormais que Desmera n’était pas une chasseuse. Pourtant, il ne pouvait pas oublier qu’elle était Seigneure de la Treille et ne pas lui offrit l’opportunité de remporter le Trophé. Il y avait réfléchi longuement pendant la chasse et il avait finalement trouvé la solution qui lui semblait la plus judicieuse.

__ Lady Redwyne, souhaitez-vous ce noble animal en votre nom ?


Toute l’assistance attendait la réponse de la demoiselle avec une certaine fébrilité, tout le monde avait hâte de savoir ce qu’elle allait dire. La configuration de ce rituel étant, cette fois, inédite.

***

Au retour de la chasse, le grand blond prit la jeune femme à part pour lui proposer de se retrouver en milieu d’après-midi pour un entrainement de tir à l’arc, elle était libre de venir quand cela lui chantait ou même de ne pas pointer le bout de son nez. De toute façon, le chevalier serait présent pour son propre entraînement. Il ne voulait la forcer en rien, mais cela lui ferait plaisir à la fois de lui enseigner ce qu’il savait et de partager du temps avec elle, en plus, le maître d’arme serait certainement présent et il se ferait un plaisir de reprendre le jeune homme s’il commettait une erreur dans ses explications. Il lui demanda également si, une balade en tête à tête, le lendemain lui siérait, afin de faire plus ample connaissance et d'arpenter le fameux chemin des contrebandiers . Ensuite, ils se retrouvèrent tous pour aller au Septuaire, comme chaque jour, Aelinor semblait être calmée. Lors de la distribution de pain, Joline remercia la jouvencelle pour le Mestre et promit de donner des nouvelles de son fils. Lors du déjeuner, la brune aux yeux azur s’assit encore à côté de Desmera et lui dit :

__ Si vous voulez, avant notre départ, je vous montrerais ce que moi, j’appelle la chasse. C’est bien moins dangereux et moins salissant. En vérité, c’est un art.


Les conversations allaient bon train sur ce qui s’était passé lors de la chasse et tout le monde y allait de son commentaire. Baelor voulut rassurer la rousse jouvencelle en lui disant que ce genre d’incident était plutôt rare. La Hightower profita du brouhaha ambiant pour se pencher vers Desmera et lui demander des nouvelles de la piste dornienne.


Chacun vaqua à ses occupations après le déjeuner, mais pour beaucoup, le début de l'après-midi fut consacré à une sieste bien méritée pour les lève tôt.